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J'ouvris les yeux brusquement, presque surpris d'être parvenu à m'endormir dans cette position. L'espace d'un instant je me demandai ce qui avait bien pu me réveiller et le bruit d'un craquement me fit cligner des yeux. Je sortis de ma position inconfortable, grimaçant silencieusement en bougeant mon corps, m'essuyant la bouche, inquiet d'avoir bavé durant mon sommeil.

Bingo, j'avais bavé.

La grande classe, comme toujours...

Complètement ankylosé, je me frottai les yeux avant de me tourner vers cette suite de craquements intempestifs qui m'avaient réveillé.

À ma gauche, Jimin dévorait des Pringles.

C'était le bruit des pétales salés craquant sous ses dents qui m'avait sorti de ma sieste et encore embrouillé, je le vis se tourner vers moi, la bouche pleine et les lèvres pleines de sel, en me tendant le paquet à moitié vide :

— Chen veuch ?

— Non ça va...

Il avait acheté ça à la gare, j'avais voulu qu'il prenne goût paprika mais j'avais perdu au Pierre-Feuille-Ciseaux donc il avait pris Oignions et Emmental.

Je détestais ceux-là.

Et je ne voulais rien entendre, les Pringles au paprika étaient les meilleurs et c'était tout.

Je m'étirai, faisant craquer mon dos. Dehors, le paysage défilait à toute vitesse et la pluie qui fouettait les vitres de notre wagon rendait l'horizon flou.

Jimin et moi allions à Daegu.

La raison de ce voyage organisé à la dernière seconde était simple : Jeon Jungkook.

Tout me renvoyait à lui, tout.

Toujours.

Mais ce tout avait un goût différent depuis une semaine et demie. C'était le temps qui s'était écoulé depuis cette soirée et notre discussion.

Le lendemain, après avoir harcelé Jimin au téléphone, ne rencontrant qu'encore et encore son répondeur, j'avais déboulé comme un cinglé chez Yeri et Sehun en quête d'avis, de réconfort et de conseils. J'avais trouvé mon amie au bord du gouffre, souffrant de la terrible et démoniaque gueule de bois.

Je n'étais clairement pas arrivé au bon moment car ils venaient de se disputer et Sehun m'avait révélé qu'après notre départ de la boîte de nuit, Yeri avait fini par se réveiller dans une forme olympique et s'était mise à boire plus que de raison. Résultat des courses : elle en payait à présent les conséquences. C'était la première fois que je voyais Sehun lui faire la morale alors qu'elle acquiesçait comme une gamine prise en faute avant d'aller et venir en direction de la salle de bain, une main sur la bouche.

Sehun était contrarié mais il ne m'avait pas laissé repartir, me proposant de me caler dans le fauteuil et de me servir du thé en attendant que le médicament qu'il avait donné à sa petite amie fasse effet. Et dans ce grand fauteuil ultra coloré, un coussin entre les bras, seul dans ce salon, j'avais commencé à ruminer. Lorsque Sehun était revenu avec le thé, je m'étais empressé de m'excuser auprès de lui pour mon comportement de la veille.

Il ne m'en avait pas porté rigueur.

En fait, c'était un chic type. Je ne comprenais pas pourquoi je m'en méfiais autant.

J'étais tellement confus. Il avait dû le sentir car il s'était inquiété et Yeri avait fait son grand retour, le visage beaucoup moins blanc et elle avait laissé Sehun l'emmitoufler dans un plaid et la caler dans le canapé en face de moi.

Le VoyeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant