Cyanide

31 - Chlorine Christmas

             La première chose qui m'accueille quand je passe mes clés dans la serrure de la porte, ce sont des cris. Stridents.

Alors j'entrouvre la porte d'entrée. Pour jeter un œil.

« C'est quoi ton putain de problème ?!!

Je m'écarte.

Wow.

Amande est de dos, à côté du canapé, et Jed est debout en face de lui, les bras croisés. C'est Amande qui a crié. Pourtant, il est rare pour lui de s'énerver.

Et les rares fois où je l'ai vu le faire, c'est lorsqu'il était...

...Jaloux.

— C'est de ta faute, medvídek. Tout est de ta faute.

— Ne m'appelle pas comme ça, Jed !!

— Calme, calme, c'est quoi le problème ? Tu m'invites à boire une bière normal, moi je croyais que ton vide-couilles t'avait enfin plaqué comme à chaque fois !

Amande saisit Jed par le col et j'écarquille les yeux.
Wow.

— Tu te fous de moi, tu te fous vraiment de moi-...

— C'est quoi ton problème, à toi ?! Pourquoi tu me demandes de venir si c'est pour m'engueuler comme une sale merde ?!

— Putain, espèce de connard !! Qui t'a fait croire que tu pouvais dire ça à Sira ?!

Quoi... ?

Qu'est-ce que j'ai à voir dans... Ça ?...

— Qu'est-ce que j'ai encore fait...

— Oh, tu ne veux qu'un seul exemple ? J'en ai des centaines ! Tu l'appelles mon « vide-couilles » ou « le puceau » tout le temps, tu le dégrades dans son dos, et quand il est là, tu lui fais des remarques dégueulasses sur ses plus gros complexes et tu le fais se sentir comme une merde !!

— Tu sais très bien ce que je pense de Sira. Et de votre relation.

— Et je ne t'ai jamais demandé ta bénédiction ! Ce n'est pas assez, pour toi, de faire foirer toutes tes relations dès le premier rencard ?! Tu ressens le besoin irrépressible de foirer les miennes aussi ?! J'ai le droit d'être heureux, laisse-moi être heureux, bordel !!

— On sait tous comment ça se passe quand tu es heureux, Amande. Je ne vais pas t'apprendre ça.

Ça énerve encore plus Amande, et il resserre son emprise sur la chemise de Jed.

— Tu vois que j'ai raison ? Tu fais n'importe quoi quand tu es heureux. Tu es bien mieux dans la tristesse, Amande. Et tu le sais, au fond.

Il lâche son ami, et se met à faire les cent pas.

C'est horrible, de dire ça.

— Tu aimes Sira, n'est-ce pas ? Comme tu aimais les autres. Rien n'a changé, tu essayes juste de te convaincre du contraire. Le début des crises de larmes, les excuses pleines de baisers, les disputes avec moi... Tout est toujours pareil. Et ça finira toujours de la même manière. Tu ne changeras jamais, Amande. Les gens comme toi ne changent pas.

— Cesse ça !! Tu es juste jaloux de Sira !! Parce qu'il est tellement mieux que toi !!

— Oh, tu crois ça ? Pourtant je suis toujours là, moi. Même après avoir compris qui était le vrai toi. Tu crois que ce sera son cas ?

— Sira m'aime !!

— Je n'en doute pas. Crois-moi, je n'en doute pas. Et tu l'aimes aussi. Tellement, tellement plus qu'il ne t'aime. C'est toujours comme ça. Mais dis-moi Amande... A-t-il déjà franchi la frontière ?... A-t-il gagné l'horrible titre d'être ta « personne préférée » ?