Suite au chapitre plus long que d'habitude que vous avez eu, en voilà un plus court, ça compense ! Ceci dit, nous espérons malgré tout avoir un peu de votre participation... Qu'avez-vous pensé de l'histoire d'amour de Teria ? C'est un élément que nous ne sommes pas sûres de mettre, alors s'il vous plait, laissez nous vos avis, savoir si on la laisse ! Bref, on vous laisse à votre lecture, après juste une dernière chose : les vues, les votes et les commentaires s'accumulent, et nous voudrions vous remercier infiniment pour ca, c'est juste merveilleux, et terriblement gentil de votre part ! Bisous à tous ;)
Je me retrouve devant le restaurant à midi, et secoue la tête pour revenir sur Terre. J'ai trouvé sans mal, ce qui m'étonne, et je suis pile à l'heure, ce qui est plus que rare pour moi, l'habituée du retard. Je ricane de moi-même, mais ce son me paraît étrange après la mélancolie pensive dans laquelle j'étais à peine quelques secondes plus tôt. Je suis incapable de décrire le paysage qui m'entourait pendant le trajet, complètement absorbée par mes souvenirs, vifs et cuisants, pour certains. Mais je change de chanson et la bonne humeur s'installe en moi. Je vais en avoir besoin, devant supporter le silence de Maxime... bonne humeur de courte durée. La colère s'empare de nouveau de moi, colère que j'essaie de réfréner, mais qui existe bel et bien. Je ne peux l'ignorer, elle pas plus que l'angoisse qui me sert le ventre. S'il lui fait du mal, je lui arrache les yeux. C'est triste à dire, mais je ne lui fais pas confiance. En même temps, dire qu'il la mérite serait pousser le bouchon un peu loin. Jusqu'ici, je l'ai vu arrogant, distant, superficiel, naturel seulement quand mis en contact avec sa sœur d'âme, puis carrément stupide avec Nelly. Alors la confiance, on repassera. J'entre dans le restaurant réserver une table pour six, et le serveur m'accueille avec un sourire, n'ayant absolument pas fait le lien avec la princesse que je suis. Tant mieux, je n'ai aucune envie d'être emmerdée avec ça. Le groupe me rejoint à peine cinq minutes plus tard, et je remarque aussitôt la mine réjouie de Martha, et le regard fuyant de Maxime. Emilie lui tient la main. Je me retiens de lever les yeux au ciel, ils s'installent à la table, et nous survolons du regard le menu. Je choisis une salade caesar, qui fait partie de mes plats préférés, Iz opte pour une côté de bœuf, Norbert et Martha pour un hamburger-frite, Emilie pour des lasagnes, et Maxime pour un risotto. Nous commandons et commençons à discuter, de Jean-Baptiste.
- Comment ça se fait que tu sois retourné le voir ? demande Norbert. Il te plaît, c'est ça ?
Il rit, moqueur, et je ris avec lui, bien que je sente comme une tension émaner du groupe, aussitôt ces paroles prononcées. Mais toujours impossible de mettre la main sur la personne concernée.
- Ça va pas non ? rétorqué-je. Je suis sans cœur, tu te souviens ?!
Il ricane. La tension redescend.
- C'est vrai, j'avais oublié, pardonne-moi ! N'empêche que tu n'as pas répondu à ma question, ajoute-t-il avec un clin d'œil.
- Tu rigoles ? Je t'ai dit que je n'étais pas intéressée ! dis-je avec l'intention évidente de le taquiner.
Il me fait les gros yeux, et j'éclate de rire.
- Tu vois de quoi je veux parler !
- Bon, eh bien je suis retourné le voir tout d'abord parce que je l'avais promis...
- Donc tu es intéressée ! Cachotière ! me coupe Norbert avec un sourire mesquin.
- Mais je vais finir par t'en coller une, ma parole ! m'exclamé-je avec un sourire. Donc, parce que je l'avais promis etaussiparcequeleroyaumefaitunsuividesvictimesdesattentats ! poursuis-je en un souffle, pour ne pas qu'il me coupe.
Il rigole, et Martha attaque à son tour. Décidément, il semblerait que je sois la cible toute désignée de ce repas !
- Aaaah, et c'est toi que ton père a choisi pour ce suivi, hein...
Dis donc, c'est qu'elle est mesquine, la petite Martha ! Je lève les yeux au ciel.
- Mon père n'a pas le temps, il a trop à faire.
- Oui, mais toi tu trouves le temps, on dirait bien, malgré tes entraînements ! continue-t-elle.
- Je suis en perm, banane !
- Et tu profites de ton week-end de perm pour aller le voir, et donc effectuer un travail royal ? Quel sérieux, Thana ! dit-elle en étouffant un éclat de rire.
Je pouffe. Cette conversation part vers du grand n'importe quoi ma parole !
- C'est sûr qu'on ne peut pas en dire autant des cours que tu suis en classe ! Il doit vraiment te plaire, ce jeune homme, pour que tu prennes sur ton temps libre pour aller le voir ! dit alors Emilie, s'ajoutant à la discussion.
- Mais c'est n'importe quoi ! dis-je en éclatant de rire. C'est un suivi que j'accorde à toutes les victimes, c'est du travail !
- Oh oui pardon, c'est vrai, quelle corvée... susurre Emilie avec un regard taquin.
Soudain, elle se met à hurler, de toutes ses forces, en se levant d'un bond de sa chaise et en reculant précipitamment contre la table, faisant tinter les verres qui s'entrechoquent, bousculés par ce mouvement de peur de mon amie. Je me lève aussitôt et amorce un mouvement vers elle, les sourcils froncés, le front barré d'un pli qui témoigne de mon inquiétude immédiate.
- Emilie, qu'est-ce qu'il se passe ?
- Une souris, une souris, là, regardez ! hurle-t-elle en désignant le minuscule rongeur gris qui traverse effectivement la salle, slalomant entre les serveurs qui remarquent enfin la bestiole indésirable.
Maxime la fixe, stupéfait, ne sachant comment réagir, et ce sont mes bras qui entourent ceux d'Emilie en un geste de réconfort. Je l'attire à moi, l'éloignant de l'animal qui court, soulevant l'animation dans le restaurant encore si calme une minute auparavant. Nous sortons, toutes les deux d'abord, vite rejointes par le reste du groupe, seul Norbert reste pour récupérer les affaires d'Emilie et les miennes. Nous quittons la place et rentrons aussitôt au château, Emilie encore tremblante de peur.
- Je déteste les souris, et les rats, murmure-t-elle une fois dans l'enceinte du château, alors que nous marchons vers la salle à manger.
Comme nous n'avons pas eu le temps de déjeuner, et il semble que ce ne soit pas nécessairement une mauvaise chose vu les éléments que cachaient cette cuisine, nous nous installons dans la grande salle à manger, et je descends en cuisine commander pour tout le monde, laissant Emilie dans les bras de son prince charmant, qui semble savoir quoi faire. Je ne sais pas quoi penser de son attitude vis-à-vis de mon amie. Que veut-il, exactement ? Passer aussi rapidement de cette pouf de Nelly à Emilie me semble pour le moins étrange. Je dévale les escaliers jusqu'aux cuisines, lorsque je rate une marche et chute tête la première sur les escaliers en marbre dur. Je tombe violemment, n'ayant pas la vitesse de me retenir avec les mains, et mon front percute la marche dure et froide, me causant une vive douleur. Je descends plusieurs marches, glissant, et quand je m'arrête, j'essaie de me relever, mais le monde tourne dangereusement.
« Thana, que s'est-il passé ? Tout va bien ? »
La violence de la douleur a dû l'alerter.
« Tout va bien Mélio, je suis juste tombée. »
Mais il sent le vertige, il voit dans mes souvenirs que je n'ai pas mangé ce matin, il sait l'entraînement intensif que j'ai, la marche d'une heure que je me suis infligée ce matin, et il comprend bien vite.
« Assieds-toi, reste quelques instants sur les marches, mets ta tête entre tes genoux et respire lentement le temps que le vertige passe. Ensuite, tu descends lentement jusqu'aux cuisines, et tu prends un plat consistant. C'est bien compris ? »
J'acquiesce sans un mot, geste inutile puisqu'il ne me voit pas, mais il le sent en moi. Je me maudis, je me déteste, je me hais, je me vomis de me montrer sous un jour si faible. Je voudrais être forte et jamais malade, avoir une constitution de fer, être capable d'affronter tous les assauts, autant physiques que mentaux. Mais je ne suis rien de tout ça, juste une fragile poupée avec laquelle on joue avant de se lasser, avant de la jeter. Je ferme les yeux et souffle lentement. Puis j'ouvre les yeux, et le monde retrouve un angle normal. Je me lève et repars, sentant l'esprit vigilant de Mélio vérifier que j'arrive bien vivante à destination. Je commande comme au restaurant, et il pousse un rugissement de rage lorsqu'il entend ce que je commande.
« Tu te moques de moi ? Prends autre chose, du poisson ou des œufs, mais quelque chose de nourrissant avec des protéines ! »
« J'ai envie d'une salade caesar, je prends une salade caesar ! »
Je coupe la communication et me concentre sur les odeurs multiples qui, une fois encore, envahissent la cuisine. Je sens du thym, du miel, du chèvre, une vague odeur de gaufres, du pain chaud, du poulet, des pommes de terre, des haricots verts, peut-être des épinards ?, de la rose, une délicieuse odeur de tiramisu qui cuit dans le four, me faisant saliver comme un bouledogue. Au bout de vingt minutes que je passe assise sur le même plan de travail qu'hier, Hambort me passe les plats.
- Voilà ma belle ! dit-il avec un grand sourire.
En s'entendant parler, il écarquille les yeux, et rougit de honte, avant de se confondre en excuses.
- Je vous prie de m'excusez, votre Altesse, ces mots m'ont échappés, je ne voulais nullement être aussi familier, je vous prie d'accepter mes plus plates excuses, Votre Altesse...
Je souris, me retenant d'éclater de rire.
- Hambort, vous me feriez grand plaisir en m'appelant Thana, et cette « familiarité » me ravie plus qu'autre chose.
Il me regarde avec des yeux ronds.
- Je suis une princesse, tout le monde me sert avec des courbettes et des sourires et des Votre Altesse par ci, Votre Altesse royale par-là, alors un peu de familiarité me comble !
Il me regarde, puis sourit, et je lis la compréhension dans ses yeux. C'est on ne peut plus lassant de devoir vouvoyer mais surtout être vouvoyé par tout le monde, sans espoir d'une quelconque amitié possible.
- Entendu, ma belle !
Il sourit, hésitant, mais vois la joie que m'apporte cette remarque et me tend les plats avec ravissement. Je remonte, une boule de bonheur dans le ventre, et apporte les plats le sourire scotché aux lèvres. Tout de suite, je remarque que l'atmosphère s'est détendue, Emilie est presque assise sur les genoux de Maxime qui lui tient la main et qui doit de toute évidence lui raconter quelque chose de drôle, vu qu'elle rit aux éclats. Je pose les assiettes devant chacun, m'attable à côté de Norbert, et nous commençons à manger. La salade est certes à tomber par terre, mais teintée de tristesse, car elle me rappelle de manière cruelle la rage de Mélio. Je tente de renouer le dialogue, mais je trouve porte close, laissant apparaître un orage de sentiments et d'émotions qui cohabitent difficilement. Je laisse un message.
« Excuse-moi, ce n'est pas contre toi. Je ne fais pas ça par provocation, j'ai l'intention de bien manger, il y a du tiramisu au dessert. J'avais juste vraiment envie de ça. »
Je me concentre de nouveau sur la conversation, qui porte sur les épreuves prochaines de Maxime, qui veut devenir historien. Cela ne colle absolument pas avec son don, et je suis assez surprise, et je m'apprête à poser une question quand Norbert me devance, et oriente la discussion vers un autre sujet. Nous en venons à parler de celles d'Emilie, qui avancent lentement, ce qui la frustre. Je me sens coupable. Mélio revient alors brusquement, encore empli de colère.
« Oui, je commence à m'habituer à tes excuses, figure-toi. »
Sa phrase me frappe avec la violence de la foudre, m'assassine. Je recule aussitôt, ferme les portes, voulant être seule pour ne pas montrer à quel point sa phrase m'affecte. Il ne pourrait pas être plus clair. Il est vrai que j'ai tendance à faire les conneries pour aller m'excuser après, comme si le fait que je demande pardon excusait tout, comme si je n'avais pas peur des conséquences. Je me donnerais des gifles. J'ai envie de pleurer, d'un coup, de pleurer pour toutes les conneries que j'enchaîne, le manque de temps que je passe avec mes amis, l'enfer que je fais vivre à Mélio, la distance que je prends avec Aymeric, le refus de voir Sofia, le peu de temps que je consacre à Lachlyn, les horreurs que je dis, fais, pense, mais surtout, surtout, mon horrible tendance à être aveugle. Je suis aveugle aux autres, et je m'en mords bien les doigts, aujourd'hui. Ne voulant pas que mes amis voient la tristesse qui me noie, je mets fin au déjeuner, prétextant une migraine, et monte dans ma suite, seule. Je mets un temps infini à arriver, butant contre tous les obstacles, portes, murs, statues, piliers sur mon chemin, les yeux brouillés de larme. Une fois dans ma suite, je balance mon sweat sur le canapé et me jette sur mon grand lit à baldaquin, le cœur en vrac, la culpabilité, la tristesse et le remord me rongeant de l'intérieur. Je veux dormir pour oublier, dormir pour avoir la paix, mais également pour que les autres aient la paix. L'oreiller trempé de larmes, chose qui ne m'était pas arrivé depuis longtemps, et les yeux rouges, gonflés et brûlants, je m'endors avec une affreuse et cette fois bien réelle migraine.
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Des ailes dans le dos - Mort
FantasyJe suis différente et ce, depuis toujours. Mais rien ne me préparait à cela... Si le monde que je connais depuis ma naissance est injuste et vil, celui que je découvre est cruel et dangereux. Mais je ferai tout pour y survivre. Tout. Même si la mort...