-"Bonsoir, ma belle," nous salua Conrad, un sourire en coin.
Sa tête se pencha légèrement alors qu'il haussa ses sourcils, son sourire énigmatique ne faisant que s'élargir me faisant frémir. Ses aigres-marines me détaillèrent avec une perturbante intensité que je reculais sachant pertinemment qu'il pouvait aisément combler le peu de distance qui nous séparait de quelques enjambées, le policier, n'étant point un obstacle pour lui.
-"Tu n'es pas contente de me revoir?" me demanda Conrad avec une moue enfantine.
-"Que fais-tu ici?" l'attaquais-je aussitôt alors qu'il s'avança prudemment vers moi tel un prédateur qui allait bientôt foncer sur sa proie.
-"Voir nos filles. Du moins, Amalia. Comment se porte-t-elle? Elle va bien?"
Stupéfaite, je le fixais bouche bée incapable d'en entendre davantage. L'hôpital se fout de la charité! Bon sang! C'était lui qui avait provoqué l'accident et aujourd'hui il venait devant moi comme une fleur m'interrogeant sur la santé de ma fille! Et le comble il clamait haut et fort que c'était lui le père. Hors ce n'était pas le cas ou sinon j'avais une très mauvaise mémoire!
-"Cela ne te regarde pas. Tu n'es pas leur père, Conrad. Et même si tu l'étais, tu serais le pire. Nous savons tous les deux que c'est toi qui a tout planifié. N'as-tu aucune compassion? Mes filles n'ont même pas cinq ans. Elles n'auraient jamais dû subir ta folie!!"
-"Pardon?" s'exclama mon ex petit ami, dont les sourcils se rehaussèrent de surprise. -"Comment ça, 'Je ne suis pas leur père' ?" fit-il en mimiquant. -"Je suis leur père que tu le veuilles ou non, ma belle et cesse de me traiter de fou!"
-"On n'a jamais couché ensemble! Tu m'entends. Jamais!"
-"Mademoiselle, on est dans un endroit public," tenta de me calmer le policier en se positionnant au milieu.
-"Je m'en fiche! Arrêtez le car c'est lui qui a causé l'accident, officier!"
-"C'est vous, Conrad Hadès?" s'enquit l'agent de police.
-"Oui, c'est bien moi mais je ne suis pas l'auteur de l'accident. J'étais avec Mademoiselle lors des faits, n'est-ce pas, ma douce Becca?" persista Conrad avec ce sempiternel sourire mielleux qui ne fit qu'attiser ma colère.
-"Tu aurais pu très bien engager quelqu'un," répliquais-je, poings serrés.
-"Calme toi, ma tigresse, tu auras le loisir de me griffer si tu le veux!" déclara sombrement Conrad, les yeux assombris.
Ses aigres-marines baignant dans un océan de noirceur et de folie me scrutèrent avec intérêt que je déglutis péniblement. Je reconnaissais ce regard. Il ne m'était pas indifférent. Son parfum épicé me monta à la tête réveillant cet insupportable mal de crâne. Il portait le même parfum d'il y a cinq ans.
Il demeurait le même Conrad en d'autres mots. Peut être plus machiavélique qu'il ne l'était autrefois à mon plus grand malheur.
-"Tu ne dis rien, ma belle," persista le sosie diabolique de Connors qui s'avança prudemment vers moi, ses yeux bleus étincelants d'une lueur qui ne m'inspirait guère confiance.
Mon regard croisa automatiquement le sien. Un rictus apparut sur ses lèvres fines, semblable à celles de son frère aîné dès que le policier s'en alla, comprenant qu'il n'allait point arrêter le commanditeur de l'accident s'il continuait à écouter nos querelles d'antan.
Comme s'il se délectait de me voir ainsi, dans cette situation des plus confuses et vulnérables, Conrad ne fit qu'aggraver ma situation en redisant les mêmes paroles qu'il m'avait dites, cinq ans plus tôt. Il n'avait point changé malheureusement et cela me troubla plus qu'il ne le fallait. Ce serait un mensonge de dire qu'il ne me faisait plus peur. Et en agissant de la sorte, je fus comme ramenée dans mon passé, revivant et ressentant cette effroyable sensation d'être à sa merci, d'être fragile, de redevenir cette poupée de chiffon qu'il utilisait à son bon plaisir.
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Impardonnable Tome Deux
ChickLitOn a tous un passé qu'on aimerait oublier. Peut importe le temps qu'il faudra, certaines séquelles prennent du temps pour guerir. Et c'est le cas de Rebecca. Cinq longues années se sont écoulées depuis cette nuit fatidique. Cinq longues années se...