Chapitre 68

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- Oh non ! m'exclamai-je, en reculant instinctivement. 

Nous étions face à une intersection, bordée sur les côtés de bâtiments délabrés, et une Chimère, amaigrie, venait d'en sortir. Malgré son état médiocre, sa mine fatiguée, et sa crinière pendant sur ses épaules saillantes, elle me paraissait encore plus dangereuse que les autres. Et pour cause, son regard était affamé, et elle venait de trouver ses proies. 

Amaryllis se posta à côté de moi : 

- Cinq minutes. 

- Pardon ? fis-je. 

- Depuis qu'on est partis du centre, il s'est écoulé cinq minutes avant qu'une Chimère apparaisse. 

- Qui fait ce genre de constat ? demandai-je, interloqué. 

La jeune fille rit de bon cœur, ce qui tranchait complètement par rapport à la situation qui s'envenimait de seconde en seconde. La Chimère commençait déjà à se ratatiner au sol, son dard dressé au-dessus de sa tête, crocs à découvert.

- Moi, Face de Cadavre. 

- Tu as quand même des délires étranges, grogna Chioné en arrivant à ma droite, sortant un poignard liseré d'une bande noire sur la lame. 

Je fronçai aussitôt les sourcils : 

- Je rêve où ton arme ressemble fortement à celle de Brume ? 

Elle m'adressa une mimique exaspérée : 

- Tu es d'une lenteur affligeante d'esprit, Wings. Je te rappelle qu'en tant que plus jeune membre de l'institut Gaïa, mes parents ne m'ont pas laissée me jeter dans la gueule du loup sans un minimum de sécurité. 

Je clignai des yeux, plus surpris de seconde en seconde. Evidemment, c'était logique, mais tout de même, réaliser que Chioné était depuis le début un agent de la société qui avait créé le Projet Earth, ainsi que toute cette histoire, c'était déconcertant. 

- Hum, c'est intéressant, ça, souligna Amaryllis, en zyeutant sur le poignard de Chioné, tu es la seule à avoir une arme qui réussira un tantinet à blesser cette horreur. Je t'en prie, épate-nous ! 

- Toute seule ? s'étrangla presque Eléos, qui jusqu'ici était resté silencieux, en rajustant sa capuche en catastrophe.

Chioné sourit : 

- Bien évidemment que oui. 

Cela semblait beaucoup l'amuser, de devoir affronter seule une Chimère morte de faim, et dont des filets de bave à l'odeur rance me montaient au narines dégoulinaient déjà sur le bitume. Je fronçai le nez, dégouté : 

- Laisse-nous au moins créer une diversion, pour qu'elle soit désarçonnée. Ce sera plus facile. 

La Chimère approchait de plus en plus, grognant fort, prête à bondir. Il fallait nous dépêcher, maintenant, sinon nos plans tomberaient à l'eau d'un coup de griffes en pleine gorge. 

Je pinçai les lèvres, une idée jaillissant soudain de mon esprit : 

- Ok, j'ai une idée. Mais j'ai besoin de l'aide de Chioné. 

- A ta disposition ! ironisa la jeune fille en secouant sa chevelure blonde dans tous les sens comme pour s'échauffer les muscles avant un combat. 

- Qu'est-ce que tu veux faire, exactement ? demanda Amaryllis, tout en surveillant soigneusement le monstre de Mars du regard. 

- Tu verras bien, je rétorquai mystérieusement, en souriant, Chioné, cours ! Euh, vers la Chimère, hein. 

La jeune fille, après une seconde d'hésitation, se mit à courir, droit vers la Chimère, qui, surexcitée de voir cette folle d'adolescente se jeter sur elle, fit de même et accéléra. 

Projet Earth (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant