Sédah - La fille cachée d'Hadès - T1

Chapitre 22 - Le jeune dragon noir - partie 2

Osmane ne bougeait pas. Sédah était mal à l'aise d'avoir à dormir dans la même pièce que lui. Elle qui pensait enfin avoir un moment de paix, voilà qu'elle n'allait pas fermer l'œil de la nuit. Si Georgios venait de perdre sa confiance, Osmane ne l'avait jamais acquise. Elle ne lui accordait aucun crédit.

Elle tenta de négocier un retour anticipé à sa chambre, mais madame Signor ne voulut rien savoir, prétextant qu'elle devait rester encore une nuit sous sa vigilance. Sédah se résolut donc à regagner son lit en surveillant Osmane du coin de l'œil.

Mais pour la première fois, il ne représentait aucune menace pour elle. Après une heure à le surveiller, ses paupières papillonnèrent, et elle s'endormit. Elle fit un rêve étrange. Un jeune dragon noir cherchait à s'envoler vers le ciel, mais il était retenu au sol par une chaîne. Le dragon la regardait d'une manière suppliante. Elle comprit qu'il lui demandait de le libérer.

Elle se rapprocha alors de l'endroit où la chaîne était attachée et elle se rendit compte que celle-ci était coincée sous un énorme rocher. Mais en s'approchant de ce dernier, elle se rendit compte qu'il ne s'agissait pas d'un rocher ordinaire, mais d'un golem de pierre qui paraissait manipulé par une présence dont elle devinait la silhouette, perchée sur un col entre deux montagnes.

La silhouette était plongée dans un nuage brumeux, mais elle crut reconnaître le profil d'un ibis. Alors que le golem se dirigeait vers elle, elle vit qu'il tenait un narcisse dans une main et la chaîne du jeune dragon noir dans l'autre. Elle fut alors tirée de son sommeil par les gémissements d'Osmane qui délirait.

En se levant, elle se rendit compte que Brune avait de nouveau disparu. Elle s'approcha d'Osmane, inquiète, et reconnut le même regard suppliant. Il ne la regardait pas, il était ailleurs, le corps tendu et découvert. Osmane était le jeune dragon noir. Elle en eut l'immédiate confirmation lorsqu'elle aperçut les écorchures qui lacéraient sa cheville.

Elle mobilisa sa mémoire pour se rappeler le rêve dans lequel elle était plongée un instant auparavant. Elle se remémora le jeune dragon noir, le golem et la silhouette qui se trouvait plantée au milieu du col. Elle visualisa la patte prisonnière de la chaîne et se concentra sur le bracelet de métal qui la retenait et qui faisait tellement souffrir le jeune dragon.

Mais elle ne trouva aucune prise. Aucune idée ne lui vint pour le briser. Elle décida de préciser davantage encore la vision qu'elle en avait et elle remarqua une charnière, elle tourna autour de la patte du dragon, cherchant une serrure ou un cadenas. Il semblait bien y avoir un logement destiné à une clé, mais elle ne parvenait pas à en comprendre la forme. Elle imagina alors que ses doigts étaient en glaise et elle toucha le logement, appuya afin que la matière pénètre dans le logement.

Le contact avec le métal était froid. Une fois qu'elle sentit que son doigt atteignait le fond du logement et que la matière de son doigt devenu glaise avait bien épousé chaque recoin, chaque aspérité, elle se concentra pour transmuter de nouveau la matière en métal cette fois-ci. Elle déverrouilla le bracelet qui tomba par terre, et elle vit le dragon s'envoler. Elle attrapa alors la main d'Osmane qui était toujours aussi brûlante.

Il lui semblait que sa respiration était moins agitée. Il avait cessé de gémir, mais était toujours plongé dans un profond sommeil. En soulevant le drap qui semblait coincé sous l'une de ses jambes, elle eut la surprise de découvrir que Brune n'avait pas quitté l'infirmerie. Elle s'était installée auprès de lui. La belette regarda Sédah innocemment avant de replonger sa tête sous le bras d'Osmane. Entendant des bruits de pas se rapprocher, Sédah regagna son lit en toute hâte. Avant qu'elle n'ait eu le temps de se recoucher, madame Signor était là.

— Et bien jeune fille... Tu ne dors pas ? Veux-tu une petite tisane pour t'aider à retrouver le sommeil ?

— Non, merci. Je croyais avoir entendu Osmane gémir. J'ai certainement dû rêver, répondit-elle en remontant drap et couverture jusqu'au nez afin de couper court à ce début de conversation.