Heart's Mechanic - Saison 2

5 - LEONHARD

Je me change rapidement et je laisse mon uniforme sur place, avant de leur emboîter le pas jusqu'au terrain numéro 5 - je le connais bien, celui-là. Les quatre premier terrains sont réservés aux entraînements des cadets, et du cinq au sept, ils sont réservés aux amplifiés et conçus pour supporter les pires traitements. Ce sont des salles en intérieur, insonorisées, et équipées en adéquation avec les capacités des utilisateurs de la dite salle. Le colonel, la stagiaire et Ross montent directement dans la loge d'observation, quant à Eldridge, il reste en bas pour faire un rapide check up de ma carcasse, avant de me doter d'un bracelet d'analyse intelligente, qui va recueillir mes données cardiaques et cérébrales pour les renvoyer en temps réel à l'écran du médecin.

Moi... j'ai du mal à croire ce qui m'arrive. Ce n'est qu'un cauchemar, c'est pas possible... Eldridge me tapote discrètement l'épaule avant de me laisser pour rejoindre les autres dans la loge - ils croient vraiment tous agir pour mon bien en plus, c'est quand même assez dingue. Moi, je ne sais toujours pas à quelle sauce je vais être gobé - j'ai la tête dans le cul, l'estomac dans les talons et le cœur qui bat la chamade. Ça fait tellement longtemps que je n'ai pas été sur un terrain de ce genre... Qu'est-ce qu'ils vont me faire faire exactement ?... Je crois que je vais vomir.

- Bien, commence alors la voix d'Eldridge, portée par les hauts-parleurs. Ce test sera rapide, et ne vise à aucun jugement de valeur - nous savons que vous êtes inactif depuis deux ans maintenant, nous voulons juste savoir où en sont vos réflexes, et voir ce qui reste de votre entraînement. Les androïdes suivant vont vous attaquer simultanément, puis tenter des approches groupées - vous avez autorisation de les détruire de la manière qu'il vous plaira. Le test s'achèvera lorsque vous les aurez tous mis hors de combat. Commencez.

... C'est tout ?... Un peu perplexe, j'observe les robots qui ont été activés par une commande à distance, et qui s'approchent de moi pour m'encercler. Ce sont de vieux modèles, probablement des restes d'usines fournis à l'armée pour qu'on en fasse ce que bon nous semble. Au choix, de la chair à pâtée pour les entraînements des amplifiés. J'avoue, je ne connais pas ce modèle, qui est quand même plus élaboré que ceux que j'avais eu à mes entraînements, plus jeune. Les anciens n'étaient que des squelettes de métal et de câbles faciles à désactiver - ceux là sont plus humanoïdes, et sont même recouverts de latex blanc pour donner plus de réalisme à l'illusion.

Même si « réalisme » est un peu fort pour désigner ces pantins sans visage. Il sont lents et désarticulés – ils me feraient presque de la peine. Soudain, l'un d'entre eux passe à l'action - putain, il est rapide. Ils doivent être programmés pour suivre à la lettre des formations de combat classiques, et des bases de self-defense... l'androïde m'arrive dessus comme un boulet de canon, mais je l'arrête net d'un bon cou du tranchant de la main dans le cou, entre la mâchoire et la clavicule. Le coup est puissant et maîtrisé – j'ai correctement calculé l'angle d'attaque lorsqu'il est rentré dans ma zone d'allonge, et la puissance du coup couplée à la précision de la zone de touche sont telles que la tête se détache du corps et vole en rebondissant sur le sol de béton ciré.

Et soudain, je n'ai plus le temps de réfléchir une seule seconde. J'ai approximativement compté une cinquantaine de silhouettes autour de moi - comme annoncé par le Dr Eldridge, ils attaquent d'abord un par un, puis par deux, par trois, par six. Avant même mon accident, je prenais des cours de combat et de défense - j'étais né pour être soldat... et mes amplifications n'ont rien changé à ça. Je mets les premiers au tapis en un seul coup – pour être bien certain qu'ils ne se relèveront pas, je leur arrache la tête, ou je leur disloque la colonne d'un bon coup de pied. Mes mouvements sont précis, nets, rapides et maîtrisés - le combat au corps à corps, c'est des années de répétition, de pratique. C'est gravé dans la chair, ça ne s'oublie pas.

Par contre, je ressens rapidement le contrecoup de mon petit cocktail de la veille. Je m'essouffle, j'ai des nausées mais les attaques redoublent - putain il en reste encore combien ?... J'encaisse un premier coup, en plein dans la poitrine, mais mon blindage me protège, et j'en profite pour faucher les androïdes les plus proches. Je distribue des coups de pieds dans les têtes comme autant de ballons de football. Un autre coup m'atteint à la nuque, mais mon exosquelette protège mon système nerveux - c'est douloureux, mais ça ne m'assomme pas tout net comme ça aurait dû le faire, et je démonte la saleté de machine qui m'a attaquée par derrière.

Il en reste une dizaine, et je suis à bout de souffle - ils attaquent tous ensemble, et je me retrouve submergé, obligé de choisir entre les coups que je peux encaisser, et ceux que je dois à tout prix éviter. Les androïdes ne doivent pas être programmés pour reconnaître les greffes, parce que l'un d'entre eux fait la connerie de tenter une clef de bras - sauf que je suis plus fort, et que ça ne me fait absolument pas mal. Par contre, j'évite un coup de genou en plein visage, qui m'aurait sans aucun doute pété le nez, mais je suis obligé d'encaisser un bon crochet, et c'est ma lèvre qui prend tout. Je sens le sang ruisseler immédiatement sur mon menton, mais je ne l'essuie même pas - c'est presque terminé. Il en reste trois, qui tentent une dernière attaque groupée - je prends un coude dans le nez, mais j'en démonte deux d'un coup, et lorsque le dernier tente finalement de m'immobiliser au sol, j'inverse nos position d'un geste vif, et je l'achève proprement.

A bout de souffle, je reste quelques secondes à quatre pattes, incapable de me redresser dans l'immédiat - j'ai la tête qui tourne, j'ai pris quelques mauvais coups, mais la mer de cadavres d'androïdes dans laquelle je baigne prouve bien que je suis loin d'être bon à remiser malgré tout. Maintenant j'essaye juste de ne pas vomir, ou tomber dans les pommes, ou les deux en même temps.