Princesse cachée

Chapitre 87

Alexy et moi sortîmes de la chambre et descendîmes à la grande salle pour manger. Mes amis étaient déjà installés et Edgar attendit mon arrivée pour faire signe qu'on nous apporte à manger. La cuisine du manoir m'avait manquée. Tout ce que j'avais mangé ici avait toujours était délicieux et équilibré. Je me sentis légèrement mélancolique lors de la première bouchée. Cette dernière me rappela la première fois que j'avais mangé au manoir. Cela avait eu lieu quelques jours après mon départ du château. J'avais refusé de manger pendant quelques temps mais avait fini par me résigner. Tout comme à l'époque le goût de la nourriture était à la fois magnifique et horrible. Horrible car ce fut ce jour où je m'étais rendue compte qu'à présent j'étais seule. Une réalisation des plus difficiles surtout quand nous ne sommes même pas adolescents. Quoi que ce sentiment doit être horrible à n'importe quel âge.

Je n'avais pas grand appétit alors je levais la tête de mon assiette et balayais les visages de mes amis du regard. Je souris et mon cœur se serra. Ce repas était différent. Je n'étais plus seule à présent. Quand j'y repensais je n'avais jamais vraiment été seule. J'avais toujours eu Edgar. Cependant cette fois ci j'avais des amis autour de moi. Je me remis à manger heureuse. À chaque bouchée je me concentrais sur le positif et oubliais pour quelques instants tout ce qui avait terni ces dernières semaines.

Le repas se déroula en silence. Personne n'osa le briser. Edgar s'était posté dans un coin de la pièce et détaillait Alexy d'un regard qu'il voulait neutre mais je sentais bien qu'il n'était pas totalement amical. Noah quant à lui ne leva pas le regard de son assiette ne serait-ce qu'une seconde. Mon cœur se serra en le voyant ainsi. Voir mon meilleur ami devenu si pâle me poussa à me coucher tôt pour affronter mes parents le lendemain dès la première heure. La chambre d'Alexy était très loin de la mienne ce qui me fit bizarre.

Cela faisait deux heures que j'essayais de trouver le sommeil. Je finis par me lever et décidais de marcher un peu dans le manoir. Les couloirs étaient sombres et silencieux. Je me souvenais qu'ils m'avaient terrifiée étant petite. Or à présent je les trouvais simplement reposants.

Sans que je m'en rende compte mes pas me guidèrent vers la salle du piano. Je glissais mes doigts sur ce dernier hésitante avant de m'asseoir et de commencer à jouer. La mélodie envahit la pièce et la réchauffa en un instant. C'était comme si les murs avaient pris vie. Les rideaux prirent feu et se mirent à flotter au rythme de la musique. Quant à moi je fermais les yeux et me laissais porter à mon tour.

Soudain j'entendis des notes s'ajouter aux miennes. Je souris et continuais à jouer de plus en plus vite. Les notes se relayaient et se battaient presque pour faire taire l'autre. Je n'aurais jamais cru qu'une dispute pourrait être si belle. Nous finîmes par jouer les dernières notes et j'ouvrais les yeux lentement. Edgar s'était assis à mes côtés et me sourit avec douceur.

« Votre père, monsieur le roi, ne sera pas ravi de voir que je n'ai pas quitté le château, votre altesse.
-J'ai grandi dans ce château avec vous alors j'estime avoir le droit de vous garder près de moi. Si vous n'êtes pas contre évidemment.
-Je ne voudrais pas être la cause d'une dispute entre votre père et vous-même.
-Ne vous en faites pas pour cela. Nous aurons toujours matière à nous disputer.
-Êtes-vous sûre, votre altesse ?
-Plus que certaine.»

Edgar hocha la tête et se leva mais s'arrêta.

« En ce qui concerne vos amis... »

Je ne pus m'empêcher de stresser. J'appréhendais ce qu'Edgar allait dire. Son avis était très important pour moi et j'avais besoin qu'il accepte mes amis. Je n'avais pas la force de les défendre.

« Serais-je indiscret si je vous demandais à quel point vous êtes proche de chacun d'entre eux ?»

Je rougis.