Heart's Mechanic - Saison 2

72 - LEONHARD

- Vous devenez mesquine, miss Barns... ça ne vous va pas du tout.

Je parie qu'elle me déteste, mais c'est pas vraiment un scoop, en fait. Et bon sang qu'elle est mauvaise, une vraie teigne. Je me contente de hausser un sourcil en guise de réponse, toujours sans bouger, détourner les yeux ou cligner des paupières - je pourrais rester comme ça indéfiniment, en plus le siège est assez confortable pour que j'oublie un peu le douloureux tiraillement de mes côtes en cours de guérison. Mais une pauvre créature à huit pattes nous interrompt, et finalement, on ne saura jamais vraiment qui aurait pu gagner. Il me faut une bonne poignée de secondes pour comprendre que la jeune femme ne simule pas - ah mais en fait... elle a vraiment peur d'une si petite bestiole ??...

J'avoue, j'ai pris mon temps pour capturer le monstre, mais je pensais pas qu'elle était sérieuse !! Je ne réponds pas à ses provocations, mais sa dernière réflexion change immédiatement l'atmosphère. C'est con... mais je prends très mal le fait qu'elle me demande de la tuer. La bestiole n'a rien demandé à personne, elle cherchait juste sans doute un coin pour se faire une toile au chaud. C'est juste par un mauvais hasard qu'elle s'est retrouvée à se balancer juste devant le nez de l'étudiante... je ne vois pas en quoi ça mérite la mort. Quand on voit ce que moi j'ai fait, ça en dit long sur les capacités de jugement de la jeune femme. Peut-être que c'est moi qu'on devrait tuer, pour avoir sur les mains le sang tant d'innocents. Et pas cette pauvre bestiole qui cherche juste un endroit pour passer l'hiver.

Dégoûté, je me détourne de l'étudiante, et je quitte le bureau en claquant la porte derrière moi. Je porte avec précaution mon petit chargement à travers les couloirs - vu la taille de mes mains, je pourrais échapper le pot, et j'ai pas envie de libérer la pauvre bête dans un couloir, au risque qu'elle finisse sous la semelle de la prochaine hystérique que je croiserais. Je finis dehors sur la base, et je pose un genou à terre pour déposer doucement le pot incliné vers le sol. La pauvre petite bête s'empresse de filer sur ses huit pattes, et j'ai pris soin de la déposer pas loin des hangars - elle pourra aller se planquer là-bas, à l'abri, là où personne ne la verra et n'aura peur d'elle.

Un peu comme moi.

Je regrette de ne pas avoir emporté mes clopes avec moi - j'aurais bien profité d'être dehors pour m'en griller une. Mais bon, puisque je n'ai pas le choix, je retourne vers le bureau d'Eldridge, l'humeur considérablement assombrie par cet incident. Quand je reviens, je n'accorde même pas un regard à la jeune femme - mais je retire mon pull, et je passe dans le labo pour aller me laisser tomber sur le fauteuil d'opération, posant mes bras amplifiés sur les bras du fauteuil pour permettre le changement de mes maudites plaques. Finissons-en, que moi aussi je retourne me cacher dans mon antre.