10 - Numb Aconitine fingers

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TW : mentions de mort

              Lorsque la pulpe de mes doigts touche les cendres sur le carrelage, les derniers résidus ne sont plus que tièdes.

Une de mes horribles larmes tombe sur le petit tas, qui l'absorbe en quelques secondes, et je continue de pleurer.

Je pensais qu'il ne prendrait pas longtemps à brûler. Quelques secondes, tout au plus.

Ce ne fut pas le cas. Il a pris son temps, comme pour me culpabiliser, parce qu'il savait que j'étais forcé à regarder. De ses yeux en plastique, il me dévisageait, il m'accusait, il méprisait le traître qu'il voyait en moi.

Je renifle, et de l'eau dégringole de ma bouche. C'est trop tard. Je ne peux plus rien faire pour lui.

Son rembourrage le quittait alors que son pelage fondait sous les flammes, et il se ratatinait contre son petit bûcher funéraire.

Je suis désolé. Je suis désolé que ça se soit passé comme ça. Je suis vraiment désolé. Je n'ai jamais voulu ça. Tu sais que je t'aimais.

Et je suis désolé, Thio.

TW : mentions de tentative de suicide

Le téléphone d'Amande vibre sur le tissu de son canapé.

« Amande ! Téléphone !, crie-je.

Il saute par dessus l'accoudoir et décroche l'appel.

— Ahoj ?

Je crois que c'est ce qu'il a dit. Je ne suis pas sûr.

Et à en juger les mouvements de ses lèvres, il ne parle pas français. Tchèque, probablement.

— Ano.

Il hoche la tête, et son sourire se fane.

Une atmosphère catastrophique envahit la pièce. Son visage s'assombrit, comme vieilli de dix ans, la fatalité câlinant son corps et effaçant ses yeux.

— Ne.

Ses doigts tremblent, et les miens aussi.

Je ne comprends rien à ce que dit Amande. Je suis incapable de l'aider.

— Ne., répète-t-il.

Il serre sa coque dans ses doigts, de plus en plus sous tension, avant d'hurler :

— Jdi do hajzlu !!

Puis il enchaîne une pléiade d'insultes tchèques, avec une intonation toujours plus cinglante, et des cris à la fois autoritaires et fragiles.

— Sbohem. », finit-il avant de lancer son téléphone sur la table basse.

Complètement furax, Amande commence à faire les cent pas dans le salon, en murmurant des mots que je ne perçois pas, alors ma voix fébrile se risque à demander :

« ...Ça va, Amande ?...

Question stupide mais tellement plus facile à poser que « pourquoi on dirait qu'on vient de t'apprendre le meurtre de toute ta famille ».

— Non...

Il se prend la tête entre les mains, ses mèches d'or serrées entre ses doigts aux ongles lavandes.

— Non, non..., redit-il. Non, non, non ça ne va pas !! Ça (...) va pas du tout, Sira !!

— Qu'est-ce qui-... Ne va pas ?...

Bien qu'il soit à l'intérieur, Amande sort un paquet de cigarettes, et sort son briquet. La cigarette tombe de ses mains agitées, et il jure, puis l'allume enfin.

CyanideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant