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Devant le rayon des nouilles instantanées, agacé par la quantité de choix et les multiples saveurs, je restai bloqué.

C'était un calvaire, comme à chaque fois que je rentrais des cours et que je passais à la supérette.

Mon monde était simple mais quand une multitude de choix s'offraient à moi, mon cerveau surchauffait.

Au début de l'année, j'avais instauré un ordre précis : acheter chaque soir un nouveau bol de nouilles pour essayer toutes les sortes en commençant par le haut à gauche, puis ensuite étalage par étalage. Sauf que le vendeur avait changé et il avait complètement déréglé le placement des produits, embrouillant mon organisation.

Maintenant je n'étais plus sûr d'avoir essayé ou non la version épicée des ramens japonaises XXL.

Merde.

— Hey !

Je tournai la tête vers la personne qui interrompit soudainement toutes mes pensées et j'eus un mouvement de recul. Le voisin d'en face était là.

Tout sourire, habillé en jogging, il avait l'air d'avoir transpiré, son visage était encore un peu rouge et il paraissait exténué.

Normal on était mardi soir. Je me giflai mentalement de me rappeler de ce détail. Une semaine que je n'avais plus fait attention à lui et pourtant sa présence me ramenait sans cesse à ce détail de mon existence que j'avais à présent envie d'oublier.

— Hey, répondis-je mollement.

— Si t'en cherches des bons, je te conseille les nouveaux avec la saveur kimchi, je les ai essayés hier soir...

Je regardai le pot qu'il me montra et voulant à tout prix ne pas avoir à l'aborder plus que nécessaire j'acquiesçai, le remerciant du bout des lèvres et me dirigeai d'un pas rapide vers la caisse.

Une fois dehors, avec mon sac en plastique à la main, je partis d'un pas décidé rejoindre mon appartement mais j'entendis rapidement quelqu'un accourir derrière moi :

— Hey !

En fermant les yeux et en essayant d'avoir l'air aimable, je me retournai à demi :

— Tu dînes seul ? On peut dîner ensemble ce serait plus cool, non ?

Mon expression dut lui donner un indice sur le fond de ma pensée parce qu'il enchaîna :

— Enfin à moins que tu aies un truc de prévu...

— Révisions.

— Ah...

Il eut l'air presque déçu et je fis volte-face. Ma mission était de mettre le plus de distance possible entre le voisin d'en face et moi. J'avais beau avoir pris de nouvelles résolutions, sa présence me gênait toujours autant.

Il avait fallu que j'évite le voisin avec plus de stratégie qu'avant, facile puisque je connaissais son emploi du temps, mais quand il était avec le type à la peau pâle il avait la fâcheuse tendance à ne pas suivre ses habitudes et j'étais parfois surpris.

Comme cette fois ridicule, la semaine dernière, où j'avais dû poireauter mille ans dans le hall de mon immeuble avant d'attendre qu'ils aient fini leurs achats pour aller au supermarché. Je me trouvais stupide sauf que je savais que je le faisais pour de bonnes raisons.

Les miennes.

À savoir, continuer ma vie comme si cet épisode de voyeurisme n'avait jamais eu lieu.

Pour cela : ne pas côtoyer le voisin de près ou de loin.

Mais il fallait que je sois honnête.

Le VoyeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant