- 13 -

7.3K 716 18
                                    

Presque un mois s'était écoulé depuis mon arrivée sur l'île et une routine bien huilée s'était installée ; en semaine, j'étudiais pendant qu'il travaillait, on mangeait ensemble la plupart du temps, je l'aidais en arrosant le potager ou en récoltant les légumes. Généralement, je gardais mes maths et mon allemand pour la fin d'après-midi, et Maximilian me proposait son aide, que j'acceptais toujours. Je ne saurais expliquer pourquoi, mais je trouvais que ce moment était important.

Le samedi, Maximilian m'emmenait à terre. Parfois en ville, parfois en forêt, selon l'envie ou le temps. J'aimais bien ce moment aussi – surtout parce que j'avais le droit de choisir ce que je voulais pour le déjeuner – généralement mon hôte ne mangeait pas grand-chose.

– Tu es déjà réveillé ? s'étonna-t-il en arrivant dans la cuisine.

J'avais répondu par un haussement d'épaules vague. En réalité, j'avais peu dormi, me retournant dans les draps à la recherche du sommeil... Je savais très bien pourquoi je restais éveillé comme cela : la Lune Pleine aurait lieu le lendemain.

Là, vous imaginez que c'est uniquement parce qu'elle agite tous les Lycanthropes, Vampires et autres Surnaturels impactés par l'astre lunaire. Mais me concernant ce n'était pas uniquement pour cela :

La dernière Lune Pleine, j'avais tué, et pas par accident. 

J'avais passé la nuit sans le moindre contrôle de moi-même ou souvenir précis, ce qui n'était pas normal – et très dangereux, en plus. J'avais blessé plusieurs Alphas de la Meute, avant de m'effondrer, vidé de toute énergie, en pleine forêt. Mais ça, je ne l'avais déduit qu'à mon retour, en constatant nombre de blessés – inhabituel chez nous – et les regards mêlant peur et méfiance qu'on posait sur moi.

Même si ici je me sentais plus en sécurité et que je ne pouvais blesser que Maximilian, j'étais loin d'être tranquille. Et si je blessais sérieusement mon hôte ? Qu'il réplique, qu'on se batte, que ça finisse mal ? Je ne voulais pas mourir sous les crocs et griffes d'un Lycan plus gros que moi !

– Il est prévu que le temps se gâte, déclara Maximilian en se servant un café, comme si la Lune Pleine n'était pas assez...

La tension qui m'animait atteint un nouveau cran. L'orage et la tempête m'effrayaient depuis tout petit – bon, j'avoue, ça me terrorisait – ce qui n'allait sans doute pas arranger mes histoires. Mes nerfs seraient mis à rudes épreuves dans les prochaines heures.

– Tu vas bien, Kaeden ? me demanda-t-il, une fois assis à table.

– O-Ouais, pourquoi ?

Il n'osait pas approfondir. J'étais sûr et certain qu'Edward ne lui avait rien dit sur la bête que je devenais une fois transformé. Je ne valais pas mieux qu'une bête sauvage assoiffée de sang – ce qui était réellement insultant pour un Lycan, censé maîtriser la bête qui est en lui.

Même s'il était plus puissant que moi, dominant, j'attaquerais. C'était ce qu'il s'était passé la dernière fois.

– Max, murmurai-je avec la gorge nouée, je dois te dire un truc... important.

Sa stupéfaction ne dura qu'une seconde et laissa place à une mine plus grave, cependant engageante. Croyait-il que j'allais lui parler de mon père ? En tout cas, c'était ce à quoi il devait s'attendre.

– En fait, je... Je ne suis pas... Enfin, je veux dire que je...

– Tu n'es pas stable, je sais, murmura-t-il. Je pense pouvoir gérer, ne t'inquiète pas.

Je n'avais pas caché ma surprise. Il avait l'air d'avoir l'habitude de ça. Moi, je ne voulais pas qu'il ait l'habitude.

– Tu sais ce que j'ai fait, la dernière fois ?

– Eddy m'a dit. C'est sans doute la première chose que j'ai sue sur toi... Je suis passé par une phase compliquée, moi aussi, tu sais.

– Ah ? Vraiment ?

D'un coup, ce fut comme si une lumière d'espoir éclairait la pièce noire dans laquelle mon esprit était plongé depuis un mois. Ça me soulageait grandement de ne pas être seul dans ce cas.

– Rien n'a jamais été facile pour moi, me confia-t-il avec le regard douloureux. Je sais que pour toi c'est différent, mais tu peux me faire confiance.

Je ne savais pas quoi répondre. Edward et les Alphas les plus puissants de la Meute n'avaient pas réussi à m'arrêter – ils n'avaient pu que m'empêcher d'attaquer le village humain et me fatiguer suffisamment pour que je tombe un peu avant le lever du soleil... Comment Maximilian pourrait-il faire mieux ? Ici, je ne pouvais pas courir à travers la forêt pour me fatiguer – j'avais le choix entre me battre avec lui ou dévaster le manoir.

– Ça va bien se passer, Kaeden, assura-t-il.

J'en doutais grandement. Sincèrement. Ce n'était pas un problème de confiance en lui ; c'était un problème de confiance en moi-même.

The Wicked Wolf - Kaeden (T1) [MxM]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant