Chapitre 5: le bal

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    Quelque chose lui piquait la nuque. Les muscles crispés, Edouard tira péniblement sur son col, tentant désespérément d'en extraire l'outil de torture qui lui meurtrissait atrocement la peau. Il poussa un grognement exaspéré après une énième tentative ratée. Un costume neuf... Si en plus d'être extraordinairement mal-à l'aise dans cette pièce de tissu bien trop luxueuse à son goût, il devait y perdre des plumes, rien n'allait plus aller ! Alors qu'enfin il était parvenu à attraper le petit bout de fer, un raclement de gorge le fit sursauter, faisant tomber l'aiguille par terre en lui griffant le doigt. Le jeune homme se retourna aussitôt, portant sa main meurtrie à ses lèvres.

    Son père lui faisait face, son air sévère gravé sur son visage. Il dévisagea son fils sans rien dire puis il posa une main sur son épée d'un geste autoritaire.

-    Je peux savoir ce que tu fabrique à gesticuler comme un demeuré au plein milieu de la salle de bal ? articula-t-il lentement en insistant sur chaque syllabe.

Le prince baissa la tête, honteux. Que faisait-il ? Il ne savait guère...

Pourtant, la salle était encore vide d'invités. Seuls les musicien de l'orchestre étaient présent, accordant leurs instruments, rejouant quelques morceaux. Il y avait aussi quelques serviteurs qui traversaient la pièce à toute vitesse, perfectionnant la décoration de la table et portant quelques plats luxueux sur le buffet.

Les mains croisées dans le dos, Edouard ne bougeait plus. Son père lui avait ordonné d'attendre ici. En tant que prince il se devait d'accueillir les premiers invités, lui avait-il expliqué. Enfin, le jeune homme n'était pas si stupide, il s'avait parfaitement que le roi avait surtout eut peur que son empoté de fils manque à l'appel quand il aurait eu besoin de lui pour parader devant sa cour.

Levant les yeux au ciel, le monarque poussa un long soupir agacé puis tourna les talons pour se diriger vers le trône.

-    Tu me désespère... souffla-t-il assez fort pour que son fils l'entende.

Les poings et les dents serrés, le prince garda la tête baissée. Muet, comme à son habitude. Que pouvait-il dire de toute façon ? Il entendit le pas trainant de son père gravir les quelques marches de marbre, puis un son sourd lui fit comprendre que le royal postérieur du souverain avait enfin retrouvé son siège.

Les notes des musiciens raisonnaient contre les vastes murs de pierre, emplissant dans chant austère la grande salle vide. Dehors, il faisait nuit. Un ciel sombre et parsemé d'étoiles scintillantes recouvrait la voute céleste. Une lune imposante et ronde rayonnait dans les cieux, sa lumière venant réchauffer le cœur du garçon à travers les grandes fenêtre du château. C'était si calme, si beau. Edouard aurait tout donner pour fuir l'humeur massacrante de son père et rejoindre le calme et la douceur de cette nuit de Mai.

Mais un claquement de porte le tira de sa rêverie. Bon sang, il faudrait sérieusement apprendre à ouvrir délicatement les portes dans ce fichu palais !

-    Harry ! s'exclama soudainement le roi en se relevant.

Le visage du prince se décomposa. Harry ? Non... Ce n'était pas possible !... Il releva la tête pour apercevoir son père tomber dans les bras d'un jeune homme blond au visage rieur. Le roi donna une longue et chaleureuse accolade au nouveau venu, qui lui adressait en retour un sourire radieux.

-    Harry ! Mon neveu ! s'exclama le monarque, c'est un plaisir de te voir parmi nous ce soir !

Le grand blond éclata d'un rire joyeux, enlaçant le vieil homme de ses bras musclés.

-    Mon oncle, j'ai sauté sur mon cheval dès que j'ai reçu votre invitation ! Il me tardait tant de vous revoir !

Edouard grinça des dents devant ce spectacle. Cette effusion de compliments et d'embrassades le dégoutait. C'était... faux et tellement pathétique. Une boucle brune retomba devant ses yeux. Il souffla rageusement dessus. Non, décidément, il haïssait son cousin. Il ne l'avais jamais aimé. Ses grands yeux perçant, son sourire hypocrite, son rire insupportable... Tout en ce sombre personnage le répugnait. Il n'avait jamais été sincère. Mensonge et hypocrisie était sans aucun doutes ce qui le définissait le mieux. Et pourtant...  Pourtant, il avait toujours été le favori, le chouchou... Son père préférait cent fois son neveux prétentieux à son propre fils. Peut-être se reconnaissait-il sous ces airs de faux semblants et de paraitre... Le prince n'en savait rien. Comme toujours, il se contentait de regarder sans oser ouvrir la bouche. Ses poings serrés tremblaient contre ses hanches.

Un prince presque charmantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant