Chapitre 15

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-"Pourquoi Amalia?" me demanda aussitôt Connors, le souffle lourd.

-"J'aime ce prénom," lui avouais-je, ne voulant point m'attarder sur le sujet sachant pertinemment que l'orage allait bientôt éclater.

Dans ses beaux yeux bleus, la colère y avait élue domicile. Son regard pesant et scrutateur me fixa sans qu'aucune parole franchit le barrage de ses lèvres. Inutile de dire davantage pour savoir le fond de ses pensées.

-"Cinq ans..." murmura-t-il, sous le choc.

-"Connors,"

Ses paroles devinrent que des murmures indicibles. Mes yeux s'étaient délibérément fermés endiguant ses paroles blessées et son regard fermé où toute tendresse avait disparu.

-"Pourquoi?" me demanda-t-il finalement alors que je demeurais muette.

Mes yeux s'ouvrirent à l'entente de son timbre dure mêlée d'une note attristée.

-"Tu auras tes réponses plus tard. La santé de ma fille est ma priorité."

Poings serrés, Connors souffla, les traits ravagés. Passant une main dans ses cheveux aussi noirs que ceux de ses filles, il me lança un regard qui en disait long mais surtout lourd. Lourd de sens. Lourd de promesses. Lourd de menaces.

Toutefois, ce fut point ma préoccupation. Connors pouvait aisément me voir mais pouvait-il au moins m'entendre? Entendre la plainte déchirée d'une mère à bout? Entendre les battements erratiques de mon coeur meurtri? Vivre dans une constante peur de perdre un être cher? Mon propre sang! Ma fille.

Assise sur ce lit d'hôpital, avec lui de l'autre côté aurait dut suffire à apaiser ma culpabilité. Pourtant rien n'y fit. Les remords me broyaient malgré tout. Et j'ignorais si c'était soit le retour fracassant du géniteur de mes filles ou bien l'état déjà empiré d'Amalia.

Ses lèvres grises, sa peau froide, sa respiration lente; un peu trop lente à mon goût me rendirent impuissante alors que j'avais remué ciel et terre afin que son père vint pour la transfusion.

Père!

Avec beaucoup d'appréhension, je relevais la tête loin de tout courage et de colère qui m'avaient jadis assaillit  depuis que je le vis. Son profil de guerrier ne laissait rien transparaître sauf ses veines frontales qui s'étaient raidies. Comme à son habitude! Il demeurait l'homme impitoyable et froid tout comme auparavant. Ah oui! J'oubliais. Il était par dessus en colère.

-"Tu n'allais jamais me dire la vérité," déclara ce dernier, remettant encore une fois le sujet sur le tapis. 

-"Est-ce nécessaire de répondre à ta question quand nous savons pertinemment la réponse?" répliquais-je de but en blanc. -"Ne joue pas la mijaurée! Pas après tout ce qui s'est passé!" assénais-je avant de ressentir une pression sur mes doigts.

Me retournant, je vis sa petite main que je reconnaîtrais entre mille serrait mes doigts.

-"Ma puce?" dis-je, d'une voix enrouée.

-"Maman?" toussota Amalia, les yeux légèrement ouvert.

-"Appelle le docteur Cassandra Benson," dis-je à Connors qui n'avait rien dit depuis le réveil de notre fille.

Au contraire, ses yeux bleus s'arrimèrent aux miens aussitôt. Aucune trace de haine ni même de vengeance. Seulement de la tristesse. Ce fut ce que je lis et qui me laissa coi. Interdite, mes yeux se détachèrent des siens. Obnubilés par cet océan dont je connaissais la profondeur mais par dessus tout de la crainte de m'y noyer comme cinq ans plus tôt, je mis le plus de distance entre nous en le fuyant.

Impardonnable Tome DeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant