Chapitre 2 - Révélation - partie 1

80 6 4
                                    

Alors que la date d'anniversaire de ses seize ans approchait, ses tantes semblaient en liesse.

Elles étaient plus empressées et attentives que d'ordinaire.

Elles la gâtaient, lui préparant chaque jour de nouveaux desserts plus savoureux les uns que les autres, lui confectionnant des bijoux et des robes somptueuses, des coiffures extravagantes.

Elles l'invitaient à chacune de leurs promenades, et parfois à venir déguster différents thés aux parfums délicats.

Ces divers moments étaient des occasions pour ses tantes de lui raconter divers mythes et légendes qui engageaient, dans diverses cultures, les dieux de la nuit, des ombres et de la mort, mais aussi les dieux de la vie, de la renaissance et de la fécondité.

Ces récits passionnaient sincèrement Sédah, mais elle souffrait de leur excès d'attention.

Elle étouffait, n'ayant plus un instant pour elle.

Elle ne parvenait même plus à passer du temps avec Brune qui semblait s'en irriter, boudant, seule dans son tiroir, et repoussant les tentatives de caresses de Sédah.

Ses parents eux aussi avaient un comportement étrange. Elle sentait leurs regards peser lourdement sur elle et lorsqu'elle tournait la tête vers eux, elle les voyait se détourner.

Quelque chose de louche se tramait.

Elle en était sûre.

Elle avait plusieurs fois surpris sa mère en train de se sécher précipitamment le coin des yeux avec son tablier, et tenter de lui cacher son état émotionnel en affichant un sourire, qui se voulait franc et rassurant.

Ladon l'avait plusieurs fois serrée dans ses bras sans raison, ce qu'il faisait rarement. L'ensemble de ces détails n'avait pas échappé à Sédah qui s'interrogeait et qui commençait à se sentir nerveuse.  

Alors que le solstice d'automne s'approchait, annonçant le jour de son anniversaire, Cérès, fit son apparition en avance. Ce fut une grande et heureuse surprise pour Sédah, même si elle se garda bien de l'exprimer.

L'attitude hautaine et méprisante que sa grand-mère afficha dès son arrivée l'en dissuada. Secrètement, elle se réjouissait cependant de sa présence pour fêter le jour de ses seize ans.

Elle se félicita également du beau temps qui accompagnait l'arrivée de sa grand-mère. Sédah avait remarqué que son arrivée était précédée par de forts orages qui laissaient ensuite place à une bruine coriace qui s'enracinait dans le paysage, engluant végétation et reliefs dans un intense brouillard.

Les contours du monde semblaient comme se diluer dans une infinie tristesse. Et Cérès ruminait pendant des jours et des jours.

Puis, au bout de quelques semaines, à l'unisson du temps qui s'éclaircissait, son humeur s'apaisait, ses traits s'adoucissaient. 

Contrairement aux années précédentes, Sédah constata qu'à quelques jours de l'automne, l'humeur de sa grand-mère était exceptionnellement sereine, voire légère et épanouie, particulièrement lorsqu'elle était en présence de son étrange compagnon : un serpent qu'elle nommait Proserpine.

Il s'agissait d'une très grosse vipère ottomane d'environ un mètre trente.

Son corps de couleur grise était parcouru par une bande noire qui sinuait de la tête à la pointe de la queue. C'était la première fois que sa grand-mère se présentait au domaine avec un animal de compagnie.

Sédah se demandait comment sa grand-mère avait pu leur cacher une telle amitié. Elle et son animal semblaient se connaître depuis toujours.

Cérès lui vouait une attention qui confinait au ridicule. Pourtant, personne à part Sédah ne semblait s'en étonner.

Sédah - La fille cachée d'Hadès - T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant