Chapitre 49

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Dédicace à Lévy, pour ton enthousiasme aaaadorable ;)

Mélio me rejoint.
« Qu'est-ce qu'il se passe ? » demandé-je en le voyant sourire étrangement.
« Je suis assez fier de toi en fait. »
« Mmh ? Explique, vas-y ! »
« J'ai adoré te voir embrasser Lach devant le lycée. C'était audacieux, insolent et défiant, trois mots qui définissent la Thana que j'ai rencontré il y a trois mois, et que je croyais avoir définitivement perdu. »
« Je crois que tu te trompes, Mélio. Cette fille-là n'existe plus. C'est parce que j'ai dû agir que j'ai fait ça, tu le sais. Tu as vu l'état dans lequel elle était tout à l'heure, je ne l'aurais pas fait en temps normal. »
« N'en sois pas si sûre... »
Bizarrement, je ressens une pointe d'agacement face à cette conversation qui semble aller droit dans le mur, et décide de changer de sujet. C'en est assez. Pourquoi Mélio s'obstine à me faire sentir combien j'ai changé, alors que je le remarque bien assez toute seule, et surtout, à me faire sentir combien il le regrette, alors que je suis fière de cette fille douce, bien élevée et attentionnée que je suis devenue ? Je ferme les yeux, pour les rouvrir aussitôt.
« Eh, et si on allait voir Teria ? »
« Excellente idée ! »
Je saute hors du bain, enlève mon casque, enfile à la vitesse de l'éclair ce qui me tombe sous la main, et nous filons dans le jardin-parking-de-dragons pour retrouver notre reine.
« Oh c'est gentil de penser ça de moi, mes chéris ! s'exclame-t-elle en nous voyant arriver. Comment allez-vous ? »
« Bah plutôt bien, écoute, et toi ? » demande Mélio.
« Ça va, ravie de te revoir, et toi ? » répondis-je.
« Enchantée aussi, dit-elle avec un clin d'œil qui ne passe pas inaperçu, vu la taille de ses paupières. On va faire un tour ? »
Mélio écarquille les yeux à cette idée, et Teria éclate de rire.
« OK, j'ai compris Mélio. Mon coco, il va rapidement falloir régler ce problème avec l'altitude, ça va devenir handicapant sinon ! »
Il lève les yeux au ciel et se laisse tomber dans l'herbe, quatre-cent kilos qui s'écrasent au sol comme une grosse masse qui fait trembler la terre. Je rigole. Le message est on ne peut plus clair ! Puisque nous restons visiblement  ici, je m'assois à côté de lui, enfouie dans sa crinière qui me protège du froid.
« Dis-moi, tu restes ici toute l'année ? Il n'y a pas de salle assez grande pour t'accueillir ? Tu dors ici, tu n'as pas de chambre ? » demandé-je, me faisant la réflexion que je ne l'ai jamais vue qu'ici.
« Oh si, ne t'inquiètes pas, toutes les salles communes de ce château sont construites de telle manière qu'elles peuvent accueillir un dragon. Chaque roi a un frère ou une sœur d'âme, alors il a fallu prévoir la place pour ces dragons. Et j'ai une chambre, bien sûr, mais elle fait partie de la suite d'Aymeric, et depuis l'arrivée de Sofia, je n'y dors plus. C'est leur territoire, et plus le mien à présent.  Et quand à savoir si je reste ici toute l'année, eh bien je n'ai pas beaucoup d'amis, car je suis reine et une reine n'a pas à avoir d'amis, et je n'ai plus beaucoup de travail non plus. J'accompagne Aymeric pour ses sorties officielles, ses déplacements, mais les deux sont très rares, alors je ne fais plus grand-chose. Je ne vais plus au Chutes, je ne peux pas participer aux tournois, alors oui, je reste ici toute l'année. »
Brr, j'en ai un frisson. Cette immobilité constante me rendrait folle, au sens premier du terme.
« Mais tu ne vas pas passer l'hiver dans le froid, quand-même ! » s'exclame Mélio.
Elle le regarde et ne dit rien. Bon, il est urgent de trouver une solution à ce nouveau problème, qui s'ajoute aux milliards d'autres que j'ai l'impression d'avoir en ce moment. Puis elle sourit.
« Ne t'inquiètes pas, Mélio, je suis résistante ! Je ne suis pas en sucre, mon chou, ce n'est pas un petit hiver de rien du tout qui va me faire peur. » répond-elle en souriant de toutes ses dents, ce qui est assez effrayant.
En entendant mes pensées, elle éclate de rire, et je la toise.
« Ce n'était pas drôle. Tu as vues tes dents ? C'est effrayant, ces machins-là ! »
Elle secoue la tête en levant les yeux.
« C'est ça oui. Bon, Thana, je respecte tes choix vestimentaires audacieux, mais pour une fois que tu as ta soirée, tu pourrais peut-être faire un effort non ? Surtout si tu emmènes Martha au restau, je te signale que tu restes la princesse, et que ce n'est que parce que tu es destinée à devenir Invisible que tu ne t'habilles pas quotidiennement en robe. Donc fais-moi l'honneur de t'apprêter un minimum pour sortir, s'il-te-plaît. »
J'écarquille les yeux. Mais c'est vrai ça, on va faire quoi avec Martha ? Est-ce qu'elle attend de moi que je l'emmène au restau ? Mélio me dévisage, ahuri puis amusé par mon manque de tact.
