Chapitre 23

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En sortant de la maison elle laissa tomber son masque d'impassibilité qu'elle s'était construit, comme si sortir lui permettait de s'ouvrir un peu. En réalité ce fichu Aor Yfir bipolaire l'avait atteinte, ses pulsions colériques avaient fait une petite place dans le cœur de Tori. Elle se déshabilla dès qu'elle posa un pied dans la forêt et se transforma pendant qu'elle courait.

Par sa fenêtre l'Aor Yfir l'aperçut et ne put s'empêcher de sourire, elle avait de bons nerfs, mais il semblerait qu'elle les relâchait enfin un peu. Elle avait réussi à le mettre hors de lui, il était à deux doigts de se transformer de colère. Lui aussi avait une envie pressante de se défouler, mais il ne voulait pas tomber sur elle. De plus, il était mort de fatigue, surtout qu'il devait faire le tour du périmètre le lendemain à six heures... enfin dans quelques heures, pour s'assurer que tout allait bien. Il décida donc d'aller dormir, sa colère étant un peu retombée.

Tori courut ce qui lui sembla être une éternité quand elle vit que les arbres allaient bientôt laisser place à une clairière. Elle ralentit l'allure pour s'arrêter avec les derniers troncs. Le spectacle qui se déroulait sous ses yeux était magique, deux biches, un faon et un cerf étaient en train de déguster tranquillement l'herbe tendre, sous les rayons pâles d'une lune en forme de croissant, des lucioles dansaient un balai aérien et des nuages venaient parfois distiller les rayons lumineux lunaires.

Elle s'allongea sans un bruit, posa sa tête sur ses grosses pattes et observa, émerveillée, la vie sauvage. Le vent étant en sa faveur, les animaux ne l'avaient pas sentie. Le temps paraissait s'être arrêté pour laisser place au rêve. Un papillon téméraire vint pourtant se poser sur son museau, la faisant éternuer et du coup fit fuir tous les animaux.

Elle attendit patiemment qu'ils reviennent, mais elle s'endormit avant de les revoir. Seul un tout petit lapin audacieux vint renifler ses paluches avant de se rouler en boule dans son cou, devant sûrement trouver son nouveau coussin chauffant confortable. Quelle dût être sa surprise quand une petite heure plus tard son oreiller devint une femme nue, les cheveux étalés derrière elle. Enfin ça ne semblait pas le déranger plus que ça, l'odeur et le côté mou du coussin n'ayant pas beaucoup changé. Il resta donc dans le nouveau cou pour finir sa nuit, profitant de la chaleur.

A cinq heures trente, l'Aor Yfir eut un mal fou à se réveiller, et ne put s'empêcher de pester contre une petite étrangère nouvelle dans sa meute qui lui en faisait voir de toutes les couleurs. Sa journée commençait vraiment en beauté ! Pas vraiment du matin, il enfila rapidement un pantalon et une chemise, qu'il ne prit pas la peine de boutonner, avant d'aller choper quelque chose à se mettre sous la dent, il mangerait quelque chose de plus consistant après sa ronde.

Les mesures de sécurité imposées à cause des Redhead étaient plus strictes, requérant sa présence à des heures pas possibles. Quand il entra dans la forêt il vit un tas de vêtements et fronça les sourcils. Pourquoi les vêtements seraient toujours là ? Il avait bien vu un tigre partir, mais Tori aurait dû récupérer ses vêtements en rentrant, ce qui voulait dire qu'elle n'était pas rentrée. Ou alors elle avait fait la plus grosse connerie du siècle et était rentrée sous sa forme animale. Mais elle aurait eu du mal à rentrer car ses clés étaient dans son tas de vêtements.

Il commença à stresser et tenta de repérer l'emplacement de la jeune femme. Évidemment, le fait que son cerveau soit hermétique rendait la tâche un peu plus compliquée, mais la localisation d'une personne était possible sans accéder à ses pensées, le lien de meute la donnait assez précisément. Il se dirigea vers l'endroit où il percevait le signal et vit celle qui cherchait dormir, nue comme ver, les jambes repliées sur le ventre, les bras près de la tête et un petit lapereau dans le creux de son épaule.

Le Sceau (tome 1 et 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant