18e point - 2e set

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Il y a des matins où l'on ne se pose pas de questions. Même quand le pied de quelqu'un nous arrive dans le visage, alors qu'on dort chez soi.

C'est la première pensée qui effleure l'esprit de Tsukishima quand il le décale, avec un long soupir.

Il a cours ce matin. Il s'est couché relativement tôt la veille, mais là n'est pas la question, puisqu'il n'a pas du tout réfléchi à comment faire sortir l'adolescente de chez lui.

Sa mère frappe à la porte, ce qui a pour effet de le réveiller tout de suite, et de réveiller Atsuko quand il crie :

- J'arrive, n'entre pas, je suis en train de m'habiller.

- Oui, mon grand, rit-elle derrière la porte.

- Bonne journée mon grand, ricane Atsuko encore à moitié endormie.

- Ne t'installe pas chez moi, toi, sourit-il. Tu dois encore rentrer. T'as cours aussi, ce matin, je te rappelle.

- Il peut bien attendre... il est payé assez cher comme ça, maugrée-t-elle en changeant de position.

Il tire la couette vers lui en s'asseyant, ce qui a pour effet de la découvrir elle, qui dort dans l'autre sens.

- Hé !

- Moins fort. C'est pas une raison pour être en retard. Et ne cries pas.

- C'est toi qui a fait rentrer quelqu'un du sexe opposé de manière illégale dans ta chambre, vis en conséquences.

- C'est toi qui a mendié de manière implicite pour ne pas dormir chez toi. Vis en conséquences, rétorque-t-il en s'étirant.

- Pff. Egalité, répond-elle en se levant.

- Eh ouais.

- Hum... Tu peux m'aider à repasser par la fenêtre ?

- Mets tes chaussures, avant.

- Kei ? demande la voix de sa mère derrière.

- Quoi ! N'entre pas, je te dis !

- Mais qu'est-ce que tu fais ?

Atsuko met ses chaussures à vitesse grand v et ouvre la fenêtre.

Tsukishima retire son t-shirt au moment où elle passe la jambe, et elle le regarde de haut en bas en voulant lui demander ce qu'il fait, jusqu'à ce qu'il "l'aide" à traverser, et qu'elle se retrouve dehors.

La femme entre.

- Tu n'es toujours pas habillé ?

- Maman, je t'ai demandé de ne pas entrer ! J'aère.

- Tu as tout défait ton lit !

- Je sais, râle-t-il, dehors.

- N'attrape pas froid ! dit-elle tout de même avant de se faire pousser dans le couloir. Il claque ensuite la porte derrière elle, et elle soupire :

- C'est si dur d'élever les adolescents de cette génération...

Tsukishima accoure à la fenêtre, où Atsuko l'attend.

- Tu ne t'es pas fait mal ? demande-t-il par acquis de conscience.

- Tu t'inquiète pour moi ? demande-t-elle en retour avec un sourire moqueur.

- Non, je ne m'inquiète pas pour toi, c'est pour ça que c'est chez moi que tu viens quand tu fais, le mur, ironise-t-il en chuchotant. Bien sûr que je m'inquiète pour toi, bécasse ! Tu fais partie de l'équipe !

Elle sourit.

- Merci.

- De ?

- D'être gentil, de temps en temps.

- Tu parles. Rentre chez toi.

- Et toi, couvre-toi. Tes muscles vont faire pâlir les voisins. Ou comme dirait ta mère, "tu vas attraper froid".

Il lève les yeux au ciel.

- On est en été, je te signale, et comme si quelqu'un regardait quoi que ce soit-

Il se tait net en croisant le regard de la voisine trentenaire d'à côté, qui ouvrait ses volets, à sa droite, un étage plus haut, au même moment.

Atsuko pince les lèvres, amusée.

- Quel timing !

Elle avise les deux adolescents, la tenue du garçon, et ce dernier écarquille les yeux, tandis que la femme détourne les yeux en refermant la fenêtre.

Atsuko éclate de rire dans son coude, histoire de ne pas faire trop de bruit, mais tout de même hilare.

- Allez, vas-t-en ! s'énerve-t-il.

- Oui, à tout à l'heure, sourit-elle en s'éloignant.

Elle passe une journée tout à fait longue et ennuyeuse, comme à son habitude, mais son arrivée au club lui donne le sourire, même si, parce que c'est jeudi, elle dû venir toute seule.

Il n'y a que deux jours dans la semaine où il peut venir pour faire le chemin avec elle. Deux, sur quatre. C'est terrible, en fait.

La solitude est une chose qui pèse bien plus lourd qu'une pièce de monnaie, quand on est seul à la partager. C'est quelque chose dont elle a de plus en plus conscience aussi.

Avant, l'idée de passer du temps seule avec quelqu'un lui faisait peur. Maintenant, ce dont elle a le plus peur, c'est de ne trouver personne dans le gymnase en ouvrant la porte. Comme quoi, le monde évolue. Son monde évolue.

- Salut Atsuko ! sourit Yamaguchi en arrivant.

Son immense voisin blond ne dit rien, et quand son ami lui faire remarquer qu'il pourrait au moins me saluer, il manque de dire qu'il l'a déjà fait, quand elle dit d'un air assez détaché :

- Non, je comprends, il doit être un peu fatigué, c'est tout. Ou alors... il a attrapé froid. Tu es resté devant une fenêtre ouverte, récemment ?

Il sourit, narquoisement :

- Même pas. C'est que, on te voit tellement souvent, qu'on ne sait plus si on t'a déjà vu ou pas, alors... avec le match d'hier, c'est comme si on s'était vus ce matin !

Yamaguchi rit avec eux sans avoir connaissance du double sens de leur tirade respective, et les deux garçons vont se changer.

- Atuko ! Salut ! sourit Hitoka en arrivant à son tour.

- Bonjour.

- Tu parlais encore avec ces deux là ? Y a pas à dire, faire le trajet ensemble, ça vous a rapprochés ! Même Tsukishima plaisante avec toi !

Atsuko rit de bon cœur avec elle. Après tout, la petite blonde a raison, ils s'entendent bien, tous les trois.

Elle se souvient de ce qu'il lui avait dit ce matin : "Tu fais partie de l'équipe !". Quoi de mieux comme preuve de leur bonne entente, si ce n'est pas ça ?

- C'est vrai...

Elle accompagne Hitoka à l'intérieur, et l'aide à installer le matériel tout en discutant.

-Tiens, maintenant que j'y pense... Comment tu fais, Tsukishima, dis-moi...? Comment tu fais pour ne jamais m'ennuyer ?


« Quand les corbeaux affluent, ils peuvent même tuer un énorme aigle.» (Toru Oikawa)

InéquationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant