Chapitre 11 (CORRIGÉ)

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Arrivée devant la porte du bureau, elle prit une grande respiration. Elle ne voulait pas paraître stressée, sinon elle n'aurait pas gain de cause. Elle savait d'expérience qu'il valait mieux avoir de l'aplomb pour obtenir ce que l'on désirait dans la vie. Manquer d'assurance et d'arguments entraînait le plus souvent l'échec.

Reece l'encouragea gentiment et, après avoir essuyé ses mains moites sur ses hanches, elle toqua. Elle entra sans attendre de réponse, de la même manière que la dernière fois. Sauf qu'à l'intérieur, elle n'eut aucune idée de comment se comporter : il n'y avait personne. Seul le clac de la porte qui s'était fermée lui donna l'illusion d'avoir de la compagnie l'espace d'une seconde. Monsieur arrogant aurait dû être là d'après les dires de ses congénères, mais son absence l'avait comme gelée sur place. Elle était perdue dans un lieu impersonnel et froid. Les murs étaient nus : ni photo ni tableau ne les ornaient, et le mobilier, bien que recherché et moderne, était sobre. C'était le genre d'endroit qui ne marquait pas l'esprit des gens, juste une salle parmi tant d'autres.

Finalement, ce fut sa curiosité qui la poussa à bouger. Elle s'avança à pas prudents vers le bureau, comme si elle s'attendait à ce que quelqu'un se soit caché derrière, et jeta un coup d'œil sur les papiers qui y traînaient. Seule une succession de noms alambiqués, de chiffres, de vocabulaire qui lui était complètement inconnu s'offrirent à elle, et d'autres choses sûrement extrêmement intéressantes pour certains, mais dont elle n'avait que faire.

Elle avisa ensuite la chaise en cuir à roulettes qui disparaissait presque derrière l'imposant amas de paperasses. Pour faire passer le temps elle s'assit dessus, s'amusant à tourner avec comme une enfant, puis elle la rapprocha du secrétaire et tenta d'agir comme l'aurait fait l'Aor yfir. Prenant soin de garder le dos bien droit, elle s'accouda sur le bord du plateau, se concentrant pour essayer de créer une ride au milieu de son front. Ses enfantillages la firent exploser de rire. Elle n'éprouvait aucune difficulté à imaginer les gestes de l'homme et son air sérieux, mais elle n'arrivait pas à se donner un air aussi supérieur que le sien. La combinaison des deux était impossible à reproduire, la jeune femme en était au point de se demander combien de temps le lion l'avait travaillée pour la réaliser avec une telle perfection.

Au bout de quelques minutes, elle se redressa en se rappelant que le maître des lieux ne devrait pas trop tarder. Elle partit en catimini s'installer sur un des fauteuils disposés dans l'angle de la pièce, à gauche du bureau. Le coin était assez cosy, une jolie table basse permettait de poser une tasse ou un journal si des invités désiraient un café. Astoria avait pris soin de tout réordonner avant de prendre place, pour que le blond ne puisse rien lui reprocher par la suite. L'attente durant, elle croisa les jambes, dans un sens puis dans l'autre, tentant de se mettre à l'aise. Cependant, elle sursauta presque en entendant des pas se rapprocher. Une petite goutte de sueur descendit le long de sa colonne vertébrale lorsqu'ils s'arrêtèrent devant la porte. Son appréhension revenait en force même si elle ne voulait pas le montrer. La poignée s'abaissa avec une lenteur qui parut insupportable à la jeune femme et le panneau en bois laissa passer un Aor yfir soucieux.

Il était un peu voûté, comme s'il portait le monde entier sur ses épaules, et son visage fermé annonçait très clairement que ce n'était pas le meilleur moment pour lui chercher des noises. Sur le seuil de la porte, il leva instantanément les yeux, sentant l'odeur de la nouvelle, et souleva un sourcil en la voyant tranquillement installée, à son aise, dans son étude. Le fait qu'elle soit ici plutôt que dans la cellule d'isolement le surprit. Il n'y avait pas vingt-quatre heures, elle était incapable de supporter le moindre stimulus extérieur. Il dut admettre qu'elle apprenait rapidement, et que cela le satisfaisait même s'il faisait tout pour ignorer ce sentiment. Ses lèvres, qui voulaient sourire, furent donc contraintes à rester stoïques, au prix d'un grand effort.

Le Sceau (tome 1 et 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant