7e point - 2e set

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Comment se faire tuer par beau papa en six leçons.

Petit un, harceler le personnel de sa maison pour entrer. Petit deux, avoir l'intention de voir sa fille. Petit trois, faire comme s'il avait l'intention d'être discret, mais ne l'est finalement pas. Petit quatre, être toujours là quand ledit beau papa arrive. Petit cinq, avoir, pour une raison incertaine, les mains sur les hanches de sa fille. Petit six, oser lui dire qu'il doit laisser sa fille tranquille avant même de se présenter.

Retour à la situation présente.

- Comment il est entré ici ?!

- Laisse-le tranquille ! C'est moi qui lui ai ouvert ! répond instantanément Atsuko.

Ils la dévisagent un court moment tous les deux, histoire de bien transmettre le « Ah bon ? » inscrit sur leur visage, et la dispute reprend de plus belle :

- Tu es punie ! Tu n'as pas le droit de recevoir de la visite.

- Ah ça, pour être punie, elle est punie. On n'a pas idée de séquestrer sa fille déjà asociale chez elle.

- C'est ça, ta discussion avec mon père ? s'offusque-t-elle.

Son visage orne un sourire soudain railleur :

- Quoi ? Je ne fais que me mettre à son niveau pour qu'il comprenne à quel point la décision est stupide.

- Ne me dis pas que tu sors avec un type pareil, soupire son père d'un air soudain fatigué.

- On ne sort pas ensemble !

- Mais ça ferait sûrement plaisir à Tanaka, sourit Tsukishima.

Elle réfléchit brièvement.

- Te connaissant, ça ferait plaisir à n'importe lequel de tes amis de voir que tu n'es pas un cas désespéré.

- Merci. Toi au moins, tu reconnais que j'ai des amis.

- Parce qu'il y a des gens qui ne sont pas de cet avis ? demande monsieur Kaneko.

L'adolescent répond très sérieusement par un haussement d'épaules, et Atsuko explique :

- Sa mère n'a pas vraiment foi en ses relations sociales.

- Ah, le pauvre.

- Oui... mais c'est pas le sujet ! Pourquoi tu ne m'as pas dit que les autres membres de l'équipe étaient passés ?!

- Parce que c'est à ça que ressemble ton équipe ? Sérieusement ? Une bande de gosses avec les cheveux en pétard, ou un air de croque-mort à l'agonie ?

Même Tsukishima ne voit pas de qui il parle :

- Vous parlez de qui ?

- Le gamin avec les cheveux noirs...

- Ah, et avec un air de corbeau, répond le lycéen avec un sourire.

- Oui, c'est ça ! Mais ne crois pas que je vais bien m'entendre avec toi.

- Il m'a aidée à accrocher les affiches plus hautes, papa, c'est le dernier garçon de la Terre qui pourrait me tripoter.

- Ça, tu n'en sais rien, c'est un garçon, après tout !

- C'est vrai, ça. Ça, tu n'en sais rien...

Elle soupire longuement.

- Tu ne me facilite vraiment pas la tâche, tu sais, gémit-elle.

- Oh, mais je ne suis pas là pour ça. Je suis là pour voir quel genre de personnes sont tes parents, et te faire sortir de là, pas pour t'aider en quoi que ce soit. En fait, maintenant que j'ai vu ton père, j'ai hâte de rencontrer ta mère. Ce doit être une sacré hystérique. C'est un peu le stéréotype de la famille riche avec le papa-poule.

- Qui est le papa-poule ?!

- Excusez-moi, monsieur, mais si j'avais besoin de votre réponse à mon monologue, j'aurais marqué une pause. Mais la vérité, c'est que même l'ancienne maman de notre équipe ne nous bridait pas comme ça. Au lieu de nous couver quand on avait besoin d'aide, lui au moins il nous poussait toujours vers le haut, quitte à rester sur le banc. Mais êtes-vous réellement prêt à faire la même chose pour votre fille ?

Un lourd silence s'abat sur la pièce.

Avec un sourire en coin, Tsukishima finit par lâcher :

- J'avais raison, alors. Ça me donnerai envie de faire le mur, pas toi, Atsuko ?

- C'est chez toi qu'elle a été ?!

- Je n'ai pas à vous le dire. Mais admettons que ce soit le cas. Vous pensez que votre fille a été mieux chez qui ? Vous qui lui avez interdit de retourner au club, ou moi devant qui elle a raconté sa triste histoire en pleurant. Vous allez rire, mais c'est avec moi que ça s'est le mieux passé. Vous savez de quoi vous avez peur ? D'avoir confiance en elle.

- Tu ne sais pas de quoi tu parles. Elle se passionne pour les choses très vite. C'est dangereux.

- Et ? Qu'est-ce qu'il a de dangereux à la laisser sourire ? Non, ce qu'il se passe, c'est que cette fois, renvoyer quelqu'un ne suffira pas à la décourager. Parce qu'il n'est pas seulement question du club, pas vrai ? En vérité, ça ferait peur à n'importe quel parent de voir son enfant plongé dans les mathématiques comme elle doit l'être à la maison, pas vrai ? Regardez, la preuve, même pour ses amis, c'était bizarre, et pourtant, tout le monde sait que les amis, on les choisit. Mais elle n'est pas du tout comme ça avec nous. Elle profite du temps qu'elle passe avec les autres, et elle sourit avec eux.

- Si tu sais vraiment ce qu'a vécu ma fille, tu sais à quel point elle peut être fragile.

- Atsuko est fragile parce que vous la rendez fragile, lâche l'adolescent en rentrant ses mains dans ses poches. Je ne changerais pas d'avis. Et tant que je n'aurais pas la certitude qu'elle pourra revenir, je ne partirais pas. Alors ? On en discute ou on attend Madame ?


« Les plus grands seront toujours les plus forts. C'est la logique de la nature. » (Tanji Washijou)

InéquationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant