Chapitre 75

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Il faisait un froid glacial, dans cette pièce. Je mourrais de froid, avec mes vêtements mouillés qui me collaient à la peau, et mes cheveux gouttant dans ma nuque. Chioné frissonnait de tout son être, ses lèvres étaient devenues violettes, et des cernes bleuâtres s'arrondissaient sous ses yeux.

Seul Eléos était égal à lui-même, bien que ses doigts tapant avec une régularité parfaite sur le carrelage trahissent son activité intérieure. De même pour Amaryllis, qui changeait de position toutes les trente secondes.

L'attente était insupportable, et ne semblait ne jamais vouloir se rompre. Les secondes se transformaient en minutes, qui elles-mêmes s'égrenaient pour devenir des heures, bien qu'il soit impossible pour chacun d'entre nous de savoir quelle heure il était. 

Approximativement, je nous aurait plutôt situés en fin d'après-midi, mais encore une fois, rien ne me le garantissait. Je m'en moquai un peu, d'ailleurs. Je n'en pouvais plus de cette atmosphère pesante, silencieuse. L'air lui-même me semblait lourd, comme s'il ne pouvait plus se porter, et se sentait obligé de délester d'une partie de son chargement sur nos épaules.

Chioné finit par s'assoupir, s'endormant contre un carton à peu près sec, enroulée dans ses cheveux blonds. Amaryllis et Eléos suivirent son exemple quelques temps plus tard, tombant chacun sur l'épaule de l'autre, d'une manière que j'aurais pu trouver attendrissante dans une autre situation.

Pour ma part, dormir aurait relevé de l'exploit, je m'en sentais totalement incapable. Pourtant, j'étais épuisé par ce que nous venions de subir, et un petit somme ne m'aurait pas fait de mal. Mais c'était totalement impossible, mes paupières ne se fermaient pas, restant désespérément ouvertes, incapables d'esquisser un mouvement vers le bas.

 Au contraire, elles agrippaient la moindre lumière, me forçant à rester éveillé. En même temps, ce n'était pas une mauvaise chose, de cette manière, s'il y avait une quelconque nouvelle de la part de l'un des deux instructeurs de l'astéroïde 345Z2, au moins, je le saurais.

Je pris ma tête entre mes mains, et frottai mes yeux, tout en baillant. C'était parfois incroyable de voir comment le corps se démenait pour accueillir le sommeil, et, d'une simple pensée, de constater que le cerveau s'y opposait de la manière la plus radicale. 

Je grelottais complètement, maintenant, et décidai de me lever, histoire de marcher un petit peu. Personne ne nous avait interdit de nous déplacer dans le bâtiment, si ? En plus, avec un peu de chance, il y aurait peut-être des vêtements ou des couvertures que je pourrais trouver, histoire que nous ne nous transformions pas tous en glaçons.

Mes articulations endolories craquèrent pour me signifier leur mécontentement d'être remises en mouvement, et des fourmis coururent dans mes mollets et mes genoux. Je les ignorai, et, d'une démarche un peu hésitante, descendis un escalier. A peine quelques pas plus loin, je me stoppai, surpris de découvrir que tous les hommes inconscients de tout à l'heure avaient disparu, sans même demander leur reste. Je n'allais pas m'en plaindre, moins de membres de la SYNE dans ce building n'était pas une mauvaise chose, mais tout de même.

Au début, je comptai simplement me dégourdir les jambes et fouiller dans les couloirs et, qui sait, apercevoir par fausse inadvertance Mandragore ou Mint, mais je me retrouvai au bout d'une dizaine de minutes tout en bas de l'escalier. 

Pas la moindre trace des deux instructeurs, et l'espace d'un instant, mon cœur fit une embardée en imaginant soudainement qu'ils aient pu emporter Brume avec eux ; après tout, rien ne leur interdisait, et ils ne nous connaissaient même pas.

Je fouillai plusieurs pièces vides, sentant la panique monter au fur et à mesure, avant de tourner abruptement sur la gauche et de manquer d'heurter violemment Mandragore qui arrivait dans le sens inverse.

Projet Earth (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant