Hinata avait traversé des moments difficiles, dérivant entre éveil et sommeil, dans un semi-coma ponctué de rêves d'un réalisme troublant. Avoir les mains attachées n'arrangeait rien. Certes, la chaîne lui permettait de s'allonger sur les sièges, mais le métal des menottes mordait ses chairs, pesait désagréablement sur ses articulations.
Un bruit dehors le réveilla. Quelque chose qui grattait le toit du métro. Ça avait bougé, puis ça s'était arrêté avant de bouger de nouveau, à petits gestes prudents, comme aurait pu le faire un animal. La rame grinça. Les yeux douloureux de fatigue, Hinata fixa le plafond. Dans la pénombre, il était persuadé de voir quelque chose sortir de la plaque de métal. Une sorte de bête sombre et tordue qui se matérialisait brutalement hors de l'obscurité. Et puis il battit des cils, et c'était parti.Assommé de peur et d'épuisement, désorienté, il sentit le froid le gagner. Le froid de l'impuissance absolue.
Quelques instants plus tard, il perçut un autre bruit. Des sortes de petits couinement dont il réalisa bientôt qu'ils provenait d'un des jumeaux, en pleurs.
Hinata adressa la parole au garçon, essaya de le réconforter. Il s'appelait Jason. Il était au plus mal. Il appelait ses parents. Shōyō ne savait trop quoi dire, surtout que lui aussi aurait rêvé de quelqu'un pour le consoler. Mais, au moins, lui parler éloignait un peu ses propres angoisses.Soudain, un rugissement suivi d'un bruit sourd retentit. Hinata frôla la crise cardiaque lorsque la porte s'ouvrît sèchement. Nick pénétra à l'intérieur, une cuvette en plastique à la main. Dans la nuit sans fin de la station de métro, Shōyō n'avait aucune idée de l'heure qu'il pouvait être.
Nick balaya du regard les quatre gamins.- Qui veut aller aux waters ?
D'une voix à peine audible, Jason avoua une envie pressante. Nick détacha la chaîne de la tringle courant le long du plafond et l'accompagna jusqu'au seau au fond du wagon. Jason pouvait à peine marcher tant ses jambes étaient avachies et faibles. Nick dut pratiquement le porter.
Dominant le petit de toute sa hauteur, il le regarda faire ses besoins. Hinata se demanda si, à la place de Jason, il réussirait. Dubitatif quant à la réponse, il décida de se retenir aussi longtemps que possible.
Après quoi, piochant dans sa bassine, Nick lâcha une louche de bouillie dans quatre bols en plastique. Une sorte de porridge, pour être exact. Avec beaucoup de sel et d'eau. Que Shōyō mit de côté pour plus tard.- Tu ferais bien de manger maintenant, mon bonhomme, conseilla Nick. Je récupère les bols.
À contrecœur, Hinata s'exécuta, enfournant de pleines cuillerées de brouet dans sa bouche pâteuse et sèche. Ensuite, Nick fit passer une bouteille d'eau, puis il nettoya la paille souillée par l'accident d'un des jumeaux.
Au plus profond de lui, Hinata trouva enfin le courage de parler.- Pourquoi vous nous retenez prisonniers ?
- Prisonniers ? répéta Nick avec un sourire. Mais on ne vous retient pas prisonniers, mon p'tit bonhomme.
- Alors pourquoi on est attachés ?
- Pour votre sécurité. On ne voudrait surtout pas que vous alliez traîner à droite à gauche pour vous perdre... ou vous faire attraper par un affreux.
- Vous mentez.
- Écoute, répondit Nick en passant affectueusement la main dans les cheveux de Shōyō, on veut juste que vous soyez en bonne santé et que vous mangiez bien, d'accord ? Ensuite, on aura tout le temps de voir ce qu'on va faire de vous. Inutile de se faire du mauvais sang, en tout cas. Dors, mon petiot, dors.
Puis il finit de ranger le wagon, vérifia les chaînes et sortit, sans oublier de fermer la porte à double tour derrière lui. Des bougies brûlaient toujours sur le quai, mais l'intérieur du wagon était plongé dans le noir. Prostré sur son siège, Hinata faisait ce qu'il pouvait pour évacuer ses idées noires. Une fois encore, le truc sur le toit se fit entendre. Une suite de frottements et de frôlements bizarres.
- C'était quoi, ça ?
- Sans doute des rats, répondit Yachi. Ou le chat... qui chasse les rats.
- Y a des rats ici ?
- Les seuls que j'ai croisés, c'étaient Nick et Rachel.
Les froissements semblèrent se reporter sur le bord du toit.
- J'pense pas que ce soient des rats, dit Shōyō.
- Cherche pas, y a toutes sortes de bruits bizarres ici.
Durant un long moment, Hinata fixa des yeux la fenêtre du wagon. Des points noirs dansaient devant ses yeux, s'agglomérant en formes étranges.
Il battit des paupières. Quand il les rouvrit, un visage de l'autre côté de la vitre le regardait fixement.
Il flottait là, apparemment sans corps ni cou. Hinata n'était même pas sûr qu'il soit humain. Il était légèrement couvert de crasse. Avec un crâne chauve et pointu, et une barbe en désordre qui semblait jaillir du menton. Deux grands yeux éclairaient cette face de cauchemar, le blanc contrastant de manière saisissante avec la couleur de la peau.
Avec un frisson d'horreur, Hinata réalisa qu'il n'avait ni bouche ni nez.
Il essaya d'hurler, mais sa gorge était muette, comme dans les rêves.
Oui, un rêve. Ça devait être ça. Pareille ignominie ne pouvait pas être réelle.Il n'empêche que c'était toujours là.
Hinata fixa la chose une demi-seconde, puis cligna des yeux. Elle avait disparu.- T'as vu ça ? murmura-t-il, sous le choc.
- Quoi ?
Shōyō se tut un instant, l'image de cauchemar durablement imprimée sur la rétine. Impossible de la déloger de sa mémoire. En particulier ce morceau de peau lisse où aurait dû s'ouvrir la bouche.
- Oh, rien, bougonna-t-il en se recroquevillant sur lui-même.

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ENEMY
Hayran KurguL'épidémie a frappé tous ceux qui avaient vingt-deux ans passés. D'abord elle les a rendus fous. Ensuite elle a ravagé leurs corps. Et les a transformés en zombis terrifiants. Attention, certaines scènes peuvent choquer. UA Haikyuu Histoire lon...