Khamsin. J.Jk . TERMINÉE.

.

☽ Isaiah ☽

    La partie d'échecs terminée, je retourne dans ma chambre, encore habitée par les paroles d'Azul. Sa voix résonne dans ma tête, m'incitant à trouver la paix intérieure avant de pouvoir agir. La pièce est baignée de la lumière dorée du soleil, les ombres des meubles projetées contre les murs ajoutant une dimension presque fantomatique à l'endroit. Je m'assieds à mon bureau, un meuble en bois massif.

    J'ouvre un carnet en cuir, l'odeur des pages vierges me rappelant les vieux livres avec lesquels j'ai étudié autrefois. J'attrape ma plume et commence à écrire. Les mots coulent sur le papier, chaque ligne une libération des souvenirs et des émotions qui me rongent.

"Pourquoi suis-je partie vers le sud?"

    Je commence à relater mon voyage, le soleil brûlant du désert, le train, l'attaque, mon arrivée à Manzil. Ma rencontre avec les rebelles, mon procès, les rencontres qui ont façonné ma perception du monde. Le Sud, avec ses mystères et ses secrets, m'a appris bien plus que je n'aurais jamais imaginé. J'y ai découvert des vérités cachées, des alliances secrètes, et surtout, j'ai compris le véritable complot qui se trame. Harukis ne se contente pas de vouloir le pouvoir; il cherche à détruire l'essence même de notre civilisation.

   Je vide tout ce que j'ai en moi sur ses pages. Écrivant s'en m'en rendre compte. Ma frustration se vide. Et je penses que c'est la bonne solution pour passer à autre chose. Me vider.
Et au moins, il y aura une trace. Aussi infime qu'elle soit.

     La nuit tombe, et la lumière des bougies vacille doucement dans la pièce. Mon écriture continue, chaque mot me permettant de vider un peu plus de la colère et de la tristesse qui m'habitent. C'est un exorcisme personnel, une tentative de transformer la douleur en quelque chose de tangible et compréhensible. Les pages se remplissent, l'histoire de ma quête prenant forme. C'est à la fois un témoignage et un hommage à ceux que j'ai perdus.

   Je raconte qui été Khamsin, ce qu'on a fait à sa famille. La douleur du Sud. Tout le monde devrait savoir.

    Fatiguée, je me force à finir mon récit. La nuit déjà tombée. Une fois mes dernier mots posés, la fin de la rébellion, les morts, la cruauté, le complot révélé, je ferme le carnet et repose ma plume. Je me laisse finalement tomber sur mon lit. Les draps sont frais contre ma peau, mais mon esprit reste tourmenté. Je ferme les yeux, espérant que le sommeil m'apportera un semblant de paix.

     Les cauchemars ne tardent pas à envahir mon esprit. Je me retrouve devant l'entrée de Manzil, la nuit tombant autour de moi. Les roches de la forteresse sont éclairées par des torches, leurs flammes dansantes projetant des ombres inquiétantes. Mon cœur bat la chamade alors que je me précipite à l'intérieur.
Jungkook, Jimin, Malakai, Brahim, Maya, je dois les trouver.

     L'air est lourd, chargé de la fumée et de l'odeur métallique du sang. La forteresse semble abandonnée, chaque pas que je fais résonne dans les couloirs vides.

     Je me dirige instinctivement vers la salle du trône, là où j'espère trouver Jungkook. La porte massive grince en s'ouvrant, révélant une pièce plongée dans le noir. Les torches, dont les flammes sont étrangement rouges, créent une atmosphère de cauchemar. Au fond de la salle, je distingue une silhouette. Jungkook, de dos, immobile.

- Jungkook! Ma voix résonne dans le silence, brisant l'obscurité oppressante.

     Il se retourne lentement, et l'horreur me fige sur place. Son visage est calciné, les traces des explosions ayant laissé des cicatrices béantes terrifiante. Son côté droit est déformé. Ses yeux, autrefois si vifs et pleins de vie, sont désormais des puits de douleur insondable.
Il ne dit rien, me scrute avec un regard indéchiffrable. Je fais un pas, m'approchant avec prudence.

- Ya Rouhi. murmure-t-il, sa voix éthérée et résonante, comme un écho venant d'un autre monde.

    Je me retrouve projetée en arrière, frappée par les ondes de sa voix.

    Je me réveille en sursaut, le cœur battant à tout rompre. La sueur perle sur mon front, et je respire fort, comme si j'avais couru un marathon. Les rideaux de ma fenêtre ouverte volent dans la brise nocturne, apportant un souffle d'air frais qui contraste avec la chaleur de ma peau.

    Tout semblait trop réel. Sa voix...
Je tremble encore, chaque muscle de mon corps tendu par la peur. Je ferme les yeux un instant, essayant de retenir les larmes qui menacent de couler. Ce cauchemar... c'était comme si j'avais vraiment vu Jungkook, comme si sa douleur et sa peine étaient devenues miennes.

     Je me lève doucement, les jambes encore flageolantes, et me dirige vers la fenêtre pour la fermer. Le vent nocturne caresse mon visage, apportant avec lui une odeur de fleurs et de terre humide. Je ferme les battants avec précaution, m'assurant qu'ils ne claqueront pas à nouveau. Le calme revient peu à peu, mais l'image de Jungkook reste ancrée dans mon esprit.

    Je retourne vers mon lit, m'asseyant sur le bord et prenant une profonde inspiration. Ce rêve... non, ce cauchemar, est un rappel brutal de ce que j'ai perdu et de ce qui est encore en jeu. Mais il est aussi un signe que je ne dois pas me précipiter. Azul a raison, je dois trouver la paix en moi avant de pouvoir agir efficacement.

    Je m'allonge à nouveau, déterminée à trouver le sommeil malgré tout. Les yeux fermés, je me concentre sur ma respiration, laissant l'obscurité m'envahir une fois de plus.