Chapitre 84

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Il me fait une pichenette sur le haut de mon front. Les sourcils froncés, je l'observe avant de faire la même chose mais il m'esquive aisément. Pff, il ne veut même pas entrer dans le jeu...

— Du coup qu'est-ce papa t'a dit une fois quand je t'ai joliment abandonnée ?

Je me lève tandis qu'il allume sa clope.

— Si je te fais du mal, il m'éclatera la gueule et me coupera la bite, me répond-t-il dans un calme olympien.

— j'ai l'impression que tu ne prends pas à coeur ses menaces. On dirait que tu ne flippes pas, je lui fais remarquer.

Il ancre son regard verdâtre dans le mien.

— Je ne le montre pas mais je prends sa menace très au sérieux. Ton père est assez flippant...

Physiquement, papa est terrifiant. Il est très grand et musclé comme The Rock mais comme il a été privé d'une bonne alimentation et d'activité physique régulière, il a un peu perdu sa masse musculaire. Papa aborde toujours un mine très sérieuse et je trouve que sa petite moustache lui rend davantage lugubre.

Mais au fond, il ne peut même pas résister à mes caprices.

— Quand tu le connaîtras davantage, il sera un chou avec toi. C'est juste une question de temps, je finis par lui dire.

Mais Espen semble toujours tendu.

J'attrape sa main et l'incite à se détendre mais nada. On dirait qu'il se retient de chier dessus.

Nous passons tous à table et l'ambiance est plutôt joviale. Malgré les tensions entre certains individus, la discussion est fluide et nous arrivons même à rigoler lorsque papa évoque des souvenirs embarrassants de Matteo et moi.

— Attends, tu t'es vraiment pissée dessus ? éclate Niguel en me désignant du doigt.

— Ce n'est pas fini ! À ses douze ans, quand elle est partie camper avec sa classe, elle s'est chiée dessus parce qu'elle avait honte de chier dans la nature, me dénonce ouvertement mon grand frère.

Le rouge aux joues, j'élève mon troisième doigt dans sa direction tandis que tout le monde me nargue. Même le diable s'y met !

Pourquoi mon frère a balancé ce dossier ? C'est tellement gênant...

— Tu dénonces ta frangine mais tu es bien pire qu'elle. Ce n'est pas elle qui a piqué ma tondeuse pour se raser la zigounette mais qui a finalement pisser le sang, lâche soudainement papa avec un regard malicieux.

Un silence plane et c'est avec difficulté que je me retiens à rire alors que les souvenirs remontent dans ma tête comme du courant. J'éclate de rire en tapant sur la table.

— Comment ça ? insiste Nico, visiblement curieux de la suite.

— Papa, je t'en supplie...

— Matteo a eu la merveilleuse idée de se raser la bite pour la première fois à trois heures du mat'. Il a piqué ma tondeuse et se considérait déjà comme un mâle alpha mais... il s'est ouvert tout le long de sa zigounette et devinez qui l'a soigné ? Eh bien c'est moi. Ce connard m'a réveillé à trois heures du mat' et je tenais sa minuscule bite entre mes doigts pour soigner sa blessure.

Tout le monde rigole sauf Matteo qui se renfrogne et le diable pouffe de rire à mes côtés. Je m'en rappelle de cette soirée où Matteo hurlait la mort dans la salle de bain. J'étais effrayée pour lui mais avec le temps, cette anecdote est hilarante.

— Oh je comprends mieux d'où sort cette cicatrice sur ta teub, glousse Niguel en mâchant son morceau de viande.

— Comment tu sais qu'il a une cicatrice, crétin ? questionne soudainement Espen.

Tout le monde a le regard braqué sur l'intéressé, même Matteo est confus. C'est vrai, comment il le sait ?

Niguel m'a toujours inspiré le mystère.

— J'ai envie de chier, je reviens, dit-il subitement en se levant de table.

Il s'éloigne rapidement, mon frère à ses trousses.

Le repas se termine sur une bonne note et alors que certains gagnent leur chambre, je reste avec papa et Alira. Sans que je m'y attende, papa m'enlace avec Alira et je commence à me plaindre.

— Je vais m'étouffer ! Lâche-moi.

— T'es chiante, Mira. Je voulais juste un moment avec mes filles.

Résignée, je me laisse faire avec une grimace et ce câlin semble interminable. Mon père met fin à notre souffrance et nous discutons encore un peu avant de les laisser. Je rejoins ma chambre et trouve celle-ci vide. Intriguée, j'ouvre la porte qui mène à la salle de bain et la trouve vide.

Il est sûrement avec Nico...

J'actionne l'eau et laisse couler dans la baignoire. Pendant que la baignoire se remplit, je récupère quelques vêtements propres. Je me déshabille et plonge rapidement dans l'eau mousseuse. L'eau chaude me procure du bien et j'arrive à nouveau bouger le bout de mes orteils.

J'ai horreur du froid et malgré le chauffage au max, il caille toujours.

J'entends la porte de la chambre s'ouvrir et je tourne ma tête vers l'entrée de la salle de bain qui est à moitié ouverte. Depuis où je suis, je peux le voir.

— Je suis dans la salle de bain.

Il se dirige vers moi et quand il entre enfin dans ma pièce il se fige, le regard posé sur moi. Je lui souris malicieusement et lui fait signe de s'approcher davantage.

— Qu'est-ce que tu veux ? demande-t-il sombrement.

— Je veux juste que tu me rejoignes dans la baignoire, Espen. Après si tu ne veux pas, je ne vais pas te forcer, je lui avoue avec un sourire crispé.

Il reste marbre pendant de longues secondes sans rien dire, les yeux orageux sur moi mais finalement, il enlève son col roulé, puis son pantalon. Je détourne le regard et me concentre sur la mousse qui va bientôt déborder du bain. Je le sens s'approcher et mon cœur s'affole une énième fois.

Le diable se glisse derrière moi et me serre dans ses bras. Je tiens ses bras comme une bouée et pose ma tête sur son torse.

— Est-ce que tu as déjà imaginé qu'un jour on prendrait un bain ensemble ?

— Non. Au départ je voulais juste te tuer.

C'est vrai... il voulait me tuer et moi je le détestais pas.

— D'ailleurs, je t'ai oublié de te poser la question mais Alexa et les Hernandez...

— Cette salope s'est volatilisée et j'ai toute sa famille sur mon dos mais elle ne me fera rien car du point de vue du vieux, je ne les ai pas trahis, m'interrompt-il brusquement.

— Tu t'es joué d'eux et de moi aussi d'ailleurs, je souligne en tournant légèrement la tête vers la sienne.

Il soupire.

— T'as le don pour gâcher l'ambiance, muñeca. Je m'excuse encore pour mon erreur et je ne referai plus un truc pareil avec toi. Ça me fait mal de savoir que tu es encore blessée par mon acte...

— Alors divorçons.

Enchaînée au diableOù les histoires vivent. Découvrez maintenant