29. Alexandre Eno

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Denis est si concentré en ce moment que je n'ose même pas respiré. Après avoir kidnappé le garçon qu'on devait rencontrer, nous nous sommes échappés illico presto.

Mon frère et moi avons senti énormément de détresse dégageant de ce jeune homme. Bien que Denis ne fasse jamais attention aux sentiments des autres, il est celui qui a décidé d'emmener le gamin. J'espère juste qu'il ne va pas le liquider dans ma voiture. Cette allemande m'a coûté un bras.

Le garçon en question à un sac sur la tête. Nous ne l'avons pas bâillonné parce qu'avec ses blessures et fractures, nous savons qu'il ne peut pas s'échapper. Entre nous, je pense qu'il est terrorisé. Les premiers mots qu'il ait prononcé quand il a vu Denis furent :

- Je suis désolé, Monsieur.

Sa voix était si faible et crispée que j'ai failli avoir pitié de lui. Failli. Je suis un homme très rancunier de nature, et mon côté possessif n'arrange rien. Qu'il soit blessé ou pas, il a fait du mal à Bertrand, même si ça avait été Denis j'aurai ressenti la même colère. Mes mains sont moites, j'essaie de remplir mon esprit de pensées positives. Je nous conduit au motel que mon frère a loué. La chance que nous avons est que les infrastructures de ce taudis sont en dehors de la salle d'attente. Nous pouvons entrer sans croiser un autre locataire.

Nous sommes arrivés à bon port. Denis part vérifier si on peut passer discrètement. Je profite du moment pour appeler Henri. Il ne faut pas qu'il nous attend pour rien.

Pendant que je parle avec lui, Denis ouvre la portière arrière et tire violemment le garçon. Celui-ci ayant eu mal, a lancé un juron, et bien sûr mon imbécile de frère lui a donné une claque pour qu'il se taise.

Et on dira qu'il est plus intelligent que moi.

Je fini avec mon bébé et je raccroche. J'éteins mon portable pour plus de commodité. Je suis Denis et notre otage jusqu'à la chambre. Il faut quand même féliciter le propriétaire du lieu pour la propreté de ses chambres. À défaut de mettre des fournitures, il n'a pas lésiné sur la salubrité, je lui donne mon respect pour cela. Je verrouille derrière nous et j'allume. C'est seulement à ce moment que mon frère pousse le gamin dans le fauteuil.

Il murmure des insanités. Il n'y a rien à dire, il a terriblement mal. En même tant il l'a bien cherché pour nous avoir provoqué. Sans lui on ne m'aurait jamais vu dans une commune aussi mal réputée. Denis retire ENFIN la casquette et les lunettes qui lui donnaient une tête de bouffon.

Crever que de perdre ma coolitude.

Il enlève le sac sur la tête du garçon. Ce dernier cligne des yeux plusieurs fois. Il regarde autour de lui avant de finalement poser ses yeux sur nous. Je suis toujours debout, les mains dans les poches. Denis est assis dans l'autre canapé, la mine sérieuse et le regard noir.

- Alexandre Eno, dit-il, froidement.

Le garçon baisse la tête.

- Tu es surpris que moi, Denis Zokou, soit devant toi, n'est-ce pas ?

Il ne répond pas. Denis sort son téléphone portable. Je vois que l'écran est un peu fissuré.

Bizarre.

Il ne néglige jamais ses affaires, d'habitude. Il est entrain de lancer une vidéo qu'il montre au gamin, en tendant son portable vers lui. Je ne sais pas de quelle vidéo il s'agit, mais la façon dont la face déjà défigurée du petit se déforme, j'imagine que c'est une preuve de son forfait. Je devrai aussi la regarder plus tard.

Quand elle s'arrête, Denis range son portable. Mon frère et moi attendons docilement que l'enfoiré dise quelque chose, mais monsieur reste silencieux. J'ai une veine qui bat sur la tempe, si ça continue je vais lui en coller une.

Atteindre La Cible [M/M]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant