Chapitre 60 : La savoir en danger

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DIEGO

BELGIQUE, BRUXELLES

AVRIL

Piera dévalise le tiroir avec une ardeur frénétique, en chasse d'une tenue de pole dance qui claque. Elle me fait mariner pendant une demi-heure, sirotant son café comme si c'était du nectar et savourant son petit-déjeuner avec la sérénité d'un moine en méditation à la table de la cuisine. Lorsque je débarque comme une tornade, l'ambiance se charge d'électricité.

Tu joues à la marelle avec ma patience ? Juste pour que les choses soient limpides, comme je te l'ai indiqué hier, tu es en service, et tu ne peux pas te la couler douce devant ton petit-déjeuner en te pointant quand ça te chante juste parce que tu l'estimes opportun.

Ok, je boucle, désolée, dit-elle, pas l'air du tout désolée, justement. Je suis encore dans les vapes après l'entraînement d'hier, alors tu vois le tableau ? Je ne suis pas encore synchro à ce tempo de dingue.

Il va falloir te mettre au diapason avec le rythme parce qu'on n'est pas là pour tricoter. Tu n'as que quinze jours et on court déjà après le temps, si tu veux savoir.

Ok, ok, dit-elle en se redressant et en fourrant son sandwich au beurre dans sa bouche, se hâtant de mâcher. Si je ne pousse pas le bouchon trop loin, je prendrai bien encore cinq minutes pour avaler un deuxième... En deux temps, trois mouvements, promis, et après, je m'y mets jusqu'à ce que mes jambes flanchent ! dit-elle en suppliant avec les mains jointes.

Mila, debout et immédiatement !

Oh, pour l'amour du ciel, d'accord, dit-elle en soupirant comme un dragon et en posant sa tasse vide dans l'évier.

Piera se donne à fond, transpirant l'acharnement tout au long de la matinée. Pas une plainte, même quand l'exercice mord dans ses muscles. Elle tourne autour de la barre comme si elle était en rendez-vous galant avec elle, flirtant avec la gravité. Ses pauses sont juste le temps de s'éponger le front et de s'abreuver, rien de plus.

Dans un dernier assaut, tête en bas et jambes en l'air, je remarque qu'elle semble sonnée, comme si des étoiles dansaient devant ses yeux. Elle glisse lentement de la barre, s'assied, et ferme les yeux. Un instant de calme, le monde s'apaise dans une méditation.

Quand je concentre enfin mon regard sur elle, Piera est déjà debout, venant s'affaler sur le canapé pour méditer une pause.

Je prends un break. Juste un petit coup de mou.

Ok, je vous accorde cinq minutes, lui concède Anaïs. Vous vous débrouillez comme une pro, Mila, chapeau.

Super, ricane-t-elle. Ça va faire plaisir à l'inspecteur principal Petit, hein ? raille-t-elle avec un clin d'œil complice dans ma direction. La prochaine fois, je monte en grade : string, talons aiguilles et accessoires de diva, avec un bonnet de soutien-gorge à pompon, ça te va ?

Pour ça, il faudra encore un peu de sueur, répond Anaïs avec un sourire qui se veut partenaire. On creuse déjà les techniques d'inversion pour des abdos d'acier, mais le chemin est encore long. Après avoir terminé tous les mouvements, il faudra travailler endurance, force, fluidité, élégance, sécurité, chute... et la confiance sur scène. On avance bien, pas vrai, Diego ?

L'envol de la triskèleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant