11 (fin)

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Je ne sais pas où je dois aller, où me réfugier. Dans cette grande galerie pleine de monde, je me sens si minuscule et en même temps énorme. Je voudrais pouvoir me cacher, mais n'y arrive pas, tellement il m'est difficile de me frayer un chemin jusqu'à mon petit coin de tout à l'heure.

J'en peux plus de courir dans tous les sens. Je m'arrête, pour reprendre mon souffle qui a visiblement du mal à revenir, juste devant la toile que j'ai faite de Mathias. Décidemment, j'ai beau le fuir, il finit par me rattraper d'une manière ou d'une autre. Qu'est-ce que j'ai fait pour mérité ça ?

Lorsque j'ai peint ce tableau, c'était dans la perspective de me défaire des dernières images que j'avais de lui, de son corps endormi, complètement nu sous le drap blanc, avec la forte conviction qu'il ne se réveillerait pas de cet état de léthargie.

J'ai hésité à le mettre en vente aujourd'hui, avant de me dire qu'il fallait à tout prix tourner la page. Mais à présent, en découvrant, la notation vendue sur la toile, j'ai la sensation d'avoir fait une erreur, ce qui me fait perdre pied.

Je me rattrape à un socle, qui était sensé supporter un vase que Maryline a préféré enlever à la dernière minute, me permettant de me tenir debout. J'ai de plus en plus de mal à respirer, mon corps se met à frissonner, à battre tellement fort et bien plus vite qu'il ne le devrait, ce qui entraîne des milliers de picotement.

— Mademoiselle Vasco ? m'interpelle une voix d'homme qui ne m'est pas totalement inconnu. Paloma ? se reprend-il en me voyant défaillir sur place.

Pourquoi je ne parviens pas à me calmer ? Je suis pourtant habituée à gérer ce genre de situation.

— Regardez moi ! Et faites comme moi ! m'incite t-il à respirer à son rythme.

Ce que je fais, mais pas sans difficulté. Mon organisme n'étant pas forcément du même avis que moi. Après quelques secondes, je sens mon corps s'apaiser un peu, puis il reprend doucement une cadence normale. Après quelques minutes, j'ai l'impression qu'un gros caillou est entré dans ma tête, mais à part ça, rien à signaler, je me sens de nouveau plus calme et sereine.

— Ça vous arrive souvent de faire ce genre de crise ? m'interroge monsieur De Barosa, le père de Mathias.

— Trop à mon goût ! je sors malgré moi.

Je ne supporte plus ces crises à répétition. J'aimerais qu'on me donne la solution pour les éviter, car pour le moment rien n'a l'air de fonctionner.

— Puis-je vous aider ?

— Pouvez-vous m'emmener dans un endroit plus calme, s'il vous plait ? j'accepte son assistance, consciente que je n'y parviendrai pas toute seule.

Il me prend la main qu'il entoure autour de son bras. Et sans gêne je m'y accroche comme si ma vie en dépendait, ce qui est un peu le cas à cet instant. Puis, il nous dirige vers les bureaux de l'établissement qui doivent être vide de monde, et étrangement, tous les gens s'écartent sur notre passage. Les pouvoirs des De Barosa ne s'appliquent pas uniquement à Mathias, à ce que je constate.

Je passe plus d'une heure enfermée dans le bureau de Maryline à réfléchir à mon avenir, mais surtout à celui de ma petite fille chérie, avant de retrouver Pédro et le reste des invités encore présents dans la grande pièce. Je suis persuadée qu'elle aimerait avoir comme père Mathias. Il m'a suffit de les voir ensemble, une seule fois, pour comprendre que ces deux-là étaient fait pour s'entendre. Ils sont de la même espèce. J'ai l'impression d'être une pièce rapportée dans leur monde. Ma princesse, porte si bien son surnom, que cela en devient déroutant. On croirait qu'elle est venue au monde pour être traitée ainsi, en authentique joyau. Et son véritable père sait comment s'y prendre pour la rendre heureuse et la faire rayonner de plaisir. J'en viens à me demander si j'ai vraiment ma place auprès d'eux ?

En tout cas, mon exposition a été un vrai succès, pour l'amatrice que je suis, bien évidemment. Je ne m'attendais pas à récolter les lauriers avec ces tableaux qui à mon sens étaient bien trop personnels pour être considérés comme des œuvres d'art. Pourtant, plusieurs de mes toiles ont fait un carton, dépassant le millier d'euros, sans que je comprenne réellement pourquoi. Et étrangement, c'étaient celles dont je n'aurais jamais rien misées dessus, ni même un petit centime, qui se sont révélés faire ma réussite.

La propriétaire des lieux m'a expressément fait comprendre, il y a quelque temps déjà, que les artistes ne sont pas de bons juges, lorsqu'il s'agissait d'évaluer leur propre travail. Et je viens de saisir qu'elle avait entièrement vu juste. Elle a eu raison d'insister pour que j'expose mes tableaux. Sans elle, tout cela n'aurait pas été possible. Elle m'a donné ma chance, elle m'a fait confiance, alors que je n'y croyais pas moi-même. Je lui dois en partie ma réussite.




Publié le dimanche 16 mai 2021

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Désolée pour le retard. J'espère que ce bout de chapitre vous a plu ?

On se retrouve mercredi pour la suite.

Bonne soirée et bonne semaine  !

L'initiation à L'amour Désir et Amour Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant