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— Aria.

Tremblante, le micro me semble si inatteignable, mes jambes vacillent. Je pose un pied après l'autre, ne sachant où regarder. Le public est enfoui dans une obscurité déconcertante. J'ai beaucoup de mal à hausser les yeux, certainement car la seule personne que je souhaite voir ne sera pas là ce soir.

Le silence avant que la musique démarre est assourdissant, j'en tremblote presque. Ma main attrape le micro, une simple respiration est décuplée, et retentit dans toute la salle. La boule dans ma gorge s'agrandît et je peux entendre Iris dans les coulisses qui se fatigue à m'encourager. La salle est pleine, selon ses dires. J'ai tenu tout le concert, mais là ça me semble insurmontable.

Je voulais qu'il soit là, c'était le plus important. Je voulais pouvoir chanter en me perdant dans ses yeux en amande, pouvoir sourire et lui dédicacer quelques paroles. Ça ne fait qu'une semaine que toute cette mascarade a pris fin, et notre relation par la même occasion, de manière temporaire. Enfin j'espère.

Je ferme les yeux quelques secondes et tous les souvenirs de notre discussion dans la voiture me submergent. C'était si douloureux.

Pourquoi était-ce si douloureux ? Ce n'était pas réellement un adieu, pour moi.

L'émotion m'envahit, gravit dans mon corps sans limite, s'approprie chaque parcelle minuscule de ma peau, mes poils s'hérissent. Une première note réussit à s'extirper de ma bouche, retentissant dans le théâtre.

C'est juste.

Il faut tenir, c'est la dernière.

Je finis par une composition que j'ai écrit dans ma chambre, sanglotante, à 3 heures du matin, prise de désespoir. C'est pour ça que c'est si dur de la chanter, elle est encore transpirante de douleur, empoisonnée, me rapellant chaque moment passée à ses côtés et toute la fatalité de notre histoire. Elle me rappelle les disputes incessantes avec ma sœur et ma mère, ce manque d'équilibre, cette violence indiscernable tapie dans les moindres recoins. La violence du silence, pourrissant dans mon être.

- Everything I love seems to leave me. Don't want it anymore.. So please don't think it's 'cause I'm leaving,
I'm simply working on believing. I'm gonna love you for a long, long time..

Les flashs s'allument dans la salle et je peux voir que tout le monde suit rapidement. Les bras bougent en rythme, certaines personnes dansent même à deux.

Je finis ma chanson rapidement dans un amas d'applaudissements. Je salue pendant une bonne dizaine de minutes, prends des photos avant de retourner en coulisses. Je me laisse tomber sur la première chaise que j'aperçois. Je sens tout le poids de ma douleur me retomber dessus telle une épée de Damoclès.

- C'était exceptionnel ! Chaque chanson a plu Aria, c'est un véritable succès ! S'exclame Iris.

- Tu crois ? Je demande en attrapant une bouteille d'eau.

- Mais bien sûr, attends, je dois répondre au téléphone... Allô ?

La voix d'Iris s'éloigne me laissant seule dans cette cabine vide. Je m'inspecte devant le miroir, il est certain que le spray fixateur d'Iris fait des merveilles, malgré mes multiples larmes, rien n'a bougé.

On s'était dit qu'il sera là pour ma première représentation, au premier rang. Mais la vie en a décidé autrement.

Je repense à notre discussion, aux mots que j'ai employé. Je ferme les yeux, replongeant exactement à cet endroit, dans cette voiture...

- Flashback -

- Alors quoi ? Tu veux vraiment signer ça ? Hein ? S'énerve Kylian en tapant le tas de feuille contre la vitre.

HURRICANE - k. mbappeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant