Chapitre 7

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Je me lève d'un bond, me tape la tête contre le menton de Mélio, le réveillant par la même occasion.

« Désolé. Ils sont à ma recherche, on doit fuir. D'ailleurs, ils doivent te chercher aussi non ? Un lion qui s'échappe, c'est pas commun. »

« Partons. »

Il se lève en un seul mouvement, et je suis le mouvement. Il fronce le nez.

« C'est quoi cette odeur de sang ? »

« Je t'expliquerai, on doit partir. »

Il se met en marche, et je me mets à courir. Nous courons longtemps, loin, tâchant de nous éloigner des hommes qui nous cherchent. Nous nous écroulons enfin, après trois heures de course et de marche, dans une prairie verte et sombre, entourée d'arbres sombres et menaçants. Je m'allonge sur le ventre, à bout de souffle, et Mélio s'allonge, tel un sphinx, tâchant de ne pas montrer sa fatigue. Il est encore faible, je le sens.

« Ca va Mélio ? »

« Oui, moi ça va, mais toi pas. »

« Quoi ? Mais si... »

« Des gouttes de sang perlent de ton dos, ce qui signifie que tu saignes suffisamment pour que ça transperce ton t-shirt, ton pull et que ça tombe abondamment par terre. Donc tu saignes beaucoup et en continu. Vais-je avoir l'explication ? »

Pendant que je reprends ma respiration, je lui raconte l'incident dans la salle de bain, la boucherie que j'ai effectuée sur mon dos, et le fait que mes plaies se rouvrent sans cesse. Je sens son dégoût s'affirmer un peu plus à chacune de mes phrases, et je ne peux m'empêcher de frissonner à l'évocation de cette matinée pour le moins sanglante. J'enlève mon sweat, mon t-shirt, et montre à Mélio mes bandes imbibées de sang. Je les enlève, et dévoile mon dos écorché sur toute la longueur, ainsi que de nombreuses et profondes coupures un peu partout sur mon dos. Le tout saigne sans discontinuer, et je sens mes forces me quitter, d'un coup, conséquence de la perte de sang accompagnée de notre fuite. Mes yeux se voilent, et je peine à les garder ouvert, la douceur de l'inconscience m'appelle à bras ouvert, et c'est alors que je sens la douleur refluer, s'en aller progressivement. Et je vois Mélio. Il transpire à grosses gouttes, et je comprends qu'il absorbe ma douleur pour que je la subisse moins.

« Arrête ça tout de suite ! »

« Hors... de question... »

Il halète, sous le poids de la souffrance.

« Mélio, arrête s'il te plaît, tu te fais du mal pour rien, c'est ma douleur, et c'est à moi de la supporter. »

Je préfèrerais m'arracher la langue plutôt que d'avouer que cela me fait un bien fou, de ne plus sentier cette insurmontable douleur, de la sentir s'atténuer, même pour un temps limité.

« Ethana, je dois prendre soin de toi, alors cesse de gémir, et laisse-moi t'aider. Je ne suis pas ton ennemi, et j'ai accès à tes pensées, alors ce que tu pouvais cacher à Emilie, tu ne peux pas le faire pour moi, donc je ressens ta souffrance, et cela ne sers à rien de jouer à la fière. Ce n'est pas une faiblesse que d'accepter l'aide des autres. »

« Pour moi, si, et puisque tu saisis mes pensées, tu dois savoir que mon point de vue ne vas pas changer sous prétexte que tu y ajoutes ta parole. »

Je ne suis pas énervée contre lui, mais furieuse contre moi de voir que je ne suis pas capable d'être aussi forte que je le voudrais, et que j'ai la faiblesse d'accepter l'aide des autres. Car je n'ai pas la force de récupérer ma souffrance, celle que Mélio supporte à ma place. Dans un mouvement souple, il se lève, et se pose à mes côtés, puis entreprend de panser mes plaies. Il lèche mes plaies, puis va dans les fourrés identifier des herbes avec lesquelles il prépare un onguent qu'il m'applique sur le dos, ce qui fait immédiatement diminuer la douleur. Mes muscles du dos se détendent, profitant de ce court répit. Il s'allonge de nouveau contre moi, étend ses grosses et puissantes pattes autour de moi, et allonge le museau sur moi, tandis que je me roule en boule, profitant de sa chaleur.

Des ailes dans le dos - MortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant