Ouroboros

2

Il y a des lois naturels contre lesquels vous ne pouvez rien faire. Vous aurez beau vous battre à tenter de contrer le destin, vous ne ferez que vous heurter à votre propre souffrance. Celle-là même que vous avez provoqué. La nature est une garce qui aime se jouer de vous. Que vous soyez le plus fort ou le plus faible, elle tente de vous faire croire que vous avez tout de même une infime possibilité de choix et c'est ce qui désolait le plus Sora.

L'espoir est la méthode de soumission et de contrôle la plus cruelle qui soit. L'échec est irrémédiablement au bout du chemin. Son accueil est glacial comme une lame glissant sur votre cou. Son sourire, carnassier ne fait que vous répéter : je te l'avais dit, tu ne peux rien contre moi.
La destinée n'est qu'une putain qui vous regarde de haut. Méprisable, elle se joue de vos sentiments et transforme vos rêves en un long et terrifiant cauchemar dont il est impossible de sortir.

C'était là des pensées ténébreuses dont Sora ne pouvait se démettre en regardant de loin Jonah rouler une pelle saliveuse à ce connard d'alpha.

L'oméga brun fit volte face et tourna brusquement au coin de la rue, l'estomac en vrac mais respirant calmement. Refoulant ses émotions au plus profond de ses tripes il entra, le sourire figé chez le traiteur. Une fois la commande faite, il passa son appel et comme attendu, personne ne décrocha, il prit donc la direction des dortoirs mais il ne fallut pas plus de deux minutes pour que Jonah se rattrape.

_ Hé bébé, désolé j'ai raté ton appel.

Ce surnom était vraiment à chier mais le cocu avait trop mal au cœur et laissa donc faire une fois de plus.

_ Hé, pas grave, marmonna t'il.

_ Tu rentres ? demanda le blond.

_ Hum hum. Je nous ai pris des pâtisseries pour ce soir. Pour nous rabibocher avec les filles.

_ Génial ! Qui cuisine ?

_ C'est à moi.

_ Oh, l'écervelé osa rire, tu vas commander pizza alors !

_ Question de survie pour vous. Je suis passé chez... Sora s'arrêta net sur le trottoir et regarda une nouvelle fois dans la direction du couple. L'Alpha jouait le jeu en restant à distance tandis que Jonah babillait au téléphone, les fesses posées sur une colonnade. J'ai pris des lasagnes, reprit-il.

_ Okay okay, super. J'ai une course à faire et je rentre.

_ D'accord.

Le brun raccrocha et se cala derrière une haute colonne électrique, observant les tourtereaux qui ne faisaient décidément rien pour se cacher et semblaient profiter pleinement de leurs derniers instant ensemble. Sora les regarda encore longuement, à la fois triste et envieux en songeant à la conversation qu'il avait entretenue la veille avec son blond. Son Jonah. Son cœur se serra mais il balaya se sentiment désagréable de son esprit et reprit la route, la pluie s'annonçait battante et ça le rendait encore plus maussade.

Lorsque l'oméga blond rentra chez eux plus d'une heure après, l'odeur de la sauce tomate au parmesan avait envahi tout le salon.

_ Tu as pris ta douche à l'hôpital ? le taquina Sora.

_ Hé ? Oui.

Le malaise était palpable et le plus grand des deux s'en réjoui. Il encercla les hanches du frivole par derrière et posa sa tête sur son épaule.

_ Dommage, susurra t'il. Tu sais comme j'adore cette odeur d'aseptisant. Je trouve ça sexy.

_ Pfft, t'es vraiment malade toi, répondit Jonah.