« Déjà les portes éternelles,
Enfant, sont ouvertes pour toi ; Viens ; je te donnerai des ailes :
Tu t'envoleras avec moi !Les jeunes croyances (1867), extrait de « L'ange et l'enfant », Jean Aicard.
† † †
Une goutte tomba sur ma joue. Je crus d'abord que c'était moi qui craquais. C'était en réalité Roscelin qui avait laissé échapper une unique larme de ses yeux exorbités, fixés sur l'auréole de l'Empereur céleste.
Sur sa propre bague et sur ce symbole de pouvoir divin brillait le même sceau.
Une preuve incontestable.
— Cette bague, je l'ai donnée à ta mère. Au cas où, expliqua le seigneur des Anges en remarquant la fixette que nous faisions sur son auréole. C'est bien la preuve de ce que j'avance. Alors, cesse de faire l'enfant : rentre avec moi.
— Non.
Je croyais que nous n'étions plus capables d'articuler autre chose que des phrases monosyllabiques.
— Michaël, ça suffit. Il n'a aucune envie de te suivre, intervint Lucifer, toujours sous sa forme démoniaque.
— Regarde-le. Tu lui fais peur, enchaîna Belzébuth pour enfoncer le clou.
— Il refuse de me suivre parce qu'il a cette diablesse dans les bras et qu'elle le corrompt ! Jamais il n'aurait refusé d'obéir à son seigneur et maître avant ça !
— Prends garde à tes paroles, petit frère. C'est de notre descendance dont tu parles, menaça le roi infernal en expirant par ses narines dilatées un souffle bleuté brûlant.
La tension montait, montait encore. Elle allait finir par éclater et je ne savais pas comment nous pouvions la faire redescendre...
Tout ce que j'arrivais à faire, c'était me raccrocher à Ross autant qu'il se raccrochait à moi, alors que je voyais le bien et le mal se disputer littéralement sous mes yeux, que je sentais l'aigreur des regards des séraphins plantés sur nous deux, et que j'essayais d'empêcher mes propres Démons de s'extraire des cercles d'invocation qui clignotaient autour de nous.
Je croisai brièvement le regard iridescent de Belzébuth avant qu'elle ne se concentre à nouveau sur Michaël.
— C'est vraiment ta spécialité ça : obliger les autres à faire comme bon te semble, à ta manière, sans jamais écouter ce qui leur ferait plaisir, même lorsque tu affirmes que tu les aimes... observa Belzébuth, ses yeux opalescent réduits à deux fentes assombries. Pourquoi crois-tu que je m'en suis allé, il y a des milliers d'années de ça ?
— Si j'avais su que tu deviendrais... ainsi, j'aurais fait les choses autrement, certes, argua Michaël comme si la situation le faisait rire.
Mais son masque de cire s'était troublé, l'espace d'une seconde.
Une légion de mouches à la carapace irisée arriva de nulle part pour entièrement couvrir le corps immense de Belzébuth. Lorsqu'elles s'en allèrent, une femme petite, fine et gracile, à la peau et aux cheveux pâles comme la Lune, vêtue de longs drapés noirs aux reflets moirés et parée de pierre précieuses facettées, avait prit la place de la Démone effrayante. Seuls ses yeux arc-en-ciel et l'aplomb qui y brillait prouvaient que ces deux apparences, aussi éloignées étaient-elles, appartenaient à la même entité.
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L'Épine & la Plume
ParanormalRose-Elizabeth est la sorcière la plus mauvaise jamais née au coven de Salisbury, tout proche de Stonehenge. Les seuls domaines dans lesquels Rose-Elizabeth est douée sont l'exorcisme et la démonologie. Afin de trouver sa place, la jeune femme est e...