47 - LEONHARD

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Eh eh j'ai semé l'étudiante. J'avoue, intérieurement, je ricane bêtement, même si extérieurement je m'abstiens, j'ai pas envie de mourir étouffé à cause de mes côtes. Mon visage pulse également d'une douleur sourde, plus diffuse, mais pas moins désagréable - j'ai même pas vu l'état de ma gueule... au moins j'ai de la chance, il ne m'a pas pété le nez. Durant toutes mes années de service, je ne l'ai cassé que deux fois au total, et chaque fois les médecins me l'avaient si bien redressé en retour de mission qu'il était resté quasi parfaitement droit, quoiqu'un peu décalé. Mais c'était un détail auquel il fallait particulièrement prêter attention pour le remarquer... et bien souvent, mes yeux au regard si peu naturel se chargent de détourner l'attention de mes interlocuteurs.

A vrai dire, assez rares sont les personnes capables de soutenir mon regard sans papillonner un peu. Il faut dire que les capteurs, jaune uni, ne reflètent pas la lumière comme la surface luisante d'un œil biologique... je peux comprendre que ça soit perturbant. Et puis, cette teinte jaune d'or est tout sauf naturelle... sans parler de la sclère noire. Enfin bref. Moi depuis le temps, je suis habitué maintenant... mais je peux comprendre que ça soit un peu gênant à regarder. Sauf pour une poignée de quelques rares exceptions... qui curieusement incluent l'étudiante qui vient juste de me rattraper. Je lâche un nouveau grognement en guise de réponse - super, la voilà devenue mon infirmière attitrée... manquait plus que ça. Je m'attendais à ce qu'elle me casse les couilles, comme à son habitude, à me dire de ne pas fumer, de ne pas sortir, de ne pas faire ci, de ne pas faire ça, bla bla bla... Mais à ma grande surprise... elle me sort qu'elle va m'accompagner. Et fumer aussi. Je baisse sur elle un regard mi-surpris, mi-circonspect - hein ??...

- Je rêve, marmonnais-je plus pour elle que pour moi.

Mais je n'épilogue pas. Après tout, je serais plutôt mal placé pour lui faire la leçon sur ces sujets là. Enfin arrivé aux vestiaires, je fouille les poches de mon manteau pour récupérer mon briquet et mes cigarettes, et je prends ensuite la direction de la sortie la plus proche, en avançant à un rythme désespérant. Je me tiens droit, et je fais mine de rien, mais je déguste quand même bien ma race, et je ne peux retenir un léger soupir de soulagement lorsqu'on arrive enfin dehors, même si comme prévu, il fait effectivement très froid. Je me cale contre le mur, juste à côté de la porte... et je tends mon briquet à miss Barns. Pour actionner la pierre à briquet, d'une façon ou d'une autre, ça implique un mouvement sec de ma part, et là de suite ce serait clairement pas une bonne idée.

Heart's Mechanic - Saison 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant