Sédah revint progressivement à elle. Elle se trouvait sur la banquette arrière d'un véhicule spacieux, sa tête reposant sur les genoux de sa grand-mère.
— Grand-mère ? articula-t-elle péniblement.
— Où suis-je ? J'ai fait un drôle de rêve... Il avait l'air si réel !
Sédah avait la bouche terriblement pâteuse. Cérès lui répondit :
— J'aurais aimé que ce ne soit qu'un rêve. Mais tu es bien la fille de Perséphone et du dieu des enfers.
Et tu es bien ma petite fille, à moi, Déméter.
Tu as rencontré ta mère, ton âme a été accueillie momentanément dans le Royaume des Enfers grâce au pendentif que je t'ai offert et à un rituel d'accès qui reposait sur le sacrifice de ma Proserpine sous sa forme animale.
Il était nécessaire que pour le jour et l'heure précis de ta naissance, tu quittes le jardin des Hespérides.
Tes gardiens et leur si précieux jardin auraient été découverts si tu étais restée plus longtemps.
Ton âme ayant déserté ton corps, nous avons pu te faire quitter le jardin sans exposer Ladon, Hespérie et ses sœurs.
Nous sommes maintenant très pressées, car ton âme est revenue plus vite que je ne le prévoyais.
À cette heure, nous aurions dû nous trouver dans un sanctuaire secret. J'espère que nous parviendrons à le rejoindre sans encombre.
Je vois que ta mère t'a fait présent d'un bien inestimable : la prunelle de ses yeux. Elle avait raison. C'est très efficace !
On ne détecte plus la marque de ton père.
Sa grand-mère lui tendit un petit miroir. Elle observa que les piquetages de sang au fond de ses iris avaient disparu. Sédah s'était redressée et se tenait maintenant parfaitement assise, dans une posture presque un peu raide. Sa grand-mère l'observait avec calme. Elle perçut soudain une vague d'abattement déferler sur sa petite fille. Tant d'émotions contrastées se bousculaient en elle.
— Tu savais et tu ne m'as rien dit. Personne ne m'a rien dit. Vous m'avez tous menti.
Des larmes roulèrent sur ses joues. Elle se sentait soudain si abattue, si inquiète, et en colère, tellement en colère. Par-dessus tout, elle se sentait écrasée par une impression de déracinement intolérable. Son monde s'écroulait littéralement.
Rien n'était vrai.
Depuis sa naissance, tout n'était que fausseté et mensonges. Et elle était la source de tant de sacrifices et de malheurs. Sa vraie mère avait l'air si triste ! Elle se remémora alors cet endroit sinistre où elle vivait avec son père Hadès et cette image la glaça.
— Mon père ! Le terrible Hadès ! se répéta-t-elle intérieurement de manière totalement incrédule.
Sa grand-mère la fixa alors silencieusement avant de détourner le regard vers le paysage. Sédah ne savait plus où elle en était.
Pour la première fois, elle se trouvait hors de l'enceinte du jardin et au lieu de savourer la découverte du monde extérieur qu'elle avait désiré avec tant de ferveur, elle avait un mal de tête terrible, son ventre était complètement noué, et elle se sentait oppressée, comme confinée à l'intérieur d'elle-même.
Elle supposa que c'était de la peur. Un sentiment étrange qu'elle n'avait jamais vraiment éprouvé jusqu'alors. La menace qui planait désormais sur sa destinée était littéralement en train de lui fondre dessus, l'accablant sous son terrible poids. Elle se sentait orpheline et livrée à sa grand-mère, cette femme qui s'était toujours montrée si distante et sévère avec elle.
VOUS LISEZ
Sédah - La fille cachée d'Hadès - T1
FantasyDepuis sa naissance, Sédah vit loin du monde. Des ombres terribles grandissent en elle, menaçant toute forme de vie qui entre à son contact. Elle ne ménage pourtant pas ses forces pour tenter de les contenir. Accompagnée de sa grand-mère Cérès, une...