« Evidemment qu'elle s'attend à ce que tu l'emmènes au restaurant, idiote... »
Bon, c'est bien à savoir, ça. Teria plisse les yeux, amusée, et je vois qu'il est temps que je prenne congé, si je dois me préparer. Je me lève, enlace son long cou, et Mélio et moi filons.
« Je reviens une fois qu'elle est prête, elle va avoir besoin d'aide ! » s'exclame mon lion.
Ben voyons. Rêve, mon gars ! Seulement voilà, une fois devant mon immense garde-robe, le restaurant étant réservé, je dois bien avouer que je suis perdue. Bon, je mets quoi, moi, maintenant ? Une robe de soirée ? Visiblement, pas jogging et sweat, sinon Teria va faire un infarctus.
« Pas de robe de soirée, c'est une sortie informelle. C'est juste pour prouver à la société que tu es une princesse, que donc tu ne te laisses pas aller. Donc on referme la porte de gauche. Ferme-moi ce tiroir, n'espère pas t'en tirer avec un jogging ! » s'exclame Mélio, une teinte moqueuse dans sa voix.
Je m'exécute, me drapant dans le peu de dignité qu'il me reste, et me retrouve face à une pile de jeans, jupes, robes, t-shirts et pulls en tous genres. Eh bien, si ce n'est pas être dans la merde, ça...
« Bon, tu as visiblement besoin d'aide, murmure Mélio, moqueur. Il fait extrêmement froid, pas de jupe ni de robe. Jean, c'est décontracté, tu vas au restaurant, pas à une soirée branchée. »
J'attrape le premier jean sur la pile, fais de même avec un t-shirt uni que je ne choisis pas, puisque je vais mettre un pull, et manque de me faire incendier par mon lion.
« Choisis ton t-shirt, triple imbécile ! Et s'il fait chaud dans le restau ? Hein ? Tu vas avoir l'air maligne avec ton t-shirt blanc, genre 'je suis une collégienne et je vais faire du sport' ! Ton jean est brut, tu choisis un t-shirt  clair, pour contraster. Tiens, le troisième de la deuxième pile en partant de la droite, il est parfait. »
Je le regarde, et éclate de rire.
« Dis-moi, tu t'y connais bien, en vêtements ! Tu n'aurais pas une vocation ratée de styliste toi ? »
« Je suis outré, dit-il en prenant un air pincé. Mais je saurais rester digne, ma chériiiiiie, quoi qu'il arrive. »
Je sors mon Ipod, branche mes écouteurs, sors un chewing-gum que je mâche ostensiblement, lance « X Gon Give It To Ya », et fais face à Mélio. Puis, alors que la chanson se lance, j'articule les paroles, et en fais des caisses. Il lève un sourcil, l'air de dire « t'es pas sérieuse là ? », mais je sens l'hilarité qui monte insidieusement en lui, et je continue jusqu'à ce qu'il détourne la tête pour me cacher son rire. C'est moi qui ris, et j'attrape ledit t-shirt en bougeant sur la chanson.
« Et je fais quoi pour le pull, monsieur le styliste ? »
Il lève les yeux au ciel, mais sourit, incapable de la cacher, et me pousse sur le côté, joueur.
« Oh, tu veux jouer à ça ? Attends que je revienne du restaurant, et tu vas voir ce que je vais te mettre ! Mais là, je n'ai pas le temps. Je suis quelqu'un d'important, moi, figure-toi ! J'ai un emploi du temps de ministre... »
Il pouffe de rire, et se met en tête de me trouver un pull. Lorsque c'est chose faîte, j'enfile les vêtements, et vais me coiffer, voyant le regard outré de Mélio lorsque je me presse vers la sortie.
« Tu t'es vue ? On dirait que tu as un nid de corneille sur la tête ! »
Je ne relève pas, me contente de ronchonner pour la forme, et attrape une brosse. Je soupire. Là, je ne peux nier que le résultat est affreux. Comment je vais démêler un truc pareil ? Une fois que tout est démêlé, Mélio attrape un head-band dans un des nombreux tiroirs de l'armoire, et me le tend.
« Et comment je mets ça, moi ? »
Ses yeux brillent, taquin, et il m'aide à mettre ce que j'apprends être un bijou de tête, pour discipliner mes longs cheveux.
« Bon, Thana, écoute-moi très attentivement. Tu dois faire attention à toujours avoir des cheveux que tu ramènes devant toi, pour bien cacher ta marque, d'accord ? Le pull et le t-shirt montent bien au niveau de la nuque, mais ce ne sont pas des ras-du-cou, il y a des chances que, si tu bouges trop, ils puissent dévoiler partiellement ta marque sur les clavicules, donc tes cheveux doivent cacher ça, OK ? »
Je hoche la tête. Puis je me maquille rapidement, sur les ordres de mon lion et ensuite, je mets des boucles d'oreilles, un bracelet, une paire de chaussures plates (autres que des baskets, je me suis battue, mais j'ai perdu la bataille), un manteau, une écharpe, des gants (« Pas de bonnet, idiote ! Tu vas faire comment pour l'enlever et avoir l'air présentable ? »), et c'est parti ! J'embrasse Mélio, vérifie que j'ai de quoi payer le restau, et je file dans la salle à manger.

Des ailes dans le dos - MortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant