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Ça allait dans tous les sens, les pompiers étaient là et poussaient des brancards. On en manquait d'ailleurs, des brancards.

Les infirmières couraient, il y avait des bruits de partout. Des gens attendaient assis, blessés, endormis ou même morts. Les lustres crachaient leur lumière pâle, artificielle et grise, rendant l'endroit lugubre où seules les tenues du personnel d'un bleu reconnaissable ressortaient dans la pâleur de l'endroit. Des appareils bipaient, des gens geignaient, pleuraient, criaient...

Et puis il y avait moi.

Moi, au milieu de tout ça, ma blouse blanche de médecin stagiaire sur le dos.

Qu'est-ce que je foutais là ?

— Kim.

Je repris contact avec la réalité d'un coup, j'avais sûrement « bugué » à nouveau, comme le disait souvent Jungkook. Mon médecin référent m'appelait de l'autre côté de la pièce et j'arrivai rapidement vers lui.

— On a quoi ? demanda-t-il aux pompiers.

— Accident de moto.

— Kim, tu te charges de l'auscultation.

J'obtempérai, regardai l'homme qui portait un immobilisateur de tête et vérifiai ses signes vitaux.

J'étais sous pression, je sentais la panique dans tout mon corps et j'étais difficilement capable de garder mon calme.

— Kim ! m'interpella encore le médecin urgentiste pour me presser.

— Je... Le patient n'a pas perdu connaissance, les pupilles réagissent, tension artérielle à vingt et pouls à 120 irrégulier. Il faut l'envoyer faire une radio, à première vue je dirais le bassin de déplacé et des fractures multiples aux jambes.

— L'épaule ?

— Ah...

Comment j'avais pu passer à côté de ça ?

Je tâchai, en vain, de garder un professionnalisme bancal. Mon manque de confiance en moi était un gouffre qui avalait tout.

— On stoppe l'hémorragie et on l'envoie passer une radio, prévenez la chirurgie, ordonna l'urgentiste.

Deux heures plus tard, alors que le patient accidenté se faisait opérer, j'étais de retour dans la salle des urgences.

Mon médecin référent nous guida jusqu'à un brancard où un enfant pleurait à s'en déchirer les cordes vocales. Je m'avançai timidement et lorsque je fus suffisamment près je ne réussis pas à m'empêcher de la fixer avec horreur.

Elle était brûlée sur tout le corps.

— Kim.

Je m'employai alors à l'auscultation :

— Il faut enlever les vêtements et voir l'étendue des dégâts pour mesurer la gravité de la brûlure. Qu'est-ce qui s'est passé ?

Mes mains tremblaient mais il fallait que je reste calme même si je n'y arrivais pas.

— Accident domestique, répondit l'infirmière, la bouilloire se serait renversée sur la petite, qui se serait pris le pied dans le fil.

Le bébé pleurait, s'agitait, incapable de s'arrêter alors que je tentais de lui parler. Je fis reculer les infirmières et me mis à la hauteur de l'enfant.

— Tu as été très courageuse ma chérie, je suis là, pour t'aider. Ta maman attend dans l'autre pièce...

Il me fallut de longues minutes jusqu'à ce qu'elle se calme, mon référent en profita pour l'ausculter davantage et donner ses directives aux infirmières présentes autour. Une fois cela fait, il me demanda de le suivre jusqu'à la salle d'attente où la mère, jeune, deux enfants dans les bras, l'un étant un nourrisson et l'autre dans sa poussette, était au bord de la crise de nerf.

Le VoyeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant