30 - Manganese gashapon

86 11 4
                                    

               Aujourd'hui, j'ai vraiment envie de mourir. Ça ne m'était jamais arrivé.

Lorsque je pèse la douleur de l'existence aux bienfaits de mon essence, je ne trouve que du vide.

Tout est vide, ce soir. Je regarde mes mains, les courbures de mes ongles, je regarde le mur en face de mon lit et les peluches de la couverture, et j'ai envie de mourir.

Il y a tellement de façons d'y parvenir. Aucune ne me convient. Je ne veux pas souffrir, je veux juste mourir.

À ce moment précis, la mort me paraît plus agréable que la vie. J'ignore si c'est normal, ou si je deviens vraiment fou. Cerbère ne peut rien pour moi, c'est plus grave que ça l'était autrefois. Je n'ai jamais voulu ça.

Je ne sais pas comment j'en suis arrivé là.

Mais c'est le cas. Alors je monte la musique dans mes appareils, et je renifle contre le plâtre du mur.

Peut-être que si je dors assez, mon rêve funeste m'emportera.

Je me tourne contre Amande, pour qu'il soit plus facile de tenir mon livre, et me retrouve dos à lui dans le lit. J'attrape la main qu'il laissait sous ma nuque, près de mes épaules, et la pose sous ma joue, pour qu'il ne pense pas que je fais la tête.

Ce texte est vraiment complexe, et les mots ne font que tourner devant mes yeux, mais il faut que je révise. Les fêtes arrivent, et ensuite arriveront les partiels. Et je les redoute.

Amande, lui, fait une pause des révisions cet après-midi. Il flâne sur son téléphone, ce qui est rare pour lui. Pas pour moi. Moi, j'adore perdre mon temps sur Pinterest ou du sudoku. Amande n'a quasiment aucun réseau social ni jeu, et a un temps d'écran d'une petite trentaine de minutes par jour. Je ne sais pas comment il fait.

Nous disions donc, le comportementalisme...

« Sira...

Amande se blottit contre moi, en cuillère, et passe son bras droit autour de ma taille, très ferme. Il est positionné juste là où il faut pour me faire une sensation bizarre au creux de l'estomac, mais ce n'est pas désagréable. Pour être honnête, j'aime plutôt ça.

— Sira...

— Quoi ?

— J'aime dire ton prénom...

Je rigole, vraiment fort.

Ses lèvres se pressent sous mon oreille, juste à l'endroit où l'os de ma mâchoire se courbe, et il brûle ma peau de son baiser. Il y reste pendant un moment, lent, insistant son amour contre mon visage.

Il s'écarte, un peu, et mes mains se crispent contre mon livre. Si c'est ça, être aimé, alors j'ignore pourquoi les poètes s'entêtent à nous mettre en garde. Car l'explosion de mon cœur quand il se penche une seconde fois vers moi pour embrasser ma pommette, c'est la meilleure damnation au monde.

— Sira..., répète-t-il.

— Oui ?...

Sa main monte sur mon torse, elle touche mon cœur comme personne n'en a le droit, il sait qu'il est le seul à avoir tout ça. Tout de moi.

Il m'embrasse encore la joue, si près de Renard que j'en entends même le bruit et mon estomac en sautille dans mon ventre.

— J'ai envie de toi, Sira...

Cette fois, je ferme mon livre.

Réviser et repousser Amande, c'est ce que je dois faire.

Réviser.

CyanideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant