Un peu avant Noël et toutes les festivités que cette date entraîne, Sidjil avait envoyé un e-mail au commissariat de police le plus proche de chez Maxime. Dans une dizaine de lignes très courtoises, il avait fait la demande d'un rendez-vous avec les anciens enquêteurs qui avaient élaboré le compte rendu du meurtre de leur victime. Il avait eu une réponse positive du commissariat dans les deux semaines qui avaient suivi. Mme Mourdect et Mr Tryvat avaient quitté leurs postes respectifs pour venir assister à la réunion. Ce rendez-vous m'était Maxime dans tous ces états et cela avait le don d'énerver Sidjil. Le voir courir partout, changer trois fois de cravates puis changer de nouveau... Et puis au simple stress d'une réunion importante s'ajoutait pour Maxime le désamour du Parisien pour les forces de police suite à une vieille affaire. Mais quand bien même le brun le fatiguait, Sidjil ne disait rien. Depuis leur dispute, de l'eau avait coulé sous les ponts et chacun faisait des efforts colossaux pour se pardonner et pour instaurer une paix durable. Alors le plus grand faisait tout pour détendre son petit ange. Cela passait par lui préparer son café ou encore se parfumait avec une odeur de pomme sucrée, sa préférée...
Au fond de lui, Sidjil aussi sentait le stress monter. Ce rendez-vous représentait un grand pas en avant pour leur article. Pouvoir rencontrer, confronter et interroger les principaux acteurs du compte rendu serait d'une aide irremplaçable. Mais cela voulait aussi dire remettre en question les résultats du travail de deux personnes et ça, ça n'était jamais agréable...
***
Après un accueil, si non chaleureux, tout à fait cordial, les deux journalistes se retrouvèrent laissé à eux-mêmes dans une immense salle de réunion au plafond plus gris que blanc et aux fenêtres grillagés comme seule ouverture.
« Pff... J'espère que ça ne va pas durer longtemps et qu'ils vont arriver bientôt. J'ai pas toute ma journée moi, grinça Maxime.
— Bien sûr que si. Il n'y avait rien d'autre écrit sur ton agenda alors arrête un peu de te plaindre et patiente, répliqua Sidji
— Hum... Alors comme ça tu lis mon agenda, demanda Maxime amusé.
— Oui, euh, enfin non. Il traînait ouvert sur ton bureau, j'ai juste jeté un coup d'œil... se rattrapa le brun
— Quand je vais dire demain à Elian que tu fouilles dans mes affaires !
— Pfff, tu ne le vois que dans deux semaines, tu auras oublié d'ici là...
— Piégé. Comment, si tu n'as jeté qu'un « coup d'œil » pour voir mon rendez-vous avec Elian pour dans deux semaines.
— *Gloups* J'ai vu tout tes rendez-vous du mois sur la page.
— Sidjil... Mon agenda est un semainier. Espèce de menteur.
— Je- »
Les portes de la salle s'ouvrirent et la justification du brun se perdit dans les salutations des nouveaux arrivants.
Les « bonjours », « merci de vous être déplacé », « ravie de vous rencontrer » passés, ils s'installèrent tous autour d'une table carrée. La disposition fut ainsi faite. Sidjil prit place d'une part de la table, Maxime de l'autre face à lui, chacun se retrouva à nouveau encadré par les deux enquêteurs et en bout de table, la cheffe du commissariat présidait la réunion.
La discussion pu commencer.
On parla d'abord de l'objet de ce rendez-vous, le cas du « manoir de la Cusance ».
Avant même d'aborder le pourquoi, deux journalistes avaient déterré cette affaire, les deux enquêteurs retracèrent leur arrivée dans ce manoir, l'horreur de la scène, l'expression d'effroi sur le visage du père, les corps glacé des enfants, les traces des larmes sur leurs joues...
Sidjil lu dans leurs yeux qu'une part d'eux était restée sur cette scène de crime.
Ensuite, un long dialogue s'opéra. Maxime sans avouer la véritable raison de leur recherche, tenant à ce que la lettre et leur informateur restassent encore secrets, raconta un bobard sur un article commémoratif... Les policiers ne creusèrent pas plus loin et saluèrent l'initiative. Néanmoins, quand vain le moment de reprendre point par point l'enquête, notamment sa conclusion, l'échange devint plus houleux :
« Ce que nous voulons comprendre, c'est comment l'affaire a pu être classée sans suite alors que toute la famille de cet homme n'a pas été considérée comme suspecte. D'après votre rapport, ils n'ont été interrogés qu'une fois, et cela, sans grande conviction.
— Tout d'abord, je tiens à vous affirmer, l'enquête a été réalisée en suivant toutes les procédures à la lettre. Il n'y a eu aucun écart, sinon l'inspection générale l'aurait relevé. Mon collègue et moi-même avons interrogé les membres de la famille et aucun, je dis bien, aucun ne s'est révélé correspondre au profil du tueur, réplique la femme.
— Donc vous aviez établi une hypothèse de profil sans le notifier dans le dossier, relança Sidjil, permettez, mais ce n'est pas vraiment commun.
— Écoutez, je connais mon métier et ce n'était pas ma première scène de crime ou affaire de ce genre. Alors peut-être que dans les films ou dans les livres, la famille est toujours impliquée, mais dans le cas du manoir de la Cusance non. Ils étaient dévastés et ont pour la plupart suivi un accompagnement psychologique après l'assassinat. Alors oui, nous avons émis des hypothèses mais sans preuves, nous ne sommes pas autorisés à le consigner dans le dossier.
— Vous m'excuserez, mais écarter la famille aussi rapidement n'était pas prudent, ajouta Maxime, bien que vous n'ayez de preuves, avez-vous relevé des alibis ? Des pistes ?
— Monsieur, ça devient presque insultant. Nous avons fait notre travail, point. D'ailleurs, pourquoi avez-vous besoin d'autant d'informations pour un artcile commémoratif ? Je m'attendais à une discussion sur la procédure, non à des accusations malvenues.
— Pardonnez-nous, la curiosité journalistique prend parfois le dessus, expliqua Sidjil pour apaiser la discussion. Si vous avez des choses à nous dire, allez-y, nous ne vous couperons plus. »
L'homme, jusque-là plus discret, se leva et lança un diaporama, le même qu'il avait dû présenter au cours de l'enquête.
Et la réunion continua.
***
Alors que l'enquêteur retraçait jour par jour les investigations, Sidjil prenait studieusement des notes, interrogeait un point qui lui semblait flou et restait attentif à ce macabre exposé.
Alors que Mr Tryvat se rassit, la commissaire invita Sidjil à prendre la parole pour conclure cette rencontre. Le brun se redressa et commença :
« Mon, hum, mon collègue et moi tenions d'abord à vous remercier pour votre aide et votre temps. Vos réflexions et vos informations nous sont précieuses, plus qu'un article commémoratif, nous tenons à souligner votre travail et celui de vos collè- »
Son mot se perdit dans sa voix. Quelque chose venait de le toucher. Non, pas quelque chose, quelqu'un ! Il sentait un pied, caresser doucement, précieusement sa zone sensible. De léger va et vient créaient un frottement insupportable.
Déstabilisé au possible, Sidjl dû contenir son envie de sortir de la salle en courant. Feignant une quinte de toux, il se redressa et croisa le regard pétillant de son ange " « Mon démon, oui" se dit-il.
Le brun, de l'autre côté de la table, le regardait droit dans les yeux, se délectant de chaque micro-réaction qu'il pouvait avoir.
" Hum, hum, m, excusez-moi, oui, alors, heum, merci beaucoup pour tout et bonne continuation."
Il se leva et quitta la salle, un sourire courtois figé sur ses lèvres.
Il courut le plus vite possible, réglé un.... problème naissant.
Maxime lui, intérieurement hilare, salua les enquêteurs et quitta la salle tout sourire.
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L'affaire [Djilsime]
FanfictionC'était terrifiant de se dire qu'il était prêt à le suivre jusqu'au bout du monde. Inconcevable même. Cela relevait des pensées intrusives, folles, idiotes, qui jaillissaient dans son esprit de plus en plus souvent. L'affaire, il devait se concentre...