Chapitre 80

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- Bon, on fait quoi, maintenant ? 

- Quelle bonne question... ironisa Armelle en roulant des yeux à l'intention d'Amaryllis. Celle-ci fronça le nez, boudeuse, et, exaspéré, je soufflai : 

- Hé, ne commencez pas vous deux, ce n'est vraiment pas le moment ! 

Je cherchai l'approbation de Brume, mais, ne la voyant pas répondre, je m'arrêtai net : depuis que nous avions quitté son institutrice, elle restait là, tirant son habituelle mèche de cheveux, l'air ailleurs. Ses yeux étaient tournés vers l'endroit où Mandragore se tenait un peu plus tôt, désormais vide. Mint et Annabelle continuait de se battre. Quant à la femme aux yeux vairons, elle était aussi invisible que Chioné. 

Hélas, je n'eus pas le temps de parfaire mon examen. 

Un craquement sec éborgna le plafond, juste au dessus de nous. A peine eus-je le temps de lever la tête qu'un morceau se décolla et chuta, à deux centimètres d'Eléos, qui sursauta vivement, s'écartant de justesse. 

- Merde... El, tu n'as rien ?! s'enquit Amaryllis en se propulsant aux côtés de son jumeau pour s'assurer qu'il n'avait rien. 

Eléos grommela son approbation, se remettant à peine de sa frayeur. 

Grog observa le plafond tremblotant en plissant des yeux : 

- ça va s'effondrer... Sérieux, il ne faut pas traîner ici. 

- On ne peut pas laisser les instructeurs de Brume ici, s'insurgea aussitôt Armelle, en écarquillant son seul œil ouvert. 

Je regardai ma grande sœur : malgré les épreuves que nous avions traversés, elle s'affirmait toujours avec le même panache. Pourtant, nous pouvions tous sentir notre propre appréhension, notre envie que tout ça s'arrête. Cette destruction ne semblait plus avoir de fin.

- Mandragore m'a dit de m'occuper de vous tous, et... qu'ils se débrouilleraient... Je pense donc que... 

Brume s'arrêta et ferma les yeux, comme si c'était insupportable à dire :

- C'est mieux qu'on les laisse se débrouiller. 

Elle semblait à deux doigts de pleurer. Au vu de ses yeux rouges, ce ne serait pas la première fois... Cela me faisait mal de la voir ainsi, si désemparée. 

On voyait bien que cela la déchirait de laisser sa famille aux mains d'Annabelle, à une potentielle... Non, il fallait vraiment que j'arrête d'être aussi pessimiste, n'y pensons pas. ça n'arriverait pas. 

J'attrapai sa main et la serrai contre la mienne, sans réfléchir. Elle avait besoin de soutien, et je lui en procurerait autant que nécessaire. 

Elle soupira doucement, fixant nos deux mains réunies. Un maigre sourire s'afficha sur son visage fatigué, me rendant ma poigne délicatement, comme pour me remercier. 

Armelle, quant à elle, se contenta de sourire, en échangeant un regard amusé avec Grog. 

Et ce fut à cet instant précis que tout l'immeuble s'écroula. 

La structure était majoritairement stable grâce à cinq grand poteaux en béton armé, qui tenaient les étages supérieurs. Leur taille était impressionnante, et ils devaient être quatre fois plus large que moi, si ce n'était plus. Bref, le genre l'infrastructure qu'on imaginait (à tord) incassable. 

Lorsque le premier s'effondra sur lui-même, en produisant un bruit assourdissant qui résonna de longues secondes dans mes tympans suppliciés, je compris que si nous ne bougions pas immédiatement, c'était la fin. 

Projet Earth (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant