Inéquation

22e point - 2e set

Quand elle se réveille, elle n'a ni le souvenir d'être rentrée chez elle, ni l'impression d'être dans son lit.

C'est en tournant la tête vers l'infirmière qu'elle se souvient que Tsukishima l'a amenée ici, avant d'attendre l'arrivée de la femme, puis de retourner à l'entraînement.

Et ce qui l'a réveillée, c'est le son de la porte, ainsi que des bruyants élèves qui viennent d'entrer.

- Vous croyez qu'elle va mieux ?

- C'est pas sûr, si tout le monde crie comme ça, se plaint la femme derrière son ordinateur.

Elle se tourne ensuite vers Atsuko et leur dit :

- Elle est réveillée.

La première tête que l'adolescente voit est donc celle d'Hinata, rapidement écartée par la main de Kageyama, lui même poussé par Nishinoya...

- Hé ! Ce n'est pas un zoo, ici ! Que tout le monde sorte ! se fâche l'infirmière avant qu'un nouveau visage ne débarque.

- Je peux déposer ses affaires ? demande Hitoka doucement.

- Bien entendu, répond-elle.

- Nous... commence Yamaguchi mal à l'aise. Nous allons l'attendre dehors... nous rentrons ensemble, le soir.

- D'accord, d'accord, mais les autres, ouste !

Chassés en moins de temps qu'il ne leur en a fallut pour entrer, l'équipe de Karasuno est mise à la porte sans d'autre formes de procès, et avec un immense soupir collectif.

- Elle va bien, au moins ? demande Tanaka inquiet.

- Elle n'avait pas l'air mourante, en tout cas, soupire Kageyama.

- Et ils auraient appelé ses parents si ça avait été grave, non ? demande le petit rouquin.

On lui lance un regard d'abord dubitatif, pour finalement trouver que sa remarque a du sens. Et quelques minutes plus tard, ils s'éparpillent pour rentrer chez eux.

Ce n'est que quinze minutes plus tard qu'ils reçoivent un message collectif de la part d'Atsuko disant qu'elle se sent mieux, mais que Tsukishima et Yamaguchi vont la raccompagner jusqu'à chez elle pour être sûrs qu'elle rentre en un seul morceau.

Le grand blond et elle se gardent bien de préciser qu'ils ont déjà l'habitude de le faire régulièrement, et que pour cette raison, il fait une demi-heure de trajet supplémentaire par jour, quand il ne va pas la chercher pour l'entraînement.

- Tu es sûre que tu ne veux pas appeler ton père pour qu'il vienne te chercher ? demande le brun alors qu'ils entament le chemin.

Elle sourit d'un air navré.

- Désolée, en fait, je me sens mieux dehors, et je voulais rentrer avec vous. C'est un peu capricieux de ma part, non ? Je ne suis même pas désolée de vous faire marcher autant. Je dois vraiment avoir fait fondre mon cerveau.

Il sourit.

- Mais non, ne t'en fais pas ! On peut te dorloter un peu, t'es malade. Et puis, pour une fois que Tsukki ne râle pas pour quelque chose qu'on lui a imposé !

- Je n'allais pas te laisser faire le retour tout seul, râle ce dernier dans sa barbe.

- Mais quand tu le fais, toi, ça ne te dérange pas, d'être tout seul ? se demande-t-elle.

- Quand est-ce que tu as tes résultats ? demande-t-il pour changer de sujet.

- D'ici moins d'un mois, je crois.

- Tes résultats ? demande Yamaguchi perdu.

- Ah, oui, désolée, je ne t'en n'ai pas parlé, s'excuse-t-elle. J'ai passé un examen d'entrée pour un programme avancé de mathématiques.

- C'est super ! C'était quand ?

- Ce matin.

- Oh. tu aurais peut-être dû rentrer chez toi après, alors. Tu étais comme ça aussi pour le passer ?

Tsukishima les écoute parler en silence, sans se mêler de la conversation jusqu'à ce que son ami ne l'y inclue.

- Et donc, toi, tu le savais ?

- Elle me l'a dit sur le trajet de l'infirmerie.

- Ah ? fait-elle curieuse.

L'adolescent à lunettes la dévisage longuement, avant de poser sa main sur son front pour jauger la température.

- Hum, tu devais avoir plus de fièvre quand tu m'en as parlé.

- Vous êtes quand même plus proches que ce que je le croyais, sourit Yamaguchi en les regardant.

Tsukishima retire sa main avec une nonchalance feinte, et sourit faiblement.

- Pas plus qu'avec toi, pourquoi ?

- Parce que tu ne touche personne. Pas même moi, si tu le peux.

- Ah...

Atsuko éclate brusquement de rire.

- Attention, Tsukishima, ton ami est en train de dire que tu te transforme en fille !

Ils cherchent longuement la logique sans faille de son délire, avant qu'elle ne se décide à leur expliquer :

- Les filles se touchent le front, les mains, les cheveux... C'était... pour ça...

Avec un temps de retard, Yamaguchi éclate de rire en imaginant son meilleur ami faire des couettes à leur deuxième coordinatrice, et elle sourit, fière d'elle :

- Tu vois que c'est drôle !

Tsukishima soupire :

- Les blagues ne font jamais rire les intéressés, de toute façon, dit-il comme pour expliquer sa brusque froideur.

- Pff. C'est bien ce que je disais. Tu es gentil, mais tu es fatiguant.

- Lui ? rit Yamaguchi de plus belle. Gentil ?

- Il ne me croit pas, de toute façon, dit-elle d'un air dépité.

Pour passer du rire aux larmes de cette manière, Tsukishima en déduit que cet examen doit vraiment l'avoir épuisée. Et que sa journée aussi.

- On devrait y aller. Je ne veux pas rentrer tard, dit-il comme s'il allait rentrer plus tard chez lui ce soir qu'habituellement.

- Oui, allons-y, soupire-t-elle en trainant les pieds.

Elle finit sur le dos du blond, son sac porté par le brun, et bavant tout ce qu'elle peut sur la veste d'uniforme du chevalier rouge écrevisse qui vient de gravir la côte avec leur poids à tous les deux.

- Elle est si lourde que ça ?

- J'aurais dû te laisser la prendre, dit-il à bout de souffle.

- Pour une fois que tu t'es proposé pour faire quelque chose qui te demande de l'effort... réplique Yamaguchi amusé.

- Ce n'est pas un effort. Elle est malade. Il faut qu'elle rentre chez elle. Et on ne va pas la laisser devant le portail. Parce que ce coup-ci, son père va vraiment me tuer, grommelle-t-il pour lui.

- Hein ? demande l'autre qui n'a pas bien entendu.

- Rien, je disais qu'on allait la déposer à la porte. Ce sera plus poli. Et je ne suis pas à cinq cent mètres près.

- Si tu le dis ! C'est toi qui la porte !

« Aujourd'hui pourrait être l'occasion de saisir la chance de laisser votre talent s'épanouir. » (Tooru Oikawa)