Chapitre 10- Soupçons - Partie 2

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    Bradley, en s'installant à son bureau, consulta sa montre. Celle-ci indiquait sept heures cinquante, il devait donc être près de midi à Bamako. Le correspondant de la NSA estima qu'il pouvait encore joindre son ami, Marc Lagarde, avant que celui-ci ne prenne sa pause déjeuner. Il était colonel dans les renseignements français. Ils se connaissaient depuis une vingtaine d'années et au fil du temps, malgré une défiance mutuelle toujours présente inhérente à leur fonction, leur relation était devenue amicale. Il l'appela sur une ligne sécurisée. Mais son ami serait-il seulement disponible après l'attentat d'hier soir qui avait secoué la capitale Malienne ? Apparemment oui, constata-t-il soulagé, car l'attente fut brève, son correspondant prenant rapidement l'appel.

    — Bradley ! Quelle surprise, répondit celui-ci après avoir pris connaissance du nom de l'interlocuteur affiché sur son téléphone. Excuse-moi, mais vu les évènements survenus hier à Bamako, je n'aurai que très peu de temps à t'accorder. C'est l'ébullition ici. Alors, que puis-je pour toi ?

    — Justement, c'est au sujet de l'attentat que je t'appelle.

    — Je me doutais bien que tu ne m'appelais pas pour t'entretenir avec moi de la recette du Widjila.

    — Widjila ?

    — C'est un plat très populaire au Mali. Tu perds à ne pas le connaître, crois-moi.

    — Je n'en doute pas, mais ce sera pour une autre fois. Plus sérieusement, sait-on qui a fait le coup ?

    — Encore trop tôt pour le dire. Il n'y a aucune revendication pour le moment. La piste djihadiste est privilégiée, bien sûr. Il y a toujours, çà et là, des groupes qui cherchent à déstabiliser le pays par tous les moyens. La récente attaque coordonnée contre nos forces est là pour nous le rappeler.

    Le colonel hésitait à poursuivre. Il avait passé une bonne partie de la matinée à éplucher les différents rapports émanant de ses services, et leurs conclusions ne le satisfaisaient pas.

    — Tu ne me sembles pas très convaincu, Marc.

    — Disons que le mode opératoire me semble pour le moins sophistiqué pour un simple groupe djihadiste. Il y a quand même eu simultanément une coupure générale d'électricité sur une bonne partie du secteur de Bamako, des perturbations au niveau du réseau téléphonique fixe et mobile, et enfin une explosion dans une usine chimique, suivie d'un violent incendie.

    — Et alors ? Les djihadistes sont très friands des attaques coordonnées. Ça démultiplie l'effet de panique qui en résulte sur la population et en prime, tu disperses les secours et les forces de sécurité.

    — Nous sommes d'accord. Mais ce type d'attaque demande beaucoup de temps et de préparation.

    — Comme tu me l'as rappelé, ils ont mené récemment une attaque coordonnée contre vos forces. Il est donc possible que ces attaques soient liées.

    — J'en conviens. Mais alors, le groupe armé, qui était à la manœuvre hier au soir à Bamako, a curieusement su se montrer très discret. Cela n'a jamais été vraiment dans leur style. Ils font rarement dans la dentelle au moment de passer à l'action. Ils cherchent au contraire, à faire un maximum de victimes. Et là, on ne déplore aucun mort, juste quelques blessés légers. Je reconnais que cela aurait pu être pire, avec l'usine chimique qui a explosé. Mais même pas. Les secours sont arrivés à temps pour limiter les dégâts et la zone a rapidement pu être sécurisée par les forces maliennes qui sont arrivées en nombre sur les lieux. D'habitude, c'est à ce moment-là que les terroristes en profitent pour les allumer, masqués par la nuit. Ou alors, ils interviennent à l'opposé de la zone exposée pour faire un carnage dans la population laissée immanquablement sans défense. En fait, aucun accrochage n'a été déploré nulle part. Oui, plus j'y pense et plus je trouve que cela ne colle pas avec une opération perpétrée par des djihadiste.

M.I.AOù les histoires vivent. Découvrez maintenant