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Je fixais mon reflet dans le miroir avec un sentiment d'étrangeté.

Je savais que c'était moi tout en me questionnant réellement s'il s'agissait bien de moi. Je ne savais pas trop ce qu'il m'arrivait ces derniers temps, mais je restais persuadé que j'avais un problème.

Chaque jour passant, mon reflet dans le miroir me paraissait être celui de quelqu'un d'autre. Comme si après toutes ces années je m'étais enfin arrêté pour me regarder, me regarder vraiment.

Avais-je toujours eu les yeux ainsi, en amande ? Avais-je toujours eu un nez si gros et mes lèvres avaient-elles toujours eu cette forme, charnues et bien marquées ? Pourquoi personne ne m'avait dit que j'avais un grain de beauté au-dessus de la narine ?

Mes cheveux étaient longs, raides et fins, noirs et commençaient à descendre sur ma nuque. Je me trouvais d'une banalité plaisante jusqu'alors, mais à présent je percevais mes expressions et mes émotions en reflet et ça me paraissait incohérent.

Je ne pouvais ressembler à ça.

Avais-je toujours été si grand, si maigre, si bronzé ?

En fait c'était tout mon corps qui me posait problème.

Avant, il n'avait aucune importance mais aujourd'hui il était présent, dérangeant, lourd, capricieux.

Il était là.

Je le sentais et je n'arrivais pas à comprendre.

Jusqu'à maintenant, jamais je ne m'étais surpris à m'agacer parce que mes cheveux faisaient des épis, parce que mon visage était gonflé, mes lèvres gercées...

Jusque-là.

À présent je ne voyais que ça, je me prenais tous mes défauts en pleine figure et je m'inquiétais.

Je m'inquiétais sans cesse depuis un mois. Je savais que j'avais un problème et encore, s'il n'y avait que mon apparence qui posait problème...

Le rideau s'ouvrant dans un son strident, sec et rapide, me fit sortir de mes pensées et je me tournai vers Jimin dans la cabine d'essayage. Je fronçai les sourcils alors qu'il sortit habillé d'une chemise kaki sur un slim noir.

— Tu en penses quoi ?

— Hein ?

Je clignai des yeux sans comprendre.

— De la chemise, Tae.

— Oh euh... c'est des couleurs que je n'ai pas l'habitude de te voir porter...

— Je sais, mais ça me va bien, non ?

— Oui, tout te va bien, tu sais.

Il me fit un grand sourire avant de se regarder sous toutes les coutures. Jimin était tellement beau maintenant que je m'en rendais compte. Son corps était plus petit que le mien, à quelques centimètres près, mais il y avait quelque chose dans sa façon de se mouvoir, de parler, ses expressions de visage qui dévoilaient tellement de charme.

Je me regardai à nouveau.

Moi, je n'avais pas ça, pas même l'essence de ça.

On ne se ressemblait pas du tout.

— Bon ok, je la prends.

Je raccrochai encore à la réalité, difficilement. Je continuais de m'observer dans le miroir quand il ressortit de la cabine d'essayage.

— Je vais aller payer, tu viens ou tu veux regarder quelque chose ?

— Non, je te suis.

Je traversai les rayons jusqu'à la caisse, et alors que Jimin attendait que le vendeur plie ses vêtements, sa carte bancaire sortie qu'il tapait légèrement sur le rebord, je lui demandai :

Le VoyeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant