Les Sentinelles 1 - La Sentinelle D'Argent

Chapitre 18 - Le traître

Il y avait un traître parmi nous.

Selon Robin et d'après les propos que lui avaient tenu sa tante Denise, toutes les Sentinelles de l'ancienne génération étaient ensembles durant la soirée jusqu'à ce qu'ils voient Colin s'enfuir, donc le traître était forcément un jeune.

Un frisson me parcourut l'échine avant que mon cerveau ne commence à réfléchir à toute allure pour découvrir lequel d'entre nous avait osé aider un assassin. Lequel avait délivré le meurtrier d'une Sentinelle. Lequel s'était, le temps d'une soirée, allié au bourreau de l'oncle de l'une d'entre nous.

- Il était environ quelle heure quand ils l'ont vu s'enfuir ? Murmurai-je à Robin.

L'étonnement traversa ses prunelles avant qu'il ne me réponde.

- Environ 23h, il me semble que c'est ce que m'a dit Denise...

23h... 23h ? Les pièces du puzzle s'assemblèrent d'un coup dans mon esprit. Le choc de cette découverte me laissa légèrement hébétée. Je connaissais l'identité du traître dans nos rangs et Robin sembla remarquer, à ma réaction, que j'avais une idée de cette identité.

- Tu sais qui c'est, demanda t-il ou plutôt affirma t-il.

- Tu ne te souviens pas qu'on ait fait quelque chose hier soir ?

- Ben si, on a tous joué au Monopoly, répondit-il sans comprendre ce que je cherchais justement à lui faire comprendre.

- Tous, vraiment ? Répliquai-je avec un sourire crispé au coin de la lèvre.

- Oui... Non ! Ajouta t-il après un temps d'arrêt et en ayant enfin compris. Oh non, ce n'est quand même pas elle !

La colère commença à tendre les muscles de ses épaules et il serrait et desserrait successivement ses poings. Il tourna son visage vers moi.

- Mais c'est la petite-fille du chef, comment Lydie peut-elle oser lui faire ça, nous faire ça ! Il faudrait prévenir les autres discrètement, ajouta-il après s'être légèrement calmé et tout en sortant son portable.

Tiens c'est lui le sociable du groupe ? Il déjà obtenu les numéros de tout le monde ?

Il envoya un message à toutes les jeunes Sentinelles - sauf Lydie bien évidemment - et à présent tous jetaient des coups d'œil suspicieux à la traîtresse qui avait ses écouteurs enfoncés dans les oreilles et continuait à mâcher un chewing-gum. Maintenant on connaissait l'identité du traître, mais pas sa motivation. Pourquoi avait-elle agit de la sorte ? D'accord elle n'avait pas l'air plus que ça intéressée par l'Organisation des Sentinelles, mais de là à libérer l'homme qui avait assassiné Teddy et ordonné l'agression de son grand-père après l'Initiation, il y avait une sacrée différence... L'ambiance durant le reste du trajet fut plus que lourde et presque insupportable et je pensai plus d'une fois à sauter par la fenêtre pour échapper à l'atmosphère étouffante de l'habitacle.

***

Nous arrivâmes à l'aéroport de San Francisco après 18h, après avoir passé une bonne partie de la journée dans les embouteillages. Milla nous invita à manger un morceau dans une cafétéria avant l'embarquement.

Tout se passait bien jusqu'au moment où, au beau milieu du repas, Lydie poussa soudainement sa chaise et se leva. Nous la fixâmes tous d'un regard froid - sauf Milla et Eric qui ne se doutaient de rien - et Zita demanda d'un ton plus brusque qu'elle ne l'aurait voulu :

- Où tu vas ?

Lydie la regarda en plissant les yeux, suspicieuse et irritée.

- Aux toilettes puisque tu veux tout savoir, répondit-elle sèchement à Zita.

Elle nous tourna le dos et se dirigea en effet d'un pas rapide vers les toilettes, où elle entra quelques secondes plus tard. Eric et Milla nous regardèrent, légèrement étonnés par notre attitude vis-à-vis de Lydie. Milla finit par poser la question qui leur brûlait les lèvres à tous les deux.

- Y a t-il un problème avec elle ?

Ah ! Il suffisait de demander !

Les explications sortirent de toutes nos bouches en même temps, créant un vacarme infernal dans la cafétéria. Quelques têtes intriguées se tournèrent vers notre table et Eric leva les mains devant lui pour nous faire taire.

- Chacun son tour !

Nous nous consultâmes tous du regard puis Zita commença à prendre la parole :

- Il ne faut pas nous en vouloir, on est encore jeune et hier soir nous n'avons pas respecté le couvre-feu. Je suis allée proposer un Monopoly aux filles.

- Anaïs et moi avons accepté, c'était à peu près cinq minutes après que tu sois passé, enchaîna Sheila à l'attention de Eric.

- Les filles sont donc venues toutes les trois dans notre chambre, sans Lydie. Et nous étions en train de jouer quand il y a eu des bruits de pas dans l'escalier, poursuivit Yoann.

- C'était une heure environ après le couvre feu sauf que d'après Denise c'est à ce moment-là que vous avez aperçu Colin s'enfuir, dis-je en prenant à mon tour la parole.

- De plus, quelqu'un parmi nous a aidé Colin et on est sûr que ce n'est pas l'ancienne génération puisque vous étiez ensemble. Et on vient de vous expliquer que nous étions tous les cinq dans la même chambre, acheva Robin.

- Lydie a aidé Colin, achevons nous tous les cinq d'une même voix grave.

Milla et Eric se consultèrent du regard, semblant réfléchir à la solidité de notre théorie, sauf qu'ils pouvaient chercher autant qu'ils voulaient, il n'y avait aucune faille dans notre réflexion. L'aide donnée à Colin était interne à notre Organisation et la seule à ne pas avoir d'alibi était Lydie. Milla et Eric semblaient encore douter de notre théorie et se livraient à une discussion silencieuse. La porte des toilettes s'ouvrit et Lydie apparut. Eric conclut avant qu'elle n'arrive à portée de sa voix.

- On doit toujours la surveiller, à aucun moment elle ne doit être seule et sous aucuns prétextes tant qu'il y aura un doute sur sa fidélité.

Nous hochâmes la tête et Lydie s'assit à sa place, sans se douter que son sort pour les prochains jours venait d'être scellé. Le repas s'acheva dans un silence de mort. L'ambiance était tellement froide que la joie qui régnait entre nous durant la partie de Monopoly me semblait dater d'il y a des semaines et non de la veille.

*******

N'hésitez pas à commenter et voter !