Chapitre 72

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- Tu vois la sortie ? je demandai à Chioné devant moi. 

Ayant ses chaussures à deux centimètres de ma figure, car nous étions obligés de nous tordre dans tous les sens pour nous échapper de ce cylindre métallique qui donnerait des cauchemars à n'importe qui, je tâchais d'avancer le plus vite possible. Même si Chioné était plus rapide que moi, je la ralentissais à cause de ma taille pas très adaptée. 

- Oui, t'inquiète pas, à quelques mètres, on sera bientôt en dehors de ce truc horrible, déclara-t-elle, aussi heureuse que moi. 

Effectivement, je ne m'en rendis compte que quelques mètres plus loin, mais un écran de lumière se rapprochaient rapidement, apportant en même temps un soulagement grandissant. 

Quand finalement Chioné se glissa en dehors du trou et lâcha un soupir de soulagement, je la suivis avec le même sentiment. Et dire que nous allions être obligés de refaire la même chose dans le sens inverse... Je grimaçai rien que d'y penser. 

J'espérai que tout se passait bien du côté d'Amaryllis et d'Eléos... Si Annabelle leur faisait du mal... 

Je sortis de mes pensées brouillonnes, pour fouiller aussitôt, anxieux, la gigantesque pièce du regard : je comprenais mieux maintenant l'origine de l'humidité, la structure de ces tuyaux n'était pas stable du tout, et menaçait de s'écrouler en déversant des centaines de litres d'eau... 

Mais pourtant, ce n'est pas cela qui attira mon attention : ce fut la forme inerte au pied d'une gigantesque machine noire, équipée d'une seule et unique corne pointée vers le ciel. 

Quand je me rendis compte de qui il s'agissait, j'étouffai une exclamation d'horreur, rejoins immédiatement par Chioné : 

- Brume ! 

La californienne plaqua une main sur sa bouche, horrifiée. Je courus à toute vitesse et me laissais tomber à côté d'elle, les mains parcourues de tremblements incontrôlables. Même mes larme, qui pourtant ne coulaient pas souvent, avait envie de rejoindre la partie. 

- Non, Brume, non !! je m'écriai en observant son visage calme et ses yeux froidement clos. 

Dans un état de panique difficilement manquable, mes pensées valsant dans mon esprit sans ni queue ni tête, je détaillai son corps, à la recherche de quoique ce soit qui aurait pu la blesser, lui faire mal, bref, quelque chose, quoi ! 

Je trouvai, au bout de ce qui me parut des heures, quatre aiguilles plantées dans ses avant-bras, qui se nourrissaient de son liquide vital comme de mini-vampires assoiffés de sang. 

Je les arrachai sans ménagement, et les jetai au loin. Elles tintèrent au sol en le heurtant, se brisant en laissant échapper son sang. Brume ne réagit même pas, provoquant une nouvelle marée d'épouvante dans tout mon corps. 

A côté de moi, le Diffuseur grogna, l'air satisfait de son présent, et je le fusillai du regard, furieux contre lui, contre l'institut Gaïa, contre tout le monde, en fait. 

Chioné arriva sans un mot, bouche close, et se laissa tomber en face de moi, l'air de ne même pas savoir quoi dire. Sans paraître en état de choc, elle aurait difficilement pu être plus pâle. 

Pris d'un réflexe soudain, je déposai sa tête sur mes cuisses, et passai une main dans ses cheveux, pour ôter de devant son visage. Malgré moi, je me fis la réflexion étonnement romantique qu'elle ressemblait à une princesse ensorcelée, et même dans cet état, elle était vraiment magnifique.

 Ce constat ne fit qu'augmenter la taille de l'énorme boule qui s'était logée dans ma gorge. J'avais l'impression qu'on venait de m'arracher un bout de mon être, et qu'on l'avait jeté au loin sans respect, l'écrasant et marchant dessus joyeusement. 

Projet Earth (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant