Ô Prince de l'exil, à qui l'on a fait tort,
Et qui, vaincu, toujours te redresses plus fort,
Ô Satan, prends pitié de ma longue misère !Les Fleurs du Mal (1857), extrait de « Les litanies de Satan » Charles Baudelaire.
† † †
De retour au château, protégé par une armée d'arbres roux échevelés, je n'aspirais qu'à me servir un grand thé et une part de carotte cake pour noyer ma peine dans le sucre... avant de le faire dans l'alcool et la fumée d'une fête.
Quand j'arrivai dans l'encadrement de la porte de la cuisine, quelques sorcières étaient rassemblées autour de la table, massive, au milieu de la pièce. Blair était le centre de l'attention. Enfin, elle, et son Volut'teste.
Le pentagramme entouré de sigils, tracés au fusain sur la table en bois, s'illumina en vert. Blair fit tomber une goutte de sang au-dessus du cercle. Elle lévita quelques secondes. Tout le monde était figé, les yeux rivés sur l'hémoglobine scintillant joliment à la lueur de bougies. Même moi je retenais ma respiration. Des volutes noires émanèrent de la goutte de sang. Tout le monde relâcha son souffle, la joie prit le dessus en un claquement de doigts.
— Comme attendu, aucune trace de sang de Nephilim.
— Tu vas pouvoir te lier et avoir des enfants avec ce beau représentant mâle des gargouilles, taquina Tania avec un clin d'œil.
Évidemment que les sorcières couchaient et obtenaient des gosses avec des Démons intermédiaires – voir de niveau supérieur pour quelques chanceuses, telle que la mère de Merlin. Mais je ne comprenais vraiment pas Blair. Ou plutôt, les goûts de Blair. J'avais déjà couché avec une gargouille et, même s'il avait eu un déhanché de tous les diables, la sensation de me frotter contre la pierre avait été trop présente pour moi. Ce n'était pas pour rien qu'on disait péché de chair.
— Félicitation Blair ! s'exclama Raven, sa petite-sœur, en écartant les bras.
— Merci mon petit Démon, répondit l'aînée en l'attrapant pour la serrer fort contre elle et l'embêter.
Je sortis à mon tour de mon coin de porte sombre.
— Félicitation Blair. J'espère que vous allez passer une union d'enfer et que vous aurez pleins de petits diablotins.
Elle me sourit à pleines dents.
Nous, sorciers et sorcières, étions heureux ainsi. Pas d'entrave, juste la liberté. Un contrat parfaitement pré-établi, à durée déterminée, comme le roi des Enfers en avait signé des légions. Mais beaucoup d'être surnaturel ne nous comprenait pas. Où ne faisait pas l'effort, au choix. Nous étions au monde de la nuit ce que Zeus était au panthéon hélénien... Des libertins.
La Magie aimait les phénomènes s'apparentant tout à la fois à des bénédictions, et à des malédictions. On disait que c'était pour préserver l'équilibre de notre univers. Par exemple, les vampires vivaient des siècles, étaient dotés de capacités physiques surhumaines et savaient hypnotiser leurs proies. Par contre, ils brûlaient au Soleil, étaient allergiques à l'ail, ne digéraient que le sang – humain de préférence –, et ne pouvaient passer le pas d'une maison sans y être invité. Pas pratique, quand on voulait vider quelqu'un de son hémoglobine...
Et puis, les vampires avaient tous la possibilité de rencontrer un Destiné ou une Destinée. C'était une personne que la Magie, cette force suprême, impalpable, incommensurable et surnaturelle, mettait sur leur chemin. Certains vampires pouvaient rencontrer plusieurs Destinés au cours de leur vie. Si le hasard n'existait pas, les actes et les opportunités manqués, ça, oui (et j'en savais quelque chose). Mais ils pouvaient transformer l'essaie avec un seul individu, en faisant ainsi leur Choisi.
VOUS LISEZ
L'Épine & la Plume
ParanormalRose-Elizabeth est la sorcière la plus mauvaise jamais née au coven de Salisbury, tout proche de Stonehenge. Les seuls domaines dans lesquels Rose-Elizabeth est douée sont l'exorcisme et la démonologie. Afin de trouver sa place, la jeune femme est e...