Je ne savais pas exactement ce qui m'arrivai.
Je sentais un poids sur mes yeux, preuve que ceux-ci étaient fermés. Mes mains, mon corps entier étaient parcourus de minuscules chatouillis, comme des fourmis qui s'étalaient en grouillant sur ma peau.
Je ne ressentais plus rien, hormis cette étrange sensation d'apaisement. Mes douleurs à la cheville, au flanc, à la tête et au poignet avaient totalement disparu, et c'était divinement salvateur.
Je ne savais même pas si je respirais. Sans doute que oui, même au travers de ce rideau de brume qu'était ma vision. C'était étrange. Pour moi, quand on mourrait, on était entourés de blanc, au mieux de paillettes colorées ; mon imagination était sans aucun doute très fertile, mais... Je n'avais jamais pensé que tout serait si noir, si obscur.
En y réfléchissant, ce n'était pas si illogique : après tout, la mort était depuis la nuit des temps considérée comme sombre, triste et froide, comme une goutte d'eau glacée qui coule dans la nuque, descend le long de la colonne vertébrale tout en provoquant un frisson désagréable qui remonte le long de notre corps, hérissant les petits cheveux derrière la nuque et les poils sur la peau.
La mort... Depuis ma plus tendre enfance, j'avais eu loisir de me poser la question de cette mystérieuse fin, jamais élucidée. Personne ne savait ce qu'était réellement la mort, elle avait beau avoir une définition toute bête dans le dictionnaire (en occurrence le seul que nous possédions dans l'astéroïde, avec un édition qui datait de 2070), elle n'avait pas plus de sens que l'évènement en lui-même. Je ne voulais pas mourir, et après tout, quand on tenait tellement à la vie comme moi, nous l'arracher était digne du pire cauchemar.
Au fil du temps, elle avait été vue de bien différentes manières : humanisée à la manière d'une personne, divinisée à la manière d'une entité, animalisée, allégorisée, symbolisée... La mort avait été représentée partout, que ce soit sur des tableaux, des sculptures, toutes les formes d'art existant sur la planète. Elle était si mystique et énigmatique, et pourtant, lorsqu'elle se retrouvait devant nous, comme une ombre silencieuse et impassible, on ne pouvait s'empêcher de la détester, alors que finalement... Était-elle réellement responsable ?
La Mort avec un grand "M" m'était toujours apparue comme une forme sombre, malheureuse et distante, les yeux dans le vague, la bouche ouverte dans un cri qui ne viendrait jamais, portant, dans un stéréotype parfait, sa faux et sa cape noire flottant derrière elle comme une nuée de corbeaux affamés. Elle était si seule, que lorsqu'elle récoltait la vie d'un être humain pour le faire passer de l'autre côté du mur, elle profitait quelques secondes de sa présence brève, avant de, une nouvelle fois, être isolée du reste du monde.
La vérité, c'était que je ne savais pas si la Mort existait vraiment. Était-ce la Mort ou le Temps, cette chose, entité, personne, peu importe, qui nous enlevait la vie, la retirait comme on arrache un pansement ? Les deux allaient de paire, mais le Temps était-il aussi innocent que cela, se cachant derrière son sablier étoilé pour ne pas être soupçonné ? Il était bien plus facile de déléguer que d'assumer, c'était bien évident, et demander à la Mort de se charger de la sale besogne était d'une facilité à la fois évidente et déconcertante.
Finalement, quel était le but de tout cela ? En prenant au cas par cas, quel était mon but, sur cette Terre ? Théoriquement, j'avais exécuté mon devoir, peut-être même, dans un grand élan d'espoir, y survivrai-je ! Mais que faire, après cela ? Vivre, comme si rien ne s'était passé ? Ignorer le traumatisme permanent des Chimères, de la mort de mes parents, de tous ces évènements abominables qui m'avait frappée, qui nous avait tous frappés ?
Les Chimères n'étaient finalement qu'un prétexte. Le monde aurait de toute façon finit par déborder, par imploser, de l'intérieur. Les Chimères avaient inversé la tendance, le faisant exploser, de l'extérieur. Elle était arrivé comme un caillou dans un verre d'eau, elles avaient tout renversé et saccagé, à la manière de monstres, le qualificatif qui leur allait le mieux. Mais à bien y songer... Les Chimères avaient détruit, tué, blessé, massacré... Toutefois, étions-nous sincèrement mieux qu'elles ?
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Projet Earth (en réécriture)
Science FictionIl y a cinquante-cinq ans, des montres ont envahi la Terre. Les Chimères haïssent les Hommes, et tuent tout ce qu'elles croisent. Sur l'astéroïde 345Z2, une jeune fille, nommée Brume, a été élevée toute sa vie dans le but de sauver l'humanité, devo...