Chapitre 74 : Sentir son poids

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GIORGIA

BELGIQUE, NAMUR

JUILLET

La nuit enveloppe la ville de son manteau étoilé, et l'adrénaline de la soirée palpite encore dans nos veines. Nous venons de quitter une fête de légende, où la musique a emporté nos corps dans une vibe frénétique. Dario et moi, nous sommes encore imprégnés de l'énergie contagieuse qui a électrisé l'air. Sa voiture prend d'assaut la route de Salzinnes, escaladant les hauteurs de Malonne, comme si on allait conquérir le monde.

Les arbres autour de nous sont des gardiens ancestraux, observant notre duo en plein concert improvisé. Nos voix s'élèvent à tue-tête, en mode karaoké sauvage, avec les sons de ma playlist, qui déchirent le silence de la nuit. La route sombre est un ruban noir qui se tord et se tourne entre les silhouettes des arbres endormis.

Tu es en feu ce soir, dis donc ! rigole Dario, tandis que je me joue diva de la pop. Tu as carburé à combien de vodkas Red bull pour être aussi allumée ?

Franchement, j'ai pas compté, et je m'en bats les steaks, je nie avec un geste vague, me laissant entraîner par la cadence, les paupières à demi-closes.

Si tes parents te voyaient maintenant, me taquine-t-il, un brin moqueur. Tu ferais moins la maligne.

Aujourd'hui, j'ai franchi le cap des dix-huit ans, je lui rappelle, en poussant un cri de guerre, replongeant dans le refrain. Faut bien que ça se fête, non ?

C'est vrai, mais tu as déjà bien donné. Moi, à ta place, je commencerais à ralentir. T'étais pas censée rassurer ta mère à deux heures ?

Ouais, ouais, c'est prévu.

La route se transforme en piste de danse sous les phares de la voiture de Dario. On zigzague légèrement. Dario, moins dans les vapes que moi, mais tout aussi excité, garde le cap. Sa voix s'élève, rivalisant avec la mienne, alors qu'on se donne à fond dans notre show improvisé.

Je suis encore à fond dans le mood de la soirée, pas prête à atterrir. Je veux profiter à fond jusqu'à la dernière seconde. La vodka Red bull fait la révolution dans mon bide, et j'ai l'impression que ça va mal finir. Pourtant, quand "Beggin" de Maneskin débarque, je monte le son et je chante à m'en péter les cordes vocales.

Notre mini-concert est coupé net par la sonnerie de mon phone. C'est le check-up de ma mère, pile à l'heure. Dario, avec son sourire malicieux, me balance :

Essaie de parler droit, parce que là, on dirait que t'as siphonné la bouteille, se marre-t-il.

N'importe quoi, je suis juste un peu pompette, c'est tout ! je réponds, en décrochant. Yo, Maman, je lance, en faisant de grands gestes pour que Dario la mette en veilleuse.

La nuit est notre décor, et Skype, notre fenêtre sur deux mondes. L'image de ma mère, en tenue d'infirmière, s'anime sur l'écran, contrastant avec l'obscurité qui nous enveloppe et notre ambiance de fin de soirée.

Alors, tu es bien rentrée ? me pose-t-elle la question avec cette douce autorité qui lui est propre.

Presque arrivée, on est encore dans la caisse de Dario, je réponds, faisant pivoter la caméra pour montrer le paysage nocturne qui s'étire devant nous, long serpent d'asphalte.

L'envol de la triskèleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant