C'est le diable qui tient les fils qui nous remuent !
Les Fleurs du mal (1857), extrait de « aux lecteurs », Charles Baudelaire.
† † †
Il ne fallait pas croire que je n'avais pas senti le coup porter à mon crâne.
Les vagues de douleur continuaient d'affluer et de refluer, incessamment, à l'intérieur de mon crâne trop étriqué. Mon corps était lourd et engourdi. Je contins in extremis un soubresaut paniqué quand je compris que j'étais pieds et poings liés. Feignant de toujours être dans les vaps', je dressais les deux oreilles.
Il y avait quelques respirations endolories, pas loin de moi ; sans doute d'autres prisonniers. Dans des froufroutements de velours, des dizaines – peut-être plus ? – de paires de chaussures martelaient les dalles couvertes de tapis, tout autour de moi. Les Venge-Rouges mettaient la pièce à sac. À travers les étages du château, cette bande de fanatiques faisaient de même.
Des sanglots étouffés éclatèrent juste à côté de moi. À travers une mèche rousse, j'ouvris un œil, priant les Reines Démones pour ne pas me faire remarquer. Rhodes était allongée face à moi. Elle aussi était ligotée et bâillonnée. Recroquevillée sur elle-même, le visage déformé par la terreur et les larmes, l'adolescente semblait vouloir, plus que tout, fusionner avec le sol afin de disparaître.
Si je l'avais pu, moi aussi, j'aurais disparu dans le marbre...
Mais je n'avais pas le luxe de me payer une crise de nerfs, maintenant. Je devais à tout prix trouver une manière de nous sortir de là.
Une botte apparut pour fouler la Nephilim. Même si la rage flambait en moi, je n'eus d'autre choix que de refermer mon œil pour ne pas me faire griller.
— Ferme-la ! Démone !
Rhodes ravala un cri, ainsi que ces sanglots, se roula en boule. Satisfait, l'homme sans alla. Je n'avais même pas besoin de voir pour deviner un rictus suffisant que j'aurais rêvé de lui arracher avec les ongles. Morceau, par morceau.
Avant même qu'elle ne vienne, je sentis une chaleur printanière envelopper mon corps perclus d'angoisse. Roscelin entra dans la pièce. Je le sentis à travers toutes les fibres de mon corps. Même les paupières closes et dos à lui.
— On en a trouvé un dernier ! s'exclama un homme.
Au bruit cacophonique des pas, je devinais qu'ils avaient dû s'y mettre au moins à quatre pour faire ployer Ross. Je savais que mon Ange m'avait vu. Je sentais son regard chaleureux et protecteur appuyé contre moi. Mon brun ne fit rien pour attirer l'attention sur moi, veillant sur ma personne de loin.
Une nouvelle crainte m'envahit. Celle-ci, elle était comme un brouillard dense et gluant qui rampait pour me couvrir toute entière. Je n'arrivais plus très bien à respirer. Rhodes, non plus. Ainsi que toutes les créatures surnaturelles qui nous entouraient.
Cette sensation âpre et agressive qui s'immisçait dans chaque pore de ma peau... c'était de la haine à l'état brut. Plus profonde que l'étaient les océans. Plus pure qu'un diamant. Plus dure encore.
Je n'avais même pas besoin de deviner qui exsudait un miasme pareil. c'était une évidence.
— Blade Hunter, saluèrent les Venge'Rouges avec beaucoup de solennité.
— Vous l'avez trouvé.
Le sourire torve que j'entendais dans sa voix me faisait frissonner.
— Ainsi que la sorcière de feu. La rousse, allongée là-bas.
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L'Épine & la Plume
ParanormalRose-Elizabeth est la sorcière la plus mauvaise jamais née au coven de Salisbury, tout proche de Stonehenge. Les seuls domaines dans lesquels Rose-Elizabeth est douée sont l'exorcisme et la démonologie. Afin de trouver sa place, la jeune femme est e...