Atsumu et Osamu dînèrent tard ce soir-là, dans la grande salle à manger. La plupart des autres gamins avaient mangé avant eux, aussi leur nourriture était-elle froide. La soirée, ils l'avaient occupée à bricoler le groupe électrogène à essence qu'ils avaient trouvé dans un local technique. C'était beaucoup mieux que d'assister au combat.
Depuis qu'ils étaient arrivés, ils avaient passé leur temps à fouiner partout et à amasser tout ce qui leur paraissait digne d'intérêt. Au début, ils avaient tenté de convertir Ushijima au génie civil en lui exposant leurs premiers projets : un réseau de pompes et de filtres destinés à viabiliser l'eau du lac, un système de chauffage pour l'hiver mettant à profit les bouteilles de gaz qu'ils avaient découvertes dans une remise, et, même, un plan pour produire de l'électricité. Mais celui-ci n'avait manifesté aucun intérêt pour la chose. Le palais ne faisait plus partie de ses priorités. Ses vues se portaient clairement sur l'extérieur. Il avait même sous-entendu qu'un certain inconfort endurcirait les troupes. Atsumu et Osamu avaient alors réalisé que le banquet donné en leur honneur le premier soir n'était en fait qu'une mise en scène destinée à impressionner les nouveaux arrivants. D'ailleurs, depuis, la tambouille n'avait cessé de se gâter. Ce soir, au menu, il y avait patate à l'eau et chou bouilli, suivis de pêches en boîte pour le dessert. Atsumu et Osamu ne s'en plaignaient pas - ils ne se souciaient guère de ce qu'ils mangeaient et, même si cette nourriture était fadasse, au moins elle rassasiait. Le changement ne leur avait tout de même pas échappé : les portions qui se réduisaient comme peau de chagrin, l'absence totale de viande...Ils nourrissaient tant d'espoirs en arrivant... Une vie nouvelle. Des opportunités à saisir. Mais, aux yeux de Ushijima, le palais se devait d'être habitable, sans plus. Les jumeaux évoquaient souvent la question ensemble. Ce qui ressortait de la discussion, c'était que leurs talents étaient davantage valorisés et appréciés à Waitrose qu'ici. Ils en venaient à regretter ce qu'ils avaient laissé derrière eux. Là-bas, ils avaient le sentiment d'être un rouage important de l'organisation, alors que là... N'étant pas des combattants, la seule perspective qui leur était offerte était de cultiver la terre. Autant dire que cela ne les enchantait guère. Malheureusement, en dehors de l'agriculture et de la guerre, Ushijima ne s'intéressait à rien.
Ils levèrent ensemble le nez de leur assiette lorsqu'ils virent débarquer Bokuto, vêtu d'une robe de chambre. Il était en piteux état. Il boitait. Il avait le visage et la poitrine couverts de pansements et de sparadraps. Un jeune garçon qu'ils ne connaissaient pas l'accompagnait. Il portait un bouclier ainsi que toute une armurerie qui tintait dans le sac de golf ventru qu'il avait sur le dos.
- Ah ! s'exclama Bokuto. Vous êtes là. Je vous ai cherchés partout.
- Un problème ? s'enquit Osamu.
- Non, non, j'étais juste en train de checker tout le monde. Vous êtes convoqués à la salle de bal à onze heures précises, avec les autres. Vous pouvez y être ?
- Pourquoi ? demanda Atsumu.
Il aimait bien Bokuto, même s'il supportait mal son côté autoritaire.
- Pourquoi ? Parce que je vous le demande ! Je veux que tout le monde soit là.
- Qu'est-ce qui se passe ? fit Osamu. Un couvre-feu ou quoi ?
- Qu'est-ce que tu me racontes, toi ? Quel feu tu veux couvrir ?
- Laisse tomber, va.
- On a des trucs à faire, ajouta Atsumu. On y sera peut-être pas à onze heures.
- Euh... t'as pas compris, là ! répondit Bokuto. « Vous pouvez y être ? », c'est une formule. En clair, ça veut dire que je vous ordonne d'y être. Tu saisis la nuance ?
- Et Yukie ? Elle y sera ?
- Elle est à l'infirmerie, répondit Bokuto.
- Elle va bien ?
- Ouais. Elle s'occupe de Kuroo.
- Au fait, félicitations pour ton combat, dit Osamu pour détendre un peu l'atmosphère. (Tout ce que le compliment lui valut fut un vague haussement d'épaules.) L'infirmerie, tu ferais bien d'y aller, toi aussi. J'ai entendu dire que t'avais morflé de l'oreille.
- Ce con a failli me la sectionner.
- Quand est-ce que Kuroo va sortir ?
- J'ai l'air d'un médecin, selon toi ?
- Non, dit Atsumu. Tu fais plutôt penser à un patient.
- Encore raté, chéri. Je suis un guerrier et, en l'état actuel des choses, c'est le poste le plus élevé qui soit. Reçu ?
- Si tu le dis, sieur Bokuto, répondit Atsumu avec un petit sourire moqueur.
D'un regard appuyé, Osamu lui conseilla de ne pas trop en rajouter. En effet, Atsumu était le genre de gars à la langue bien pendue qui avait la fâcheuse tendance à envoyer leurs quatre vérités à ses interlocuteurs. Cela expliquait sans doute pourquoi les gens qui les accompagnaient se faisaient souvent casser la gueule.
Heureusement, Bokuto se contenta de lui répondre avec un sourire vicieux :- Hé, les losers. Si vous ne nous aviez pas filé un sacré coup de main à Waitrose, ça fait longtemps que je vous aurais botté le train.
- Faut croire qu'il en faut, des losers, si on veut que les choses tournent, répondit Atsumu.
- On va dire ça.
- Donc, si je comprend bien, tu reconnais qu'on peut avoir notre petite utilité, au même titre qu'un immense guerrier comme toi ?
- Petite, c'est le mot, rétorqua Bokuto. Maintenant, tout ce que je vous demande, c'est d'être à la salle de bal à onze heures pétantes. Vu ? Je veux que tout le monde soit là.
- Chef, oui, chef ! répondit Atsumu en se levant d'un bond et en se fendant d'un salut militaire.
Bokuto éclata de rire et tourna les talons, imité par Yamaguchi, et ils les laissèrent à leurs patates froides.

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ENEMY
FanfictionL'épidémie a frappé tous ceux qui avaient vingt-deux ans passés. D'abord elle les a rendus fous. Ensuite elle a ravagé leurs corps. Et les a transformés en zombis terrifiants. Attention, certaines scènes peuvent choquer. UA Haikyuu Histoire lon...