4 - Swimming in Batrachotoxin

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Amande n'était pas du genre à rester abattu longtemps. Il souffrait, bien sûr, mais me montrer ses blessures était sa hantise. Il préférait purger sa douleur en silence plutôt que de m'en faire part pour que je l'aide. Je savais que je devais le laisser guérir seul, alors je n'ai rien dit. Mais pour me prouver que je n'avais pas à me faire de souci pour lui, Amande m'a proposé de sortir.

« Sois prêt à vingt heures ce soir. Je t'emmène quelque part, Sira. J'ai hâte :) »

Je souris en regardant encore une dernière fois son message. Ce sera notre premier véritable rendez-vous, alors ça me fait plaisir qu'Amande pense à nous.

Puis mon téléphone émet un flash, et le message reçu est simplement : « Je suis devant chez toi, je t'attends beau gosse. »

Je ris et sors de chez moi, le sourire aux lèvres, fier que mon copain soit à mon immeuble pour sortir avec moi. Il est devant sa voiture, appuyé contre la portière, calme.

Ses légères ondulations blondes semblent plus travaillées et sophistiquées, et il porte un joli jeans slim gris qui moule ses jambes galbées. Ses yeux argents me fixent, intimidants, et Amande me sourit.

Il pose sa main sur ses lèvres et me tend sa paume. « Bonjour ». Puis il fait le signe P vers lui. « Mon ». Ceci suivi de ses mains pliées en deux becs de canard fermés, qu'il fait tourner ensemble. « Amour ».

« Tu t'es fait beau, à ce que je vois. C'est vraiment superbe., me complimente-t-il avec son sourire de tombeur greffé à son visage.

Je rougis, — je ne le vois pas mais je le devine —, flatté qu'il me dise cela alors qu'il est dix fois plus séduisant que moi, et pose ma main sur mes lèvres avant de l'écarter vers le bas. « Merci ».

Son rire résonne, et il me fait m'assoir dans sa voiture.

— Ça me fait plaisir de te voir aujourd'hui, Sira., sourit-il.

— Moi aussi.

Il démarre la voiture et pose ses yeux vers l'horizon à travers le pare-brise moucheté.

— Tu veux aller quelque part (...) particulier, mon cœur ?, demande-t-il.

— O-Oh hum... L'endroit importe peu-... J'aime bien être avec-... Toi...

Un petit sourire se fraye une fois de plus sur son magnifique visage.

C'est fou combien il peut sourire lorsqu'il est si dévasté.

— Il fait beau (...) ce moment, ça te dirait de boire un petit café, puis d'aller (...) promener tous les deux ?

Je hoche énergiquement la tête.

— Ç'a l'air-... Génial !, m'exclame-je avec joie.

Alors dans sa grande voiture aux banquettes recouvertes de cuir, nous nous sommes assis pendant qu'il conduisait, sans vraiment parler, sans vraiment échanger de quelconques mots. Mais un silence apaisant. Un silence qui nous entoure, qui nous berce et qui nous guide dans une intimité plus profonde encore.

Puis entre ses lèvres épaisses sort un petit son faible que je peine à entendre :

— Hé, Sira. Tu as déjà fait l'amour ?

Je rougis. Et là c'est une certitude.

— Pardon. C'était indiscret., enchaîne-t-il sans attendre ma réponse.

— Je ne l'ai jamais fait.

Je n'attends pas son jugement, je regarde juste les lumières de la ville défiler sans faire d'adieu, des milliers d'étoiles artificielles qui n'ont de place que dans mes yeux.

CyanideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant