Heart's Mechanic - Saison 2

59 - LEONHARD

C'est non sans surprise que je prends par réflexe le gobelet en plastique que me tend la jeune étudiante - avec mes grosses paluches en fer, tenir le gobelet en plastique c'est un peu coton, mais le liquide fumant me fait envie, alors j'en prends une gorgée. Ça n'a aucun goût, mais au moins c'est chaud. J'acquiesce vaguement à la remarque de l'étudiante - le thé ne fait rien pour améliorer mon état, et je reprends le chemin de l'accueil, oubliant même de la remercier.

Mâchoire serrée, visage crispé, c'est avec soulagement que j'arrive à l'accueil pour recevoir le numéro de la chambre qui m'a été attribuée - j'en peux plus, il me faut quelque chose pour la douleur, j'arrive à bout de ma résistance. Le sang qui se remet à circuler dans mon visage ravive la cuisante douleur de mon arcade et de ma pommette, ce qui ne fait qu'assombrir un peu plus mon humeur, mais à côté de moi, miss Barns rayonne comme un soleil, clairement trop heureuse d'être au chaud et d'avoir enfin accompli sa mission, à savoir me conduire jusqu'à ma chambre. Comme si j'avais besoin d'elle pour me surveiller ! La femme mature et potelée derrière le comptoir relève les yeux sur non en nous entendant arriver... et se lève pour mieux commencer à me brailler après.

- Commandant Steinberg !! s'exclame t-elle d'une voix fluette. Le docteur Eldridge nous a signalé qu'il vous renvoyait dans notre service il y a plus d'une demie heure !! Nous étions mortes d'inquiétude !! Vous auriez pu prévenir que vous faisiez un détour !! Venez ici, vous êtes dans la chambre au fond du couloir, défense de prendre la poudre d'escampette !! assène t-elle en me jaugeant sévèrement du regard.

Elles se sont passées le mot, c'est pas vrai... Docile, je lui emboîte le pas sans dire un mot - j'ai l'impression que si j'ouvre la bouche, je vais vomir. Je voudrais bien demander des médocs, mais je n'ai pas envie de réclamer devant Barns, alors j'espère que l'infirmière pensera à m'en apporter au plus vite.

- Voilà, tout est prêt, allongez-vous et restez un peu tranquille, c'est bon pour ce que vous avez ! lâche t-elle en m'ouvrant la porte, m'observant d'un œil critique alors que je rentre et que je me pose précautionneusement sur le lit. Eldridge nous a transmis une ordonnance, je vais chercher ce qu'il vous faut. Si vous êtes reparti quand je reviens, je fais prévenir Ross !! menace t-elle avant de me laisser.

Moi, je me contente de rester assis au bord du lit, dont les draps blancs me sortent par les yeux - j'ai tellement mal que j'en suis à un stade où je n'ose même plus bouger.

- Merci... pour tout miss Barns, articulais-je d'une voix la plus normale possible, le visage impassible. Je pense que vous pouvez retourner auprès d'Eldridge, maintenant.