66-

53.4K 2.7K 9.8K
                                    

Une sonnerie parvint à se frayer un chemin à travers les brumes du sommeil et me fit ouvrir les yeux.

Allongé sur le dos, mes pupilles contemplèrent le plafond quelques instants avant de se refermer. Mais mes oreilles maltraitées par la sonnerie me poussèrent à les rouvrir, une fois, puis deux avant que, dans un effort ultime, je ne parvienne à sortir le bras de la couette pour appuyer sur le radio réveil.

5h56.

Mon bras retourna se réfugier sous la couverture chaude et je restai ainsi, allongé à observer le plafond, les yeux collants, gonflés et le corps terriblement lourd.

J'avais l'impression de n'avoir fermé l'œil qu'une seconde et les événements me revinrent en mémoire, me faisant fermer mes paupières non pas de fatigue, mais bien de douleur.

Je sentais la douceur des draps, la chaleur et le confort du lit, et je ne parvenais pas à me résoudre à me lever. Ma tête pivota un peu vers le corps de Jungkook qui dormait toujours aussi profondément. Il était en travers du lit, complètement désorganisé avec un pied et un bras en dehors. Je me collai à son dos courbé pour profiter encore plus de la chaleur.

Puis, ce misérable et terrible radio-réveil sonna à nouveau et je n'eus pas d'autre choix que de me tirer du lit. Debout, je grimaçai comme courbaturé, mes reins me lançant terriblement et dans la pénombre j'avançai à tâtons en attrapant des vêtements. Ce fut la lumière artificielle de la salle de bain qui m'agressa, m'arrachant une grimace visant à protéger mes yeux, et mon expression s'affaissa en contemplant mon corps nu.

J'avais des bleus. Ce n'était pas non plus des hématomes, encore moins des marques immenses mais des petites traces qui avaient tâché ma peau par endroits.

Sous la douche brûlante, je les contemplai avec regret et inquiétude. Jungkook en avait-il aussi ? Après tout, je me souvenais l'avoir agrippé vraiment fort...

Les souvenirs, dans mon esprit, se trouvaient dans un capharnaüm de pensées. Comme si mes émotions dérégulées avaient brouillé les images.

La douche me fit du bien mais temporairement, une fois sorti, frissonnant à l'air libre, puis habillé, en train de me préparer un chocolat chaud, mes pensées revinrent.

Je me sentais épuisé, dépossédé et une envie de ne pas me rendre à l'hôpital pour travailler me prit brutalement. C'était la première fois que je désirais autant ne pas y aller.

Pourtant, malgré un faible petit déjeuner avalé, je m'engouffrai dans le bus à l'heure prévue et j'arrivai sur l'hôpital général de Séoul à 7h.

Je me frottai les yeux en enfilant ma blouse et je me les refrottai aussi en arrivant dans le service. Je ne parvenais pas à me réveiller, pas à me concentrer.

Lors de la réunion de 8h, en équipe, mes oreilles peinaient à emmagasiner toutes les informations relatives aux patients.

Mais évidemment, dans ces conditions, la matinée se passa à une lenteur effroyable.

Vers treize heures, sans aucun appétit je me résolus à ne pas attendre Jin hyung qui s'occupait du patient de la chambre treize avec une infirmière du service et me dirigeai vers les ascenseurs avant d'enfoncer la touche - 3 avec assurance.

Je pris le chemin sans réellement regarder où j'allais, comme si le parcours était déjà établi dans ma tête, comme si mes muscles répétaient un enchaînement automatique. En passant les portes battantes, frappé d'abord par l'odeur bien particulière de l'endroit, le Dr Lee releva la tête de son ordinateur avant de me faire un grand signe de la main.

Il m'accueillit par :

— Le petit poucet a retrouvé le chemin du troisième sous-sol ? Je n'ai pourtant pas mis de cailloux jusqu'ici...

Le VoyeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